Par Slim BEN YOUSSEF
Il s’appelle Fares Khaled.
Il n’avait ni arme ni slogan. Seulement un drapeau. Un geste. Un élan. Une chute – un idéal porté jusqu’au bout. Et un nom : Fares Khaled. Étudiant tunisien, mort en tentant de hisser le drapeau palestinien. Mort pour une idée. Pour un peuple. Pour une cause qui n’est pas la sienne par le sang, mais qui est la nôtre par la solidarité, par la conscience, par le refus de détourner les yeux.
Il est tombé alors qu’il voulait élever. Voilà le paradoxe terrible. Puissant. Il est tombé pour que d’autres ne tombent plus dans l’oubli, dans l’indifférence, dans le silence. Il a mis son corps au service d’un symbole, et ce symbole l’a englouti. Mais ce geste ne meurt pas. Il s’inscrit. Il s’imprime. Il s’élève. Il transcende les époques, les frontières, les civilisations.
Aujourd’hui, en ce 9 avril, jour des martyrs en Tunisie, nous ne pouvons pas – nous ne devons pas – taire ce nom. Car il n’y a pas de petite mort quand on meurt pour les vivants. Fares Khaled rejoint, par la force du destin et la clarté de son geste, cette lignée d’hommes et de femmes qui, à chaque époque, ont fait du sacrifice une mémoire vivante, une langue commune. Une langue au-dessus de toutes les langues.
Nos martyrs s’élevaient contre l’occupant, contre l’injustice, contre l’arbitraire, contre les tyrans. Et aujourd’hui, à travers Fares, c’est une jeunesse tunisienne qui hurle son refus de l’occupation en Palestine, son refus du génocide, de l’apartheid, de la résignation. Ce n’est pas une mode. Ce n’est pas un slogan creux sur les réseaux. C’est un engagement viscéral, qui puise dans notre propre histoire : celle d’un peuple qui a conquis sa liberté en la payant au prix fort.
Qu’est-ce qu’un martyre ? Une idée. Une cause. Un autre qui survit. Ce drapeau que Fares voulait hisser, c’est aussi le nôtre. Celui de tous ceux et toutes celles qui refusent le monde tel qu’il est. Celui de ceux et de celles qui savent que la justice ne se négocie pas. Elle se réclame. Elle se crie. Elle se brandit.
Fares Khaled est tombé. Mais son geste reste debout. C’est la genèse d’un symbole. Une icône. Un noble monument.
Paix à l’âme du martyr. Longue vie à la cause palestinienne.