Par Slim BEN YOUSSEF
Il est des amitiés que ni le temps ni les tempêtes ne peuvent altérer. Celle qui lie la Tunisie et l’Algérie appartient à cette catégorie rare, précieuse, forgée dans l’histoire et dans le sang. De la solidarité révolutionnaire à la fraternité diplomatique, de la coopération sécuritaire à l’entraide humaine, nos deux nations n’ont jamais cessé de dialoguer, de s’écouter, de se comprendre.
Aujourd’hui, ce lien atteint un niveau d’excellence remarquable. La concertation entre nos deux nations est constante, dense, confiante. Elle s’exerce sur les grands dossiers bilatéraux, mais aussi régionaux et internationaux. Elle s’est faite méthode. Elle doit devenir projet.
Car le monde change. À une vitesse vertigineuse. Les plaques tectoniques de l’ordre mondial se déplacent. La géopolitique s’embrase, l’économie globale vacille, les tensions systémiques s’accumulent. Face à ces bouleversements, nos deux peuples ne peuvent plus se contenter d’une diplomatie harmonieuse et d’un commerce raisonnable. Il nous faut penser plus grand. Plus loin. Plus fort.
Et si l’heure était venue de révolutionner notre partenariat stratégique ?
Et si, ensemble, nous osions l’Histoire ?
Pourquoi ne pas imaginer – dès aujourd’hui – un dinar tuniso-algérien ? Une monnaie commune, audacieuse, africaine, qui exprimerait non seulement notre souveraineté, mais notre volonté d’un destin économique et social partagé. Pourquoi ne pas concevoir un marché commun tuniso-algérien, prélude concret – pour ne pas dire alternative concrète à l’unité maghrébine tant attendue mais trop souvent trahie ? Une union de fait, fondée sur la libre circulation des biens, des personnes, des projets et des rêves. Une alliance réelle, structurante, moderne, capable de créer de la richesse, de l’emploi, de l’innovation. Capable, surtout, d’inspirer.
L’Europe l’a fait après deux guerres mondiales. L’Afrique le tente à l’échelle continentale avec la ZLECAf. À l’échelle régionale, l’Afrique de l’Ouest a déjà sa Cédéao ; l’australe sa SADC ; le Grand Rift son EAC ; le Sahel son AES. Pourquoi nos deux pays (et la Libye suivra), qui se connaissent, qui s’aiment, qui se respectent, ne le feraient-ils pas à leur échelle ? Non pas contre quiconque, mais pour eux-mêmes. Pour leur jeunesse. Pour l’avenir.
Les outils existent. Les convergences aussi. Reste la volonté politique. Reste l’audace de décider. De mettre en commun des visions, des infrastructures, des énergies. De poser les bases d’un pôle tuniso-algérien (et la Libye s’y joindra) capable de peser dans la Méditerranée, dans l’Afrique, dans le monde.
Ce ne serait pas un rêve. Ce serait une stratégie.
Ce ne serait pas une utopie. Ce serait une réponse naturelle aux profondes mutations de notre époque.
Il y a des moments où les peuples attendent plus que de la prudence. Ils attendent du souffle. De l’élan. De l’audace. Ce moment est là.