Tabac, alcool et drogue envahissent de plus en plus les milieux scolaires, notamment chez les jeunes lycéens qui s’y adonnent volontiers en l’absence de véritables décisions draconiennes pour éradiquer ces mauvaises pratiques immorales et dépravantes, voire nuisibles à la santé physique et spirituelle de nos enfants. C’est devenu assez courant dans nos écoles, suite à un certain relâchement au niveau de la discipline et un laisser-aller flagrant marqué dans les administrations scolaires. Ajoutons à cela la précarité de la situation sociale et l’insuffisance ou l’absence d’une présence sécuritaire aux abords des établissements scolaires, ce qui a encouragé le trafic de stupéfiants parmi nos élèves, si bien que bon nombre de nos jeunes lycéens ont balancé dans la délinquance et la consommation des stimulants.
Si le tabac est devenu une addiction parmi nos élèves, les autres produits (alcool et drogue, connue sous le nom de « zatla ») en sont encore au stade artisanal, étant seulement l’apanage d’un nombre réduit de nos élèves capables de se procurer leurs petites doses auprès des « dealers » qui rôdent quotidiennement autour des établissements scolaires et qui écoulent leurs marchandises aisément et dans la discrétion totale. Aussi craint-on que ces jeunes « amateurs » deviennent des « accros », tant qu’une action efficace contre ces fléaux n’a pas encore été entreprise pour endiguer ces pratiques de plus en plus répandues dans l’enceinte de nos écoles et tout autour.
Un phénomène inquiétant
Le ministère de l’Education, conscient de ce phénomène qui prend de l’ampleur, commence à prendre la chose au sérieux, appelant à une vigilance particulière de la part des responsables scolaires et à la nécessité d’une sensibilisation des parents et des élèves à ce problème pour mettre fin à ces pratiques addictives. Mais tout en reconnaissant l’existence de ce phénomène qui ne cesse de s’exacerber d’une année à l’autre, le ministère décline souvent toute responsabilité en pointant du doigt les parents qui ne doivent pas donner à leurs enfants un argent de poche dépassant leurs besoins. Mais là, ce n’est pas la vraie raison ; les causes sont plus profondes. En effet, selon des études faites auparavant, les principales motivations qui poussent les élèves à fumer sont la promiscuité (63%), le plaisir (22%) et le snobisme (13%), d’où des taux enregistrés en 2024 alarmants : 11,9% des adolescents âgés de 13 à 15 ans sont des consommateurs réguliers de tabac, une prévalence qui monte à 14% chez ceux âgés de 15 à 17 ans.
Quant à la consommation de drogue dans nos écoles, elle semble aller crescendo ces dernières années. La consommation de drogues bat son plein en Tunisie, notamment dans les rangs des élèves. La situation est tellement préoccupante que des enfants sont même victimes de toxicomanie. Les jeunes consommateurs ne trouvent plus de difficulté pour acquérir leur dose de stupéfiants et ce, à travers les réseaux de « dealers » qui rôdent autour des établissements scolaires pour écouler leurs produits parmi les élèves. Selon les statistiques de l’Institut national de la santé publique, « 7% des enfants tunisiens ont consommé de la drogue et 10% d’entre eux ont consommé la première prise avant leurs 13 ans, en 2022. L’accès est facile, si bien que 16,3% des élèves estiment que l’achat des drogues est simple. 5,2% des enfants tunisiens ont ’’sniffé’’ du benzène ou de la colle. »
La consommation d’alcool chez les jeunes est également en hausse depuis quelques années. Selon une enquête publiée en 2023 par l’Institut national de la santé publique, on constate « une augmentation alarmante du pourcentage de jeunes Tunisiens consommateurs d’alcool, âgés de 16 à 18 ans, en milieu scolaire. » D’après cette enquête, la consommation de boissons alcoolisées est facile pour 15,9% des élèves. Cette tendance inquiétante a des conséquences graves aussi bien sur la santé des élèves que sur la santé publique. D’où l’urgence d’adopter des mesures plus strictes pour contrer ce phénomène.
Sensibiliser et agir…
Dans le cadre de la sensibilisation aux méfaits du tabac, de l’alcool et de la drogue et en vue d’une prévention contre ces fléaux qui touchent de plus en plus nos institutions scolaires, des programmes de prévention en milieu scolaire doivent être ciblés, en utilisant des méthodes interactives destinées aux jeunes. C’est qu’il faudrait introduire la lutte contre les stupéfiants dans les programmes officiels, moyennant des cours donnés par les professeurs de sciences au moins une fois par trimestre ; mais aussi, on pourrait organiser des tables rondes ou des conférences-débats deux ou trois fois durant l’année scolaire auxquelles des experts seront invités pour débattre de la question. Dans certains pays, pour prémunir contre les conduites addictives des élèves, la prévention est intégrée dans les programmes dès l’école primaire et tout au long du cursus scolaire.
Faute de mieux, la meilleure façon de lutter contre ces pratiques dangereuses dans nos écoles est de mener des campagnes de sensibilisation sur le terrain, au sein même des établissements et à travers les différents médias, sans oublier de faire rétablir l’ordre et la discipline dans nos écoles, devenues depuis quelque temps un terrain propice pour de nombreux abus dangereux qui nuisent à l’image de notre système éducatif et à l’avenir de nos élèves. Bref, en matière de lutte contre le tabac, l’alcool et la drogue dans nos écoles, beaucoup reste à faire…
Hechmi KHALLADI