Avec l’évolution de l’internet, et comme c’est le cas pour plusieurs secteurs, de nouvelles options font leur apparition dans le milieu médical de manière à rapprocher les services et à les rendre disponibles même à domicile avec des consultations en ligne qui n’ont rien à envier, dans beaucoup de cas, aux consultations ordinaires.
La télémédecine est une pratique médicale à distance mobilisant les nouvelles technologies de l’information et de la communication pour mettre connecter soit le patient et un ou plusieurs professionnels de santé (parmi lesquels un professionnel médical à minima) soit plusieurs professionnels de santé.
Elle permet de répondre aux difficultés démographiques, épidémiologiques et organisationnelles. De ce fait, la télémédecine constitue un levier fondamental de la mise en œuvre de nouvelles organisations susceptibles de relever les défis actuels tels que le vieillissement de la population, l’augmentation de la fréquence des maladies chroniques, la répartition inégale des professionnels de santé et les contraintes budgétaires.
Ainsi, l’emploi de la télémédecine a des bénéfices aussi bien pour les patients, avec une amélioration de l’accès à des soins de meilleure qualité, une amélioration des délais de prise en charge, une diminution des événements graves, un maintien possible à domicile, une diminution de la fréquence et la durée des hospitalisations, une garantie et une sécurité optimale des transferts de données.
« 5 minutes au lieu de 6 mois » !
Qu’en est-il en Tunisie ? Devant la pénurie des médecins spécialistes dans les régions défavorisées dans notre pays, lesquelles abritent pourtant plus de 40% de la population tunisienne, et devant les difficultés dans le secteur de la santé à cause de l’offre médicale qui demeure en retard, la télémédecine représente une solution au manque de médecins spécialistes dans ces régions. D’ailleurs, les spécialistes estiment que 75% des cas nécessitant des soins peuvent être soignés en ligne.
Il y a lieu de rappeler que la télémédecine a fait son apparition, en Tunisie, en juillet 2017 avec une première expérience en ophtalmologie à l’hôpital régional de Tozeur. 341 patients ont été examinés en 2 mois, grâce à la télémédecine. La transmission du diagnostic adressé par un spécialiste au centre de santé où se trouve le patient n’a nécessité que 5 minutes, ce qui a fait dire au Directeur régional de santé de Tozeur, que cette expérience a permis « un important gain de temps : le diagnostic est établi en 5 minutes au lieu d’une durée allant parfois jusqu’à 6 mois ».
Grâce à cette nouvelle option de soins, un patient qui réside loin de la capitale, et qui a besoin du diagnostic de sa radio thorax, par exemple, peut le faire grâce à la digitalisation, la radio est transmise directement à l’hôpital avec un diagnostic posé par un professeur de radiologie et le patient obtient le résultat dans la journée même.
Mettre en place la législation nécessaire
Aujourd’hui, cette pratique est souhaitée de la part de toutes les parties concernées, mais elle demeure encore dépendante de certaines législations qui doivent organiser cette pratique. La loi de l’année 2018 a instauré un cadre légal à la télémédecine en Tunisie. Ce cadre n’est cependant pas suffisant en soi car des questions d’ordre juridique subsistent afin de délimiter les conditions précises de cet exercice et délimiter la part de responsabilité de chaque intervenant que ce soit les organisateurs des activités de télémédecine, les prestataires de services de santé et ses usagers. Plusieurs problèmes médico-légaux peuvent être générés par la pratique de la télémédecine et les autorités devront mettre les choses au clair dans les plus brefs délais pour en faire un moyen pratique et rapide de consultation médicale sans passer par le circuit ordinaire et ses difficultés.
Sur le plan pratique, plusieurs plateformes de télémédecine ont été créées dans le secteur privé. Ces fournisseurs de traitement à distance sont de plus en plus sollicités comme en témoigne Mme Safa Sadki : « Nous voulons accompagner pleinement la transformation digitale du secteur de la santé tunisien, aussi bien public que privé. Nous misons fortement sur l’intelligence artificielle pour développer des modules prédictifs capables d’assurer le suivi des maladies chroniques, la prévention personnalisée et l’aide au diagnostic et aspirons à positionner la Tunisie en tant que hub régional de la santé numérique, en exportant nos technologies vers d’autres pays africains et maghrébins confrontés aux mêmes défis. Nous ambitionnons aussi d’attirer des patients étrangers pour des soins à distance ou en présentiel, faisant de la Tunisie une destination de tourisme médical compétitive, sûre et digitalement avancée ».
Peut-on dire que les plateformes qui sont actuellement disponibles, sont fiables et ne présentent pas de risques ? Notre interlocutrice y répond clairement : « Nous utilisons une interface simple et intuitive, que ce soit pour les patients ou pour les médecins. Nous travaillons sur la qualité de la consultation à distance (vidéo et audio de haute qualité et stable), un dossier médical accessible et sécurisé, une assistance humaine et un support client (Chat et ligne d’assistance) ainsi que la protection des données qui sont chiffrées de bout en bout. Nous proposons aussi la prescription électronique. C’est dire que nous avons pris toutes nos précautions pour un paiement sécurisé et une protection maximale des données confidentielles. Nous avons également prévu la synchronisation avec les outils de gestion de cabinet si besoin pour les médecins ».
Reste à révéler comment sont fixés et payés les coûts d’une visite en ligne. Pour Mme Sadki, les revenus proviennent d’une commission de 5% sur chaque consultation, payée par les médecins. Cela évite de dissuader les patients et offre aux médecins une clientèle plus importante. Étant rémunéré à la commission, le solde de la consultation réglé par le patient est automatiquement versé sur le compte du médecin, qui peut en suivre le détail en temps réel via son application.
Kamel ZAIEM