Dans un contexte marqué par la variabilité climatique et la pression croissante sur les ressources hydriques, le suivi de la pluviométrie et des réserves en eau demeure un indicateur essentiel pour évaluer la situation agricole et la gestion de l’eau.
Le dernier bulletin de l’Observatoire national de l’agriculture, consacré à la situation des précipitations, met en évidence une amélioration notable par rapport aux années précédentes. En effet, la majorité des régions ont enregistré un excédent pluviométrique oscillant entre 1 % et 58 % durant la période allant de décembre 2024 jusqu’au 15 mai 2025.
À cette date, les quantités de pluie cumulées à l’échelle nationale ont atteint 247 mm. Les régions les plus arrosées sont situées dans le Nord-Est, avec 581,7 mm, suivies du Nord-Ouest (549,8 mm) et du Centre-Est (341,7 mm), confirmant ainsi une répartition géographique marquée des précipitations.
Dans le prolongement de cette dynamique hydrique, la situation des barrages a également connu une évolution significative au cours de la période allant du 1er septembre 2024 au 15 mai 2025. Les apports globaux en eau ont atteint environ 902,6 millions de mètres cubes, soit une augmentation de 43,6 % par rapport à la même période de l’année déficitaire précédente (628,7 millions de mètres cubes). Toutefois, ces apports restent inférieurs de 46,3 % à la moyenne enregistrée pour la même période lors des années excédentaires (1 682,1 millions de mètres cubes).
Ces volumes se répartissent de manière inégale entre les régions, reflétant les disparités géographiques : le Nord concentre 90,4 % des apports totaux, contre 7,1 % pour le Centre et seulement 2,5 % pour le Centre-Ouest.
S’agissant des réserves, le stock global des barrages s’élève à 964,8 millions de mètres cubes, contre 794,3 millions à la même période de l’année déficitaire, soit une hausse de 21 %. Néanmoins, ce niveau reste en deçà de la moyenne des trois dernières années excédentaires, estimée à 1 226,3 millions de mètres cubes.
« Les barrages ont reçu environ 930 millions de mètres cubes, soit 55 % de la moyenne des précipitations habituellement enregistrées », a souligné Faiez Msallem, directeur général des Barrages et Grands Travaux Hydrauliques, au ministère de l’Agriculture.
Dans une déclaration à la télévision nationale, il a insisté que la Tunisie n’avait pas connu de tels niveaux depuis quatre ans, mettant en avant le caractère exceptionnel des apports enregistrés cette année.
La répartition du stock suit une tendance similaire à celle des apports : 90,9 % des réserves sont localisées dans le Nord, 7,1 % dans le Centre et 2 % dans le Centre-Ouest. En termes de remplissage, les données montrent une situation contrastée entre les ouvrages : le taux global de remplissage des barrages s’élève à 40,7 %, avec un niveau de 35,5 % pour le barrage de Sidi Salem et de 69,5 % pour le barrage de Sidi El Barrak.
Dans le même ordre d’idées et en lien avec la situation des barrages, l’Observatoire tunisien de l’eau a souligné une amélioration notable du taux de remplissage. En effet, au 27 mai 2025, ce taux a atteint 41,2 %, soit l’équivalent de 976,179 millions de mètres cubes, contre 33,2 % à la même date en 2024, ce qui représente une hausse de +8 %.
Toutefois, malgré cette amélioration encourageante des précipitations et des niveaux de remplissage des barrages, la gestion des ressources en eau en demeure confrontée à de nombreux défis.
Réseau de distribution
Parmi les défis persistants, ceux évoqués récemment par Hamadi Habaieb, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, chargé des eaux, illustrent bien l’ampleur des efforts à fournir. Lors d’une visite d’inspection dans le gouvernorat de Gafsa, consacrée à l’avancement des projets destinés à renforcer l’approvisionnement en eau potable, il a attiré l’attention sur l’état du réseau national de distribution d’eau potable géré par la Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (SONEDE).
« Cette infrastructure s’étend sur 59 000 kilomètres à l’échelle nationale, dont 20 % ont plus de 50 ans et nécessitent des travaux de réhabilitation. Or, les moyens financiers actuels de la société ne permettent d’entretenir que 200 kilomètres par an », a-t-il précisé.
Toutefois, il a indiqué qu’un programme plus ambitieux devrait être lancé à partir de 2026, avec l’objectif d’atteindre 1 000 kilomètres de réhabilitation annuelle jusqu’en 2030, couvrant l’ensemble des gouvernorats du pays.
Concernant spécifiquement le gouvernorat de Gafsa, un contrat d’une valeur de 10 millions de dinars a été approuvé pour intervenir sur les pannes et les ruptures, en vue de renforcer la maintenance du réseau de distribution.
Parmi les défis majeurs, on compte également l’importante quantité d’eaux de pluie qui s’écoule directement vers la mer sans être valorisée, ce qui représente une perte significative de ressources hydriques précieuses.
Pour mieux préserver ces eaux pluviales, Faiez Msallem, directeur général des Barrages, a indiqué qu’une vaste étude est en cours afin de transférer le surplus d’eaux de pluie du Nord et du Centre du pays. « Ce volume excédentaire est estimé à environ 80 millions de mètres cubes par an. La mise en place des infrastructures adéquates pour assurer ce transfert et son stockage est indispensable pour optimiser cette ressource. » a-t-il précisé.
Nouha MAINSI