Par Slim BEN YOUSSEF
Il est des moments où l’histoire ne bondit pas – elle cède. Non sous le choc, mais sous le poids. Ce qui fléchit, ce n’est pas la volonté, c’est l’attente. L’attente d’un lendemain qui répare, apaise, ou simplement donne sens. Et dans ces moments, une vérité se fraie un chemin : ce qui est mort ne meurt pas – cela demeure, sous d’autres formes. Mais ce qui vit, lui, peut tout transformer.
La Tunisie ne manque ni de ressources ni d’idées. Elle manque de relais.
La jeunesse, elle, est prête. Elle n’attend ni faveur ni indulgence, mais qu’on lève les verrous : ceux des lois inertes, des procédures paresseuses, des institutions qui s’usent à se retenir. À qui lui passera le flambeau, elle promet l’endurance, l’audace et le sens du devoir. Elle ne demande pas un siège, mais un chantier. Une parole à tenir, un cap à maintenir, une charge à porter.
Il faut une vision, et il faut des lois. Mais surtout : il faut qu’elles s’accordent. Réformer les textes sans réformer les rouages, c’est entrouvrir des fenêtres dans une bâtisse murée. La réforme n’est pas un décor, elle est mouvement – articulation, friction, transformation. Réduire les procédures, délier les démarches, dégeler les projets en suspens : c’est là l’amorce d’un redressement discret, mais obstiné.
La Tunisie ne peut plus vivre à l’affût. Il lui faut choisir le rabattage : surgir, non plus à l’abri, mais à découvert. Passer du guet au geste, du gué à la traversée. C’est dans le champ du réalisable que naissent les possibles – à condition de s’y risquer, non à coups de promesses, mais à force de projets.
Le développement est affaire de méthode, de rythme et de dessein. Il repose sur trois piliers : l’éducation comme levier, l’investissement comme moteur, la justice sociale comme boussole. Là où l’on forme, là où l’on soutient, là où l’on redistribue – là se forge une prospérité qui dure. Une prospérité mesurée moins en chiffres qu’en ancrage, en dignité, en confiance.
Cela requiert une approche sobre, ambitieuse et cohérente. Une politique qui conjugue l’urgence et l’horizon, la croissance et le lien, la performance et le soin. Car ce travail est technique, oui – mais il est aussi stratégique, symbolique et, fondamentalement, politique.
Aujourd’hui, plus que jamais, il faut changer d’allure – non pour aller plus vite, mais pour aller mieux. Il ne s’agit pas d’inventer une échappée miraculeuse, mais de renouer avec une évidence tranquille : celle d’un pays qui croit en sa jeunesse et la fait grandir, non en discours, mais en actes.
La Tunisie peut. La Tunisie veut. La Tunisie commence.