Il ne s’agit ni de la première ni de la dernière mise en garde de la part du ministère de la Santé concernant l’usage d’un produit présenté, en ligne, comme un médicament. C’est la santé du citoyen qui est en jeu, mais de telles pratiques ne donnent pas l’air de cesser, bien au contraire. Il est grand temps de mettre en application des moyens plus costauds pour éviter de telles dérives qui mènent, dans beaucoup de cas, vers la mort…
La dernière alerte date de deux jours. Le ministère de la Santé vient de publier, hier mardi, un communiqué mettant en garde contre l’utilisation du produit commercialisé en ligne sous forme d’injection pour « faire fondre les graisses », notamment pour les femmes.
A ce propos, le ministère a confirmé que ce produit n’est pas autorisé pour l’injection, ni en Tunisie ni à l’international. Il n’a pas été enregistré auprès de l’Agence nationale du médicament, sa composition précise est inconnue et aucune étude scientifique fiable ne confirme son efficacité et, bien entendu, sa sécurité.
Le même communiqué met en garde contre les risques potentiels graves, et non des moindres, liés à l’utilisation de ce produit, notamment une inflammation grave, des lésions tissulaires, une occlusion vasculaire (caillots sanguins) et des dépôts graisseux sous-cutanés. Il a également averti les professionnels de santé que l’utilisation de ce produit constitue une infraction grave exposant son auteur à des sanctions pénales.
Le ministère a souligné que les injections cosmétiques ne doivent être pratiquées que par des médecins spécialisés et agréés, au sein d’établissements médicaux agréés. Il s’agit d’un conseil que nous croisons depuis de longues années mais qui, malheureusement, n’est pas pris, parfois, avec le sérieux qui s’impose. A travers ce communiqué, le ministère exhorte les citoyens à ne pas mettre leur santé en danger et à éviter toute injection en dehors des cliniques médicales, que ce soit dans des centres de beauté non agréés ou par des personnes non qualifiées.
Déjà, le 14 janvier 2025, le ministère de la Santé a publié un communiqué similaire concernant un produit commercialisé, découvert sur le marché de manière illégale. Ce produit, qui n’est ni un complément alimentaire ni un médicament autorisé, représente un grave danger pour la santé des consommateurs et est totalement non sécurisé pour une utilisation. Il présente, entre autre, des risques importants, notamment des troubles hormonaux qui peuvent se manifester par des irrégularités du cycle menstruel, des problèmes de fertilité et une croissance anormale de la pilosité. En outre, il provoque des effets physiques graves tels que la rétention d’eau, des gonflements et une prise de poids anormale. Les adolescents sont particulièrement vulnérables, avec des risques de ralentissement de la croissance, de fragilité osseuse et de troubles psychologiques.
Un phénomène qui prend de l’ampleur
Une telle présence de produits ou de « médicaments suspects » sur la Toile est en train de prendre de l’ampleur malgré les efforts des autorités compétentes.
D’ailleurs, la vente de tels produits en ligne suscitent en continu de vives réactions de la part des professionnels de la santé, notamment les pharmaciens. La vente incontrôlée de médicaments, de compléments alimentaires et de plantes médicinales en ligne constitue un risque sérieux pour la santé des citoyens tunisiens. Thouraya Naïfer, secrétaire général du Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens Tunisiens, s’est exprimée à ce propos il y a quelques semaines ». « Nous assistons à une véritable prolifération de produits vendus en ligne, souvent présentés comme des remèdes naturels miraculeux à toutes sortes de maux. Malheureusement, de nombreux vendeurs peu scrupuleux profitent de l’absence de réglementation pour commercialiser des produits contrefaits ou d’origine douteuse, promettant des remèdes miracles même pour des maladies graves ».
Certes, le ministère de la Santé a récemment annoncé un projet de loi visant à réglementer l’industrie des compléments alimentaires et des remèdes à base de plantes vendus en ligne. Cependant, Thouraya Naifer a souligné combien cette initiative a paradoxalement encouragé les ventes illégales sur le web, avec une augmentation des fraudes. « Il est essentiel que le ministère accélère le processus législatif et introduise des réglementations plus strictes pour garantir que ces produits soient sûrs et conformes aux normes de qualité. Il est urgent de lutter contre ce phénomène. Je dois également lancer un appel aux citoyens pour les inviter à se méfier des promesses miraculeuses et à toujours consulter un pharmacien avant d’acheter des suppléments ou des médicaments en ligne car seul un professionnel de santé peut fournir les informations nécessaires pour choisir le produit le plus adapté et éviter les risques sanitaires. La santé est un bien précieux qu’on ne peut pas risquer pour économiser quelques dinars » !
Absence de réaction
Pour sa part, Naoufel Amira, le président du syndicat des pharmaciens officinaux, a exprimé son inquiétude concernant la prolifération de la vente des médicaments et des produits pharmaceutiques d’origine inconnue sur les sites de vente en ligne ou sur les réseaux sociaux et hors des circuits de distribution contrôlés, appelant le ministère de la Santé et tous les ministères concernés à lutter contre ce fléau pour protéger la santé des citoyens. Il a, dans ce sens, assuré que la plupart de ces produits sont contrefaits, et qui pourraient donner de graves complications, pouvant, même, entraîner la mort.
Le président du syndicat des pharmaciens officinaux a, sur un autre volet, déploré l’absence totale de contrôle sur ces réseaux qui a permis le développement de ce secteur parallèle : « Plusieurs correspondances ont été envoyées pour les autorités de ces pratiques, mais aucune réponse n’est parvenue au syndicat jusqu’à ce jour », a-t-il ajouté.
Kamel ZAIEM