Encore une agression subie par un médecin en fonction dans un hôpital public et encore une grogne tout à fait compréhensible de la part de l’OTJM. L’incident a eu lieu à Sfax et il n’a pas manqué de susciter une indignation partagée par tous les citoyens et d’évoquer la manière d’assurer plus de sécurité dans nos hôpitaux.
Hier lundi, dans la cour de l’hôpital universitaire Habib Bourguiba de Sfax, les cris de colère et de grogne ont été présents toute la journée et il y avait de quoi. Des internes, des résidents, des étudiants en médecine et l’ensemble du personnel de santé publique de la région de Sfax se sont réunis pour manifester leur colère suite à l’agression d’un médecin résident du service d’orthopédie par un patient lors d’une séance de formation continue.
Le médecin agressé a subi un traumatisme crânien, nécessitant des examens médicaux urgents et son placement sous surveillance médicale au service de chirurgie. Fort heureusement, son état s’est amélioré et après une nuit passée à l’hôpital, il a pu rentrer chez lui.
Les protestataires ont exigé l’installation de caméras de surveillance ou la désignation d’agents de sécurité et de protection pour les médecins, ainsi que la poursuite de l’agresseur. Ils ont menacé de déclencher une grève si leurs revendications ne sont pas satisfaites.
Une grogne tout à fait justifiée
Il ne s’agit pas, évidemment, d’une première, tellement de tels incidents sont devenus monnaie courante dans nos hôpitaux, particulièrement les services des urgences. Et c’est ce qui a fait réagir, rigoureusement, l’Organisation tunisienne des jeunes médecins (OTJM) et son secrétaire général, qui a condamné cette attaque «barbare», dénonçant «le silence des autorités, leur mépris de l’incident et leur incapacité à y apporter une réponse à la hauteur de sa gravité».
Dans un communiqué publié dimanche 17 août 2025, l’organisation a annoncé le dépôt d’une plainte et affirmé qu’elle n’hésiterait pas à recourir à toutes les formes de protestation légale pour garantir la sécurité et la dignité du corps médical. Les jeunes médecins appellent la direction de l’hôpital à assumer l’entière responsabilité de la protection physique de ses agents, notamment par le renforcement permanent de la sécurité intérieure et la mise en place d’un encadrement juridique effectif au profit des résidents et internes.
L’organisation a également dénoncé le «silence inacceptable» des autorités hospitalières, soulignant que l’incident n’a pas été officiellement consigné et que les médecins ont été contraints de reprendre le travail dans des conditions jugées «humiliantes et dangereuses». Elle qualifie ce manquement de «mépris envers la sécurité du personnel médical», d’autant plus que, selon des témoins, l’agresseur a été vu en train de roder encore près des urgences après avoir commis son agression.
Il faut également préciser que l’agression de Sfax s’ajoute à une série d’incidents similaires dans les établissements publics tunisiens, dénoncés depuis des mois par les syndicats médicaux, dont celui des urgences de l’hôpital régional de Kasserine qui a vu les agresseurs attaquer le personnel et les équipements de l’hôpital.
Pour sa part, le ministère de la Santé, qui avait déjà condamné, justement, l’incident survenu fin juin à Kasserine, réaffirme son opposition à toute forme de violence dans les institutions sanitaires. Il assure travailler au renforcement de la sécurité dans les services des urgences et soutient les professionnels de la santé dans l’exercice de leurs fonctions, malgré les contraintes.
Pour de meilleures méthodes de sécurité
D’ailleurs, lors des négociations qui ont eu lieu avant les accords conclus le 3 juillet 2025 entre les jeunes médecins et le ministère de la Santé, les porteurs de blouses blanches ont clairement dénoncé leurs conditions de travail précaires, ainsi que l’absence d’un véritable service de sécurité pour protéger les médecins et tout le personnel des institutions de santé publique.
Il faut dire que la présence de simples agents de sécurité, des civils qui n’ont ni la capacité ni les moyens de neutraliser d’éventuels agresseurs n’arrange pas beaucoup les choses. Dans les CHU, au moins, une présence sécuritaire plus étoffée doit être assurée pour dissuader ceux qui pensent profiter d’une curieuse impunité suite à de tels dangereux actes.
D’ailleurs, dans d’autres incidents similaires, on a entendu parler d’arrestations et même de mandats d’arrêt à l’encontre d’agresseurs, mais on ne sait pas ce qui s’est passé par la suite et s’il y a eu des condamnations fermes qui vont de pair avec la gravité des délits commis. Et c’est ce sentiment d’impunité qui ne doit plus se faire ressentir car, avec tout ce qui se passe et les risques de voir de tels épisodes de violence se reproduire dans nos hôpitaux, il n’y a que la fermeté qui puisse arrêter cette hémorragie. La loi est bien là et elle est claire, il ne reste qu’à l’appliquer.
Kamel ZAIEM
