La diaspora tunisienne, véritable moteur économique à l’étranger, compte aujourd’hui 1 821 905 personnes, selon les données publiées en juin 2025 par l’Office des Tunisiens à l’étranger, dont 1 121 124 hommes et 700 781 femmes. Parmi eux, 664 238 sont actifs, 152 041 occupent des postes de cadre et 69 643 exercent des professions libérales.
Sur le plan éducatif, 260 815 élèves et 75 084 étudiants poursuivent leurs études à l’étranger, contribuant ainsi à renforcer le capital humain tunisien et à préparer la relève économique de demain.
Ces chiffres illustrent non seulement l’importance de la diaspora sur le plan économique, mais aussi son rôle stratégique dans le développement du capital humain du pays.
Au-delà du simple attachement culturel à leur pays d’origine, la diaspora s’impose désormais comme un acteur économique incontournable. Les Tunisiens établis à l’étranger participent activement au développement national à travers les transferts de fonds, les investissements, la création d’entreprises et le partage de compétences. Ces contributions financières et humaines dépassent largement le cadre du soutien ponctuel, elles constituent une source vitale de croissance, de stabilité et d’innovation pour l’économie nationale.
Et c’est ce que vient de rappeler le Président de la République, Kaïs Saïed, en juin dernier, lors de sa rencontre au palais de Carthage avec des Tunisiens résidant à l’étranger. Il a souligné le rôle déterminant des Tunisiens de l’étranger dans le soutien aux efforts de l’État dans tous les domaines, ainsi que la nécessité de simplifier les procédures afin de favoriser leur contribution active à la construction de l’économie nationale. Ainsi, le Chef de l’État a mis en avant l’importance de lever les obstacles administratifs pour renforcer le lien entre la diaspora et la patrie.
Dans cette même perspective, lors de sa visite au Royaume d’Arabie saoudite, le ministre des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, Mohamed Ali Nafti, a rappelé l’importance accordée aux Tunisiens de l’étranger dans les programmes d’action du ministère, sous l’impulsion et le suivi direct du Président de la République. «Le Président est toujours soucieux d’améliorer davantage leurs conditions de séjour dans les pays d’accueil, de défendre leurs intérêts, de développer le niveau des services consulaires qui leur sont rendus et de leur fournir l’accompagnement nécessaire afin de renforcer leurs liens avec la patrie», a-t-il précisé.
30% des réserves en devises et 6,5% du PIB
Dans ce contexte, le Gouverneur de la Banque centrale, Fethi Zouhair Nouri, a rappelé le rôle déterminant de cette communauté. «Économiquement, la diaspora constitue l’un des acteurs les plus essentiels. Elle représente un capital humain que nous cherchons à transformer en un actif financier», a-t-il affirmé.
Lors d’un atelier organisé en mai 2025 sur l’engagement de la diaspora dans la promotion de l’investissement et du développement durable, le Gouverneur a souligné que «la diaspora demeure l’une des principales sources de devises pour notre économie». En effet, les transferts effectués par les Tunisiens à l’étranger représentent environ 30% du stock de réserves en devises de la Banque centrale, soit près de 6,5% du PIB. «Grâce à ces ressources, nous avons pu honorer une partie de notre dette», a-t-il précisé, insistant sur l’importance stratégique de ces flux financiers.
Dans une analyse plus approfondie, Fethi Zouhair Nouri a également mis en lumière l’impact direct de cette communauté sur le tissu économique local. «Chaque visite d’un Tunisien résidant à l’étranger génère en moyenne 1 800 dinars de dépenses, illustrant la contribution immédiate et tangible de la diaspora à l’activité économique du pays», a-t-il souligné.
Cependant, malgré ces apports considérables, le potentiel de la diaspora reste encore sous-exploité. Le Gouverneur a exprimé certaines réserves : «En 2024, le transfert mensuel moyen par Tunisien à l’étranger s’élevait à seulement 120 dollars. De plus, ces transferts sont davantage orientés vers la consommation que vers l’investissement productif», a-t-il regretté, appelant à une meilleure valorisation de cette manne financière.
Simplification des procédures et meilleur accompagnement financier
Dans ce cadre, le gouvernement a mis en place un ensemble de mesures visant à faciliter les procédures pour les Tunisiens résidant à l’étranger. Parmi ces initiatives figure la possibilité d’ouvrir des comptes en dinars convertibles ou en devises étrangères, offrant ainsi une plus grande flexibilité dans la gestion de leurs ressources financières.
Le Conseil ministériel a également décidé d’accorder aux Tunisiens résidant à l’étranger les mêmes privilèges que ceux dont bénéficient les résidents en matière de change. Cette mesure leur permet notamment d’acheter et de vendre des biens immobiliers, des droits réels et des actifs commerciaux situés en Tunisie, de négocier des titres financiers et des parts sociales de sociétés tunisiennes, de conclure des contrats de crédit en dinar tunisien, d’ouvrir des comptes internes en dinar tunisien et de disposer librement de leurs revenus et biens situés en Tunisie. Ils peuvent également réaliser toutes les opérations connexes, telles que la conclusion de contrats hypothécaires.
En outre, ces mesures garantissent aux Tunisiens la liberté d’investir et la possibilité de transférer leurs revenus ou le produit de la vente ou de la liquidation de leurs investissements réalisés en Tunisie. Les Tunisiens qui transfèrent leur résidence principale depuis l’étranger vers la Tunisie sont exempts de l’obligation de déclarer et de rapatrier leurs revenus et gains, tout en pouvant ouvrir des comptes en devises ou en dinar convertibles, consolidant ainsi leur autonomie financière et leur capacité d’investissement.
Nouha MAINSI
