Les procédures administratives restent encore lourdes et complexes. Cela constitue de véritables obstacles pour les citoyens désireux de lancer des projets créateurs d’emplois et porteurs de développement économique. Cette bureaucratie excessive freine l’initiative et entretient une situation dont profitent certains lobbies, soucieux de préserver leurs privilèges. C’est dans ce sens que le Président de la République, Kaïs Saïed, a mis en garde, lors de sa récente rencontre au Palais de Carthage avec la Cheffe du gouvernement Sarra Zaâfrani Zenzri. Il a souligné que ceux qui s’emploient à «mettre les bâtons dans les roues», au service de ces lobbies, ne sauraient échapper à la reddition des comptes.
Il faut dire que plusieurs administrations publiques, ont gardé les anciennes pratiques et surtout les formalités compliquées qui ne servent en rien l’intérêt du citoyen. Ce sont des lourdeurs héritées d’un autre temps qui constituent des obstacles majeurs pour ceux qui souhaitent créer des projets, générer de l’emploi et contribuer au développement économique. Ce constat récurrent nourrit un climat de frustration et décourage les porteurs d’idées novatrices, déjà confrontés à un environnement socio-économique difficile. Dans de nombreux services publics, les anciennes pratiques bureaucratiques demeurent la règle. Car il y a une accumulation de formalités inutiles et des exigences documentaires excessives, ajoutant aux lenteurs dans le traitement des dossiers. Les agents qui sont dans les bureaux ou derrière les guichets de plusieurs services de l’administration publique agissent souvent d’une manière laconique, parfois presque comme des robots n’ayant ni le temps ni les moyens de procéder d’une manière plus sereine et plus accessible aux citoyens. A titre d’exemple, et parmi les cas vécus, quelqu’un est allé aux services municipaux pour faire légaliser sa signature, pour un contrat de location. On lui a demandé pour cela de produire des attestations de paiement des taxes foncières. Or il était locataire et c’est au propriétaire de le faire. Ce dernier a déjà signé le contrat et sa signature était légalisée. Ce qui veut dire qu’il avait produit l’attestation de paiement des taxes foncières en question. Mais l’agent ne voulait rien comprendre. «Vous n’avez qu’à aller la réclamer au propriétaire» lui a-t-il lancé, en le priant de laisser la place au suivant, car il y avait une énorme file de gens qui attendaient leur tour.
Défiance des citoyens et émergence de circuits parallèles
Voilà un dialogue de sourds qui prouve que des pratiques automatiques ne font que constituer des obstacles pour la bonne marche des services de l’administration publique. Ils ne servent ni l’intérêt général ni la crédibilité de l’administration. Au contraire, elles alimentent la défiance des citoyens et favorisent l’émergence de circuits parallèles où les passe-droits et les intercessions deviennent monnaie courante. Dès lors, derrière ces lenteurs et ces blocages, certains voient la main d’intérêts organisés qui tirent profit du blocage du système. Plus la machine administrative est complexe et opaque, plus elle offre des marges de manœuvre aux intermédiaires et aux lobbies pour contrôler les accès, monnayer les délais ou freiner certaines initiatives concurrentes à leurs intérêts. En effet, plusieurs agents et même des responsables administratifs, ont été auparavant épinglés dans des malversations à l’occasion d’opérations d’appels d’offres par exemple, qui sont pourtant réglementées de manière à garantir la transparence et à écarter tout favoritisme ou népotisme.
Des obstacles qui compliquent l’investissement
En outre, ces obstacles freinent la création de projets et compliquent l’investissement, au moment même où le pays a un besoin urgent de stimuler l’emploi et la croissance. Par ailleurs, la fragmentation multiplie les points de passage et ralentit le traitement des dossiers, avec des démarches qui deviennent coûteuses en temps et en argent. Ce qui pousse certains à recourir à des circuits parallèles ou à l’informel. Plus l’administration reste opaque, plus elle offre de la marge aux intermédiaires et aux réseaux d’influence.
Plusieurs pistes ont été évoquées par le gouvernement, la première étant la digitalisation des services publics, déjà amorcée mais encore incomplète. La généralisation des plateformes électroniques permettrait de réduire le contact direct entre l’usager et l’administration, limitant ainsi les délais et les risques de corruption. Il y a également la solution qui réside dans la simplification des procédures. Il est important de réduire le nombre de documents exigés et d’harmoniser les délais de réponse en créant des guichets uniques pour les investisseurs comme pour les citoyens. Ces réformes supposent une volonté politique constante, ainsi qu’un suivi rigoureux de leur application. Sans cela, les textes risquent de rester lettre morte et les pratiques anciennes de perdurer.
L’administration au service du citoyen
Car au-delà de la seule efficacité administrative, c’est la crédibilité de l’État et la confiance des citoyens qui se jouent. Une administration plus fluide et plus accessible permettrait non seulement de redonner espoir à ceux qui portent des projets, mais aussi de renforcer l’attractivité économique du pays. La simplification administrative ne relève donc pas d’une simple exigence technique. Elle constitue notamment, une véritable clé pour la relance et pour l’édification d’un nouveau modèle de développement. C’est dans ce sens que s’inscrit la vision du Président de la République, une voie qui doit être suivie par tous ceux qui considèrent que l’administration publique est, avant tout, au service du citoyen et qu’elle doit œuvrer, dans un élan patriotique, à l’essor économique et à l’intérêt du peuple.
Ahmed NEMLAGHI
