Par Slim BEN YOUSSEF
La mémoire tunisienne brûle comme une braise, vive et tenace. Elle a accueilli des résistants, enterré des martyrs, gardé des serments. En 1982, Tunis devint à la fois port d’exil et cible de guerre, refuge et champ de bataille. Yasser Arafat, Khalil Wazir, Salah Khalaf, Fakhri Omari, Hayel Abdel Hamid, Farouk Kaddoumi, Nabila Nimr, et tant d’autres figures du Fatah et de l’OLP, trouvèrent ici un asile et un horizon. Tunis fut alors terre d’accueil et d’exil, foyer ardent de la cause palestinienne.
Puis vinrent les agressions sionistes et les assassinats lâches : Hammam Chott, le 1er octobre 1985 ; Abou Jihad, le 12 avril 1988 ; Salah Khalaf, 14 janvier 1991. Plus tard, Mohamed Zouari à Sfax, le 15 décembre 2016. Une suite ouverte, plaie qui saigne encore.
Aujourd’hui, les mêmes ombres avancent. La flottille Soumoud, de passage à Sidi Bou Saïd, a été visée d’emblée : une agression préméditée, affirme notre ministère de l’Intérieur. Quoi qu’il en soit, il faut tenir ferme le récit : la précipitation brouille, l’enquête éclaire. Sous ce ciel obstiné, la Méditerranée devient à la fois mer et mémoire, espace d’exil et matrice de résistance.
La Tunisie persiste : contre la lassitude et contre les arrangements. Elle refuse de réduire la Palestine à un territoire rogné, à une capitale mutilée. Elle la défend entière, Al-Qods pour cœur battant. Elle soutient toutes les mouvances, toutes les factions, toutes les voix d’une cause indivisible. Elle écarte la politique du troc, les normalisations serviles, les marchés grimés en paix.
La fidélité s’éprouve dans les gestes, se reconnaît dans la durée. Pratique avant d’être discours, politique avant d’être posture, elle devient un langage que les peuples reconnaissent, même quand les palais de verre l’oublient. Et dans ce langage, la Tunisie garde sa voix singulière.
La Palestine vivra. Vie qui traverse les ruines, souffle qu’aucun génocide n’étouffe. Et dans cette vie tenace, la Tunisie persiste — par mémoire, par nécessité. Car une nation se mesure à ses fidélités autant qu’à ses frontières.
