Par Slim BEN YOUSSEF
La Tunisie avance. Elle marche au pas de l’Histoire, portée par l’irréversible et non par le fortuit. Ce mouvement n’admet ni halte ni retour. Il appelle des décisions entières, des lois franches, une jeunesse fidèle à la promesse de bâtir une patrie. Une patrie de liberté, de justice sociale, de dignité, de souveraineté.
Une demi-mesure est un compromis boiteux, un héritage toxique. C’est l’art de différer, la science de tronquer, la manie de bricoler. Le temps, lui, additionne, amplifie, transmue, condamne. Et l’hésitation enfante quatre fléaux : stagnation, crise, lassitude, dette — transmis de décennie en décennie.
L’histoire juge sans appel les réformes incomplètes. Économie ravaudée, école rafistolée, santé en sursis, transports sous perfusion, nature réduite au silence : autant d’emplâtres qui finissent par coûter plus cher que l’audace manquée. Le provisoire s’incruste, l’éphémère s’ossifie, et le transitoire devient loi.
Instituer une nation, c’est davantage que remplir des codes – promulguer des lois. Tracer un horizon, tendre une boussole, bâtir une confiance : Rousseau rappelait que le véritable législateur ne se borne pas à écrire des articles : il « institue le peuple ». Une politique claire motive, rassure, inspire. Trois qualités la rendent durable : vision, détermination, cohérence. Quatre vertus la rendent juste : équité, constance, fermeté, transparence.
Briser l’habitude des solutions bancales, c’est accepter la radicalité de l’action, la continuité de l’effort, la lucidité du temps. Gouverner, c’est trancher les problèmes, assumer les décisions, poser des fondations — non colmater des fissures.
Notre pays réclame aujourd’hui des lois fraîches, robustes et intrépides. Elles seules peuvent arrêter l’avalanche, cette mécanique où les fautes minuscules deviennent des désastres majeurs. Les volontés amputées fabriquent des dettes, les résolutions d’airain engendrent des richesses.
La Tunisie se tient à une croisée. La prudence bancale mène au marécage. La réforme fondatrice ouvre l’espérance. Et le temps, ce juge incorruptible des nations, murmure toujours la même loi : ce que l’on diffère se paie, ce que l’on tranche se transmet.
