Va-t-on, enfin, se débarrasser de cette effroyable bande de spéculateurs qui a longtemps sévi au niveau de l’approvisionnement des marchés et de la hausse des prix ? L’offensive ordonnée par le Président de la République ne peut que rassurer, en attendant de voir les marchés se stabiliser à tous les niveaux ?
Le ton a été donné il y a trois mois avec une rigoureuse mise en garde de la part du Président de la République. C’était le 29 mai lors d’une réunion où il a reçu le ministre de l’Intérieur et le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur chargé de la sécurité nationale. Le mot d’ordre a été donné pour accentuer la lutte contre les réseaux de spéculation.
C’est que la montée du fléau de spéculation ne permet plus qu’on croise les bras et qu’on attende ce qui va se passer sans réagir. Les citoyens, dont le pouvoir d’achat est déjà fragile, peinent chaque jour face à la rareté de certaines denrées alimentaires de base et la flambée des prix de bon nombre de produits de consommation au point que les ménages se retrouvent souvent pris entre plusieurs feux menaçant leur budget et leur vécu au quotidien.
S’agissant d’un phénomène qui touche le budget de tous les Tunisiens, les autorités ont, dès lors, multiplié les actions dans le but d’assurer la disponibilité des marchandises de première nécessité et d’en stabiliser les prix, ce qui n’était pas une promenade de santé pour les décideurs.
Toutefois, toutes ces actions n’ont pas suffi pour neutraliser cette armada de spéculateurs et leurs fidèles lieutenants dans les marchés de gros. Ce qui s’est passé durant les derniers mois est venu montrer que le remède ne peut être payant et efficace qu’en multipliant les descentes et les opérations de contrôle de manière plus marquante et plus audacieuse, quitte à mettre la main directement sur les barons de la spéculation.
Conscient et convaincu des effets réduits des méthodes utilisées jusque-là, le Président de la République a tenu à mettre l’accent sur l’impératif de délaisser les moyens habituels en matière de lutte contre le monopole et la spéculation, tout en optant pour une approche consistant en une action ininterrompue couvrant l’ensemble du territoire national.
Une grandiose opération s’impose
En effet, il n’est plus question de procéder par «à-coups» avec des opérations ponctuelles dites «campagnes» dans le sens où elles sont prévisibles et facilement contournables par les spéculateurs qui reprennent, juste après, leur manège frauduleux. Il faut passer la vitesse supérieure et frapper fort pour espérer gagner cette âpre bataille.
Il est vrai qu’avec ce qui se passe aux marchés de gros, ce qui se fait au niveau des prix et de la brusque «disparition» de certains produits pourtant en pleine période de production, la manière de s’y opposer manquait de force et de dissuasion.
Et c’est dans ce sens que le ministère de l’Intérieur a intensifié ses opérations à travers l’ensemble du territoire pour lutter contre les pratiques d’accaparement et de spéculation illégale qui touchent le secteur des fruits, légumes et autres produits de consommation courante.
Ces opérations, menées par les différentes unités relevant des corps de la Sûreté nationale et de la Garde nationale, ciblent en priorité les acteurs soupçonnés de manipulation des prix et de perturbation de l’approvisionnement. Selon le ministère, et c’est une réalité, ces pratiques ont entraîné une hausse artificielle des prix ces dernières semaines, mettant à rude épreuve le pouvoir d’achat des citoyens.
Les interventions ont concerné les marchés de gros et de détail dans toutes les régions du pays. Les intermédiaires les plus influents ont été arrêtés et des procès-verbaux judiciaires ont été rédigés à leur encontre, en coordination avec le ministère public.
Par cette campagne musclée, les autorités entendent rétablir l’ordre sur les marchés et protéger les consommateurs contre les dérives spéculatives qui alimentent l’inflation.
Ce qui vient de se produire ne peut que rassurer les citoyens, longtemps pris à la gorge par cette bande de spéculateurs que le président de l’Etat a qualifiés un jour, avec raison, de «réseaux criminels» qui nuisent aussi bien aux producteurs qu’aux citoyens consommateurs dans le sens où les agriculteurs vendent leurs produits à des prix dérisoires. La différence énorme entre le prix de vente et celui d’achat reflète, à elle seule, la gravité dudit crime qui ne peut rester indéfiniment impuni.
La délivrance !
Que peut-on attendre de ce coup de force ? Pour le ministère de l’Intérieur, ces opérations visent à combattre la spéculation dans le secteur des fruits et légumes, ainsi que dans le reste des produits de consommation et ce, conformément aux instructions du Président de la République : «Ces pratiques ont récemment conduit à une hausse artificielle des prix et à des perturbations dans l’approvisionnement », d’après ce département.
Peut-on, dès lors, se féliciter de voir les marchés libérés de ces barons de la spéculation ? D’après le ministère, «les principaux acteurs identifiés ont été arrêtés et des procès-verbaux judiciaires ont été établis à leur encontre en coordination avec le ministère public».
C’est dire que les prochains jours et semaines vont s’avérer décisifs dans cette rude bataille. Certes, il va y avoir une accalmie au niveau des prix et de la disponibilité des principaux produits, mais il va falloir attendre encore pour voir si cette offensive va porter ses fruits.
Ce qui est réconfortant, c’est que le Chef de l’Etat n’a pas hésité à user des grands remèdes et d’une main de fer pour éliminer ces spéculateurs. Il va juste falloir entretenir cette offensive et la consolider. Du côté de Carthage, l’essentiel a été décidé et fait. La balle est désormais dans le camp des chargés du contrôle qui ne doivent plus céder aucun pouce à ces «criminels» et à leurs serviteurs.
Kamel ZAIEM
