Depuis quelque temps, la société enregistre une montée inquiétante de la violence et de la délinquance chez les jeunes. Les faits divers rapportés par la presse, les tensions dans les établissements scolaires et les incivilités dans les espaces publics traduisent un malaise profond. Les bagarres, le harcèlement, les vols ou encore les agressions gratuites semblent devenir des comportements de plus en plus fréquents, alimentant l’inquiétude des familles, des enseignants et des institutions. Ce phénomène, qui n’est pas nouveau, prend aujourd’hui une ampleur particulière et soulève des questions sur ses origines et sur les réponses à y apporter.
La violence juvénile a toujours existé, mais ce qui interpelle désormais, c’est l’âge de plus en plus précoce du passage à l’acte et la banalisation des comportements agressifs.
De nombreux établissements scolaires témoignent de situations tendues où insultes, intimidations et coups ne sont plus exceptionnels. Dans certains quartiers, les jeunes trouvent dans la rue une forme d’identité, parfois marquée par l’affrontement et le rejet de l’autorité. La médiatisation et surtout la diffusion des vidéos sur les réseaux sociaux accentuent cette impression de recrudescence, en donnant à voir une violence qui devient spectacle et qui alimente un cercle vicieux.
Les causes profondes
Les causes de ce phénomène sont multiples. D’abord, les fractures sociales jouent un rôle central. Le chômage, la pauvreté et le manque de perspectives créent un sentiment d’injustice chez les jeunes qui se sentent exclus du système. Dans ce contexte, la délinquance peut apparaître comme un moyen d’exister ou de revendiquer une place. Le cadre familial constitue également un facteur déterminant. Lorsque la cellule familiale est fragilisée, que l’autorité parentale est affaiblie et que les repères manquent, l’adolescent est tenté de chercher ailleurs une reconnaissance, parfois auprès de groupes qui valorisent la transgression et la violence. Les pairs et les réseaux sociaux jouent aussi un rôle amplificateur. À l’adolescence, le besoin d’appartenance est particulièrement fort. Intégrer un groupe peut donner un sentiment de force, mais peut aussi encourager des comportements déviants, surtout lorsque la violence devient un signe de courage ou de réputation. Les réseaux sociaux accentuent ce phénomène en offrant une vitrine immédiate à ces actes. Les agressions filmées et partagées deviennent un moyen d’obtenir de la visibilité, au prix d’une banalisation inquiétante de la violence. À cela s’ajoute l’influence culturelle, avec des films, séries ou clips qui mettent souvent en avant la brutalité comme symbole de puissance.
Des conséquences préoccupantes
Les conséquences de cette recrudescence sont profondes. Elles nourrissent un climat d’insécurité qui pèse sur la vie quotidienne, aussi bien dans les quartiers que dans les établissements scolaires. Elles contribuent à stigmatiser une génération entière, perçue parfois comme irrespectueuse ou incontrôlable, ce qui accentue le fossé entre jeunes et adultes. Elles représentent aussi un coût important pour la société, que ce soit en termes de prise en charge judiciaire, de soins médicaux ou de programmes de réinsertion. Plus largement, elles fragilisent le tissu social et risquent de nourrir un cercle vicieux où l’exclusion mène à la délinquance et la délinquance à une exclusion encore plus forte.
Des solutions à construire
Face à ce défi, il est essentiel de penser des solutions qui dépassent la seule répression. Sanctionner les actes est nécessaire pour rappeler les limites et protéger la société, mais cela ne peut suffire. La prévention joue un rôle clé et doit commencer très tôt, dès l’enfance. L’école, les associations et les éducateurs doivent être soutenus dans leurs missions pour offrir un encadrement, un accompagnement scolaire et des perspectives d’avenir. La famille doit aussi être renforcée dans son rôle de première instance éducative, grâce à des programmes de soutien parental qui aident à rétablir la communication et l’autorité. Il est tout aussi important de proposer aux jeunes des alternatives positives. Les activités sportives, culturelles et artistiques permettent de canaliser leur énergie et de valoriser leurs talents. Les institutions publiques, les collectivités locales mais aussi le secteur privé doivent contribuer à créer des opportunités réelles d’insertion professionnelle et sociale. Enfin, les médias et les plateformes numériques ont une responsabilité particulière : limiter la mise en avant de contenus violents et valoriser les initiatives positives qui montrent une autre image de la jeunesse.
La recrudescence de la violence et de la délinquance auprès des jeunes ne doit pas être perçue comme une fatalité. Elle révèle certes des fractures profondes et des fragilités, mais elle peut aussi devenir un appel à repenser notre rapport à la jeunesse et à investir davantage dans son avenir. La société a tout à gagner à considérer les jeunes non pas comme une menace, mais comme une ressource précieuse. Redonner espoir, offrir des perspectives et renforcer les liens sociaux constituent les clés pour construire une société plus apaisée et plus inclusive.
Leila SELMI
