Chaque année scolaire, la question qui préoccupe le plus parents et élèves est le fait d’avoir des heures creuses dans l’emploi du temps scolaire. Où et comment l’élève passe-t-il ces heures en l’absence souvent d’une salle de permanence ou de révision dans la plupart des collèges et lycées ? Cette question est souvent soulevée au niveau ministériel dans le cadre du débat sur le temps scolaire dont la solution semble encore loin. En attendant, des directives sont données aux directeurs des collèges et lycées avant chaque rentrée scolaire en vue de limiter au maximum les heures creuses dans les emplois du temps des élèves qui, faute de salles de révision, se trouvent dans la rue exposés aux accidents et aux risques de racket et de violence.
Rares sont les élèves qui restent à l’intérieur de leur établissement pour la simple raison qu’il n’existe pas de salles de permanence ou de révision dans la plupart des collèges et lycées secondaires. Les clubs culturels ou sportifs n’existent presque plus et les bibliothèques scolaires ne motivent plus les élèves qui ont une aversion contre la lecture. Et pourtant, il s’est avéré, d’après les témoignages qu’on avait recueillis, que la plupart des élèves apprécient ces heures creuses, ayant besoin d’une pause pour se marrer en dehors des heures du cours.
Heures creuses inévitables ?
Les heures creuses qui figurent dans la plupart des emplois du temps des élèves, tous niveaux confondus, pourraient être le résultat d’une mauvaise distribution horaire effectuée par l’administration de l’établissement lors de l’élaboration des emplois du temps. C’est que les directeurs et les proviseurs sont souvent soumis à différentes contraintes administratives et pédagogiques (salles de classe insuffisantes, manque de personnel enseignant) qui les guident dans l’organisation des emplois du temps des élèves. Les cas sociaux ou humains sont également pris en considération, comme les enseignants âgés ou malades et les femmes enceintes. Toutes ces considérations font que les emplois du temps sont réalisés en vue de satisfaire dans la plupart du temps les vœux exprimés par les enseignants, ce qui pourrait influer sur l’emploi des élèves.
Dès lors, en voulant élaborer des emplois du temps acceptables et satisfaisants pour l’un ou l’autre enseignant, on risque souvent de chambarder l’emploi de certains élèves de telle sorte qu’il peut comporter une ou deux heures creuses par semaine. De plus, certains cours sont dispensés en groupes, ce qui oblige les élèves du premier groupe d’avoir un trou dans leur emploi du temps (allant de 1h à 2h) pendant que le deuxième groupe a cours, et inversement. Cela se passe dans plusieurs disciplines : sciences naturelles, sciences physiques, techniques, informatiques…
Ces heures creuses peuvent également provenir d’une dispense en sport : l’élève dispensé, au lieu de rester à l’école pendant les heures de sport, profite de cette pause pour sortir et Dieu seul sait où il va passer ces heures creuses ! Elles sont également dues à l’absence d’un ou deux professeurs à la fois, ce qui donne l’occasion aux élèves de déserter l’école pour quelques heures au lieu de les passer à l’étude en permanence ou à la bibliothèque scolaire. Ainsi, avec les heures creuses, quelle que soit leur origine, un élève peut totaliser jusqu’à quatre ou cinq heures vides dans son emploi du temps hebdomadaire.
Heures creuses : une récréation en sus
En vue de retenir les élèves pendant les heures libres au sein de leur établissement, le ministère de tutelle a en effet créé dans certains établissements des salles de permanence multifonctionnelles. D’abord, c’est un endroit sécurisant pour les élèves, qui comporte une bibliothèque, des ordinateurs connectés à Internet et tout le matériel nécessaire pour permettre aux enseignants, en dehors des heures du cours, d’organiser avec leurs élèves des projections de documents visuels ou des débats sur des questions relatives aux programmes officiels.
C’était avant la Révolution, mais rien n’a été réalisé depuis ! Une telle initiative contribuait pourtant à rattacher l’élève davantage à son école à l’heure où la majorité des élèves a perdu toute confiance en l’institution scolaire pour des raisons diverses (manque de motivation, retard de l’école par rapport aux nouvelles technologies, contraintes scolaires, tensions dans les relations parents/ élèves/ professeurs…) Cependant, même en présence de ces espaces, les élèves ne s’y intéressent pas vraiment. Ils préfèrent plutôt sortir pendant les heures creuses pour sentir quelques instants de liberté où ils peuvent vaquer à leurs loisirs : les uns (es) sortent pour fumer, les autres pour rencontrer des copains, certains vont casser la croûte dans une pâtisserie ou un restaurant à proximité et d’autres rentrent chez eux au cas où ils habiteraient non loin de l’établissement.
Certains établissements sont équipés de salles de permanence, mais elles restent vides toute la journée, avons-nous remarqué, mais si ces espaces sont désertés, n’est-ce pas là la responsabilité de l’administration qui semble trop permissive en laissant les élèves quitter l’école pendant les heures creuses ? Où sont donc les surveillants (es) qui sont censés garder les élèves pendant les heures creuses ou en cas d’absence d’un enseignant ? Et si jamais un élève, se trouvant en dehors de l’établissement pendant une heure creuse, était victime d’un accident de circulation ou d’un acte de violence, qui en assumera la responsabilité ? Les actes de violence perpétrés lors de ces heures creuses sont en effet très nombreux.
Dans tous les cas, il n’est pas normal de laisser un élève dans la rue pendant les heures creuses, livré à lui-même, sans contrôle parental ou scolaire, ce qui pourrait engendrer des problèmes énormes à l’élève lui-même et aux parents, ces parents qui croient que leur enfant est bel et bien à l’école pendant leur absence et non pas dans la rue. Pas mal d’enseignants et de parents interrogés sur ce sujet, souhaitent généraliser le système ancien des salles de permanence et de révision qui ont fait leurs preuves dans le passé en retenant obligatoirement les élèves pendant les heures creuses avec une discipline rigoureuse et un contrôle des présences. Les prochaines réformes à effectuer dans le système scolaire sauront-elles apporter les solutions adéquates à ce problème ?
Hechmi KHALLADI
