L’agriculture tunisienne est confrontée à d’importants défis appelant souvent des changements de nature structurelle : adaptation et lutte contre le changement climatique, transition écologique, souveraineté alimentaire. Ces défis nécessitent déjà, et nécessiteront plus encore demain, des financements considérables et adaptés.
L’activité agricole dépend des cycles biologiques et des aléas climatiques, qui influencent la production et in fine les prix sur les marchés. Une gestion prudente et diversifiée favorise la pérennité de l’exploitation, notamment car certaines activités ont des marges et une rentabilité faible.
Dans de nombreux cas, l’activité agricole nécessite un capital conséquent pour financer les infrastructures et les équipements (matériel agricole) et les achats liés au cycle de production (semences, engrais, aliments du bétail, etc.). Pour cela, des fonds propres ou des capitaux extérieurs peuvent être mobilisés, reposant souvent sur plusieurs sources, notamment des prêts bancaires (court, moyen et long termes) et des subventions publiques (nationales, européennes comme le FEADER) et locales. D’autres mécanismes incluent le financement participatif (crowdfunding) et les échanges entre particuliers. L’État joue également un rôle important par le biais de soutiens divers (aides à l’investissement, bonification des taux d’intérêt, prise en charge d’assurances).
Les nouveaux outils de financement innovants pour l’agriculture
Le paysage du financement agricole se transforme à grande vitesse, porté par des acteurs variés et des leviers innovants qui réinventent l’accès aux capitaux pour les porteurs de projets. Face aux besoins de financements et aux limites des outils classiques, de nouveaux dispositifs sont proposés aux agriculteurs. Ils permettent de renforcer les fonds propres des exploitations, de bénéficier de crédits, de diversifier et sécuriser le chiffre d’affaires. Divers outils innovants ont émergé pour le financement de l’activité agricole. Ils ont été favorisés par la désintermédiation, l’amélioration de la gestion du risque et l’intégration de critères extra-financiers dans les analyses des investisseurs. Ces outils sont complémentaires et ils répondent à différents besoins des exploitations. C’est dans ce cadre que plus de 40 représentants d’institutions publiques et privées issus des ministères de l’Agriculture, des Ressources Hydrauliques et de la Pêche, du Tourisme, ainsi que du secteur bancaire, de la microfinance et de l’assurance se sont réunis à l’occasion d’un atelier de restitution consacré à l’accès au financement de l’agriculture et du tourisme rural.
Cet événement a permis de présenter les résultats d’un diagnostic de l’offre et de la demande en matière de financement dans ces deux secteurs clés. Les échanges ont mis en évidence un écart entre les besoins spécifiques des bénéficiaires (agriculteurs, TPME rurales, porteurs de projets touristiques, etc.) et les produits financiers actuellement disponibles. Les discussions ont porté sur des recommandations pour concevoir de nouveaux services financiers adaptés aux besoins des bénéficiaires, afin de faciliter leur accès au financement et soutenir l’économie rurale. Cet évènement a également favorisé le dialogue avec les acteurs financiers, ouvrant la voie à de futurs partenariats pour une inclusion financière accrue. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du Projet Développement Economique Régional (DER) financé par le ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement
Entre la pression du changement climatique, la nécessité d’accélérer la transition écologique et l’impératif de rester compétitif face à la mondialisation, le secteur doit investir, innover et se réinventer. Mais voilà : les financements classiques, comme les prêts bancaires traditionnels, peinent à suivre le rythme. Les banques, de plus en plus frileuses, demandent des garanties solides et sélectionnent les projets au compte-gouttes. Résultat : beaucoup de jeunes porteurs de projets, même ultra-motivés, peinent à concrétiser leurs ambitions . Le besoin est pourtant colossal.
Les enjeux sont clairs : produire mieux, avec moins d’impact, tout en assurant la pérennité des exploitations et en attirant de nouveaux talents. C’est là que les nouveaux outils de financement entrent en scène ! Ils cassent les codes, ouvrent la porte à des investisseurs engagés, intègrent des critères environnementaux et sociaux, et surtout, ils s’adaptent aux réalités du terrain. Crédits à impact, fonds de dette, financement participatif… Ces solutions innovantes offrent une vraie rampe de lancement pour imaginer l’agriculture de demain.
Kamel Bouaouina
