Une vaste opération de nettoyage a récemment eu lieu à Mahdia dans le cadre de la campagne nationale de volontariat pour la protection du patrimoine historique et archéologique, une initiative lancée par l’Agence de mise en valeur du patrimoine et de développement culturel (AMVPPC) sous la supervision du ministère des Affaires culturelles. L’événement, mené en collaboration avec l’Institut national du patrimoine (INP), la municipalité de Mahdia, la délégation régionale et la direction régionale de l’éducation, a mobilisé un large éventail d’acteurs publics et privés unis par un même objectif : préserver la mémoire vivante de la Tunisie.
Sous la supervision de Tarek Abbouda, chef du bureau régional de l’Agence du patrimoine pour le Sahel, cette opération n’était pas un simple acte de nettoyage. Elle symbolisait un engagement citoyen concret et une prise de conscience collective autour de l’importance du patrimoine dans la construction de l’identité nationale. De nombreux bénévoles, issus de divers horizons, ont répondu à l’appel : associations culturelles et environnementales, enseignants, élèves, représentants de la société civile et institutions locales.
Parmi les structures participantes, on retrouve l’Association Asala pour le patrimoine et le tourisme culturel, l’Association Mémoire de la Méditerranée, le centre culturel privé Ciné Alpha et l’école Sidi El Kadidi. Ensemble, ces acteurs ont œuvré à la remise en valeur de plusieurs sites historiques de Mahdia, redonnant éclat et dignité à des lieux souvent négligés par le temps ou par le manque d’entretien.
Le patrimoine, miroir de notre identité
Chaque pierre nettoyée, chaque site restauré est une page de l’histoire nationale qui renaît. Mahdia, ancienne capitale fatimide, recèle des trésors archéologiques et historiques d’une valeur inestimable : ses remparts, ses mosquées, son port antique, ses monuments byzantins et fatimides témoignent de siècles de civilisation. Protéger ces vestiges, c’est préserver la mémoire collective et transmettre aux générations futures une part de leur identité. Mais cette initiative va bien au-delà du symbolisme patrimonial. Elle incarne une nouvelle approche de la citoyenneté, où la culture, l’environnement et le civisme se rencontrent. En unissant les efforts des institutions publiques et des citoyens, Mahdia a montré que le patrimoine n’est pas seulement l’affaire de l’État, mais un bien commun que chaque Tunisien a le devoir de défendre et de valoriser.
Un modèle à suivre pour les autres villes
Ce que Mahdia a réussi à mettre en place devrait inspirer toutes les villes tunisiennes, du nord au sud. Les sites archéologiques et historiques du pays — qu’il s’agisse de Carthage, Dougga, Kerkouane, El Jem, Kairouan, Tozeur ou Sbeïtla — souffrent souvent d’un manque d’entretien régulier et d’une absence de mobilisation locale. Pourtant, de simples actions de volontariat, comme le nettoyage, la signalisation ou la plantation d’espaces verts autour des monuments, peuvent transformer l’image d’une ville et renforcer son attractivité culturelle et touristique. Les municipalités, en coordination avec les délégations culturelles et éducatives, peuvent jouer un rôle moteur en institutionnalisant ces campagnes de volontariat, au moins une fois par trimestre. Cela permettrait de créer une habitude citoyenne, tout en sensibilisant les plus jeunes à l’importance de la préservation du patrimoine. Les écoles et universités pourraient, à leur tour, intégrer ces initiatives dans leurs programmes éducatifs, en alliant apprentissage et action sur le terrain.
Le volontariat comme moteur de développement culturel et touristique
Le patrimoine n’est pas seulement une mémoire, il est aussi une ressource économique et touristique majeure. Dans un pays où le tourisme culturel reste sous-exploité, préserver les monuments, les musées et les sites historiques représente un investissement durable. Les villes qui valorisent leur patrimoine attirent non seulement des visiteurs mais aussi des investisseurs, des chercheurs et des créateurs.
Mahdia, en donnant le ton, montre que le volontariat culturel et environnemental peut devenir une force de développement local. En associant les citoyens à la valorisation de leurs sites, on renforce le sentiment d’appartenance et de fierté locale. De plus, les actions de nettoyage et de restauration participent à l’amélioration de l’image des villes, un facteur clé pour relancer le tourisme intérieur et étranger.
La campagne nationale de volontariat, initiée par l’AMVPPC et le ministère des Affaires culturelles, ne doit pas rester ponctuelle. Elle doit se transformer en mouvement national permanent pour le patrimoine. Chaque ville possède ses trésors, parfois méconnus, souvent menacés. Il appartient à chacun de veiller à leur sauvegarde, non pas par contrainte, mais par conviction. La réussite de Mahdia illustre une vérité simple : la protection du patrimoine commence par un geste. Un sac de déchets ramassé, un mur restauré, un site nettoyé, c’est déjà une victoire contre l’oubli. En reproduisant ce modèle dans tout le pays, la Tunisie peut non seulement préserver son histoire, mais aussi bâtir un avenir fondé sur la mémoire, la responsabilité et la solidarité.
Leila SELMI
