Par Slim BEN YOUSSEF
Il arrive qu’un pays se regarde avec gravité, sans détour : c’est souvent ainsi qu’il retrouve son destin. Pour se juger ? Ou simplement pour se ressaisir, dans le calme de ceux qui cherchent à se rassembler. La Tunisie vit cet instant de lucidité et de recommencement. L’action publique cherche à renouer le fil de sa cohérence — cette ligne invisible qui relie les institutions, les décisions, les citoyens. L’État, avant d’être un appareil, demeure une conscience. Et cette conscience engage autant ceux qui gouvernent que ceux qui servent. Servir, c’est exercer la constance : celle d’un service public qui traite les dossiers comme on écoute des vies.
La cohérence, ici, est une question de respiration partagée. Elle naît d’une volonté commune de répondre à la vie digne du peuple. Les caisses sociales, la CNAM en particulier, portent ce défi. Rétablir leurs équilibres, c’est rendre au pays sa justice silencieuse. Dans le même esprit, le travail précaire appelle des formes nouvelles : encadrer le télétravail, penser le nomadisme numérique, inventer des protections pour un monde mouvant, des repères pour des vies dispersées. Le courage politique se mesure aussi à la capacité d’imaginer.
Mais la cohérence nationale dépasse l’économie, elle s’étend à la souveraineté. La Tunisie appartient au Sud global, par conviction et par destin. Autant par la géographie que par la conscience — fidèle à son histoire et ouverte à son avenir. Elle ne doit rien aux cercles d’influence qui confondent coopération et allégeance. L’État se tient debout lorsqu’il ne délègue ni sa pensée ni son autorité aux campagnes de désinformation. Gouverner, c’est préférer la décision au vacarme.
Tandis que Gabès respire sous la poussière de ses usines, une jeunesse obstinée y invente une écologie tunisienne. Dans ce combat, il y a l’avenir d’un pays entier — la preuve qu’une conscience, lente parfois, demeure inaltérable. De cette loyauté à la beauté du rivage naît une espérance.
La Tunisie restera jeune, sociable, créative. Chaque citoyen, où qu’il soit, porte la part d’État qu’il réclame. Albert Camus rappelait un jour que « le mépris des êtres humains est souvent la marque d’un cœur vulgaire ». À nous de faire battre le nôtre au rythme de l’humanisme, de la justice et de la République sociale.
