Le ministre des Transports, Rachid Amri, a annoncé devant le Parlement un vaste programme d’extension de l’aéroport international de Tunis-Carthage, estimé à trois milliards de dinars. Ce projet, qui comprend la création d’un métro aérien reliant l’aéroport à la capitale et vise à porter la capacité d’accueil à dix-huit millions de passagers par an, marque une étape décisive pour la Tunisie.
Il ne s’agit pas seulement d’un chantier d’infrastructure, mais d’un véritable enjeu national, car un aéroport, plus qu’un simple terminal, est souvent la première image qu’un pays offre au monde.
Chaque voyageur qui foule le sol tunisien à Tunis-Carthage s’y fait une idée immédiate du pays. C’est là que se forment les premières impressions, positives ou non, sur la qualité de l’accueil, l’organisation, la modernité et le confort. Malheureusement, l’aéroport souffre depuis plusieurs années d’une réputation ternie. Classé parmi les derniers au monde pour l’expérience passager, il est souvent décrit comme vétuste, mal entretenu et mal adapté à l’ampleur du trafic qu’il reçoit. Or, pour un pays dont l’économie repose en grande partie sur le tourisme, cette image de désuétude est un handicap majeur. La Tunisie ne peut se permettre que sa principale porte d’entrée reste figée dans le passé, alors que ses concurrents régionaux modernisent à grande vitesse leurs infrastructures.
Un moteur économique et social
L’aéroport de Tunis-Carthage est un poumon vital pour le pays. Il concentre à lui seul l’essentiel du trafic aérien tunisien et assure la connexion avec plus de soixante destinations à travers une vingtaine de compagnies. En 2024, plus de sept millions de passagers y ont transité, un chiffre appelé à croître dans les années à venir avec la reprise du tourisme, les échanges commerciaux et les mobilités de la diaspora. Cette montée en puissance rend urgente une extension qui permettrait d’éviter l’engorgement et de fluidifier les flux, tout en renforçant la sécurité, la logistique et le confort des voyageurs.
Mais au-delà de la performance technique, la rénovation de l’aéroport a une dimension économique et sociale majeure. Elle génèrera des milliers d’emplois directs et indirects, depuis la phase de construction jusqu’à l’exploitation des nouveaux espaces. Elle favorisera également le développement d’activités connexes — hôtellerie, restauration, maintenance, transport urbain — tout en donnant à la capitale un nouvel élan d’attractivité.
Une ambition tournée vers la modernité
Le projet présenté par Rachid Amri s’inscrit dans une vision plus large, celle d’une Tunisie moderne, connectée et résolument tournée vers l’avenir. L’idée d’un métro aérien reliant l’aéroport au centre de Tunis traduit cette volonté d’améliorer la mobilité et de rapprocher les visiteurs du cœur économique du pays. C’est une avancée majeure, car la connexion rapide entre un aéroport et une capitale est l’un des critères essentiels d’un hub moderne.
Cette modernisation devra toutefois s’accompagner d’un profond renouvellement des espaces et des services : signalétique claire, salles d’attente confortables, équipements technologiques performants, zones duty free attractives, contrôle de sécurité fluide. Autant d’éléments qui conditionnent l’expérience du voyageur et contribuent à donner une image positive du pays. L’aéroport doit redevenir un lieu d’accueil à la hauteur de la réputation hospitalière tunisienne.
Entre prestige et responsabilité
Investir trois milliards de dinars dans une telle infrastructure n’est pas anodin. Ce montant impose rigueur, transparence et efficacité. Le choix d’un contrat clé en main avec négociation directe, annoncé par le ministre, devra s’accompagner de garanties de bonne gouvernance et de contrôle public. Il s’agit d’un chantier d’intérêt national qui engage l’image et les finances du pays sur plusieurs décennies. La rénovation ne doit pas seulement viser à agrandir les terminaux, mais à repenser entièrement la philosophie de l’accueil. Dans un monde où les voyageurs comparent tout, la Tunisie a besoin d’un aéroport qui reflète sa vitalité, son authenticité et sa volonté d’ouverture. Un espace moderne, durable et à dimension humaine, respectueux de l’environnement et intégré à son territoire.
La porte du monde
L’aéroport de Tunis-Carthage n’est pas qu’un point de départ ou d’arrivée : il est une métaphore du pays lui-même. C’est la scène où s’écrivent les retrouvailles, les adieux, les premiers voyages et les retours au pays. Il incarne la Tunisie cosmopolite, ouverte sur la Méditerranée et sur le monde. Sa modernisation est donc bien plus qu’un impératif technique : c’est un acte symbolique de confiance dans l’avenir.
Faire de Tunis-Carthage un aéroport digne de son nom, c’est offrir à chaque voyageur — touriste, investisseur, expatrié ou simple citoyen — l’image d’un pays qui avance. C’est montrer que la Tunisie croit en son potentiel, en son hospitalité et en sa capacité à se hisser au rang des grandes plateformes régionales.
Un aéroport rénové, fluide et accueillant ne sera pas seulement une infrastructure : il sera le reflet d’une nation qui se réinvente et choisit de regarder vers le ciel.
Leila SELMI
