La Tunisie s’impose depuis plusieurs années comme l’un des pôles les plus dynamiques du monde arabe et africain en matière de médecine esthétique. Longtemps reconnue pour la qualité de sa chirurgie esthétique, elle vit aujourd’hui un nouvel élan porté par l’esthétique non invasive, un secteur qui attire non seulement les professionnels de la beauté et de la santé, mais aussi un public de plus en plus large, tunisien et étranger.
L’ouverture, ce lundi à Hammamet, du Sommet tunisien de la formation et de l’entrepreneuriat dans le secteur de l’esthétique non invasive confirme cette évolution profonde d’un marché en pleine structuration.
Depuis une dizaine d’années, le recours à la médecine esthétique connaît une progression remarquable en Tunisie. Les traitements injectables, les soins au laser, le remodelage du visage, les techniques de rajeunissement cutané, la cryolipolyse, les ultrasons focalisés ou encore les technologies radiofréquence figurent désormais parmi les demandes les plus courantes. Cette montée en popularité résulte de plusieurs facteurs : démocratisation des soins, évolution des standards de beauté, influence des réseaux sociaux, volonté de prévenir plutôt que de corriger et surtout, amélioration constante des technologies disponibles dans les instituts. Les patients tunisiens, désormais mieux informés, recherchent des solutions naturelles, progressives, sans éviction sociale et surtout, plus accessibles. Les cliniques et centres esthétiques ont dû s’adapter en investissant dans des équipements de dernière génération, tout en renforçant la formation de leurs équipes. Cette évolution contribue à rendre la Tunisie compétitive par rapport à ses voisins, tout en attirant une clientèle internationale en quête de soins de qualité à des tarifs raisonnables.
Le Sommet de Hammamet : un tournant professionnel
La tenue du Sommet tunisien de la formation et de l’entrepreneuriat dans l’esthétique non invasive, organisé en partenariat entre l’Union tunisienne des artisans et des petites et moyennes entreprises et l’American Board, symbolise cette dynamique. Pendant quatre jours, près de 150 spécialistes venus de plusieurs pays arabes et européens participent à des ateliers, masterclasses, conférences et certifications. Pour Mahdi Barbouch, président de l’Union, cette rencontre représente plus qu’un événement professionnel, «une plateforme essentielle pour renforcer les compétences des participants dans la création et la gestion de projets, ainsi que dans l’acquisition de compétences professionnelles recherchées sur les marchés tunisien et international».
Cette orientation confirme une volonté nationale de pousser ce secteur vers une plus grande structuration, une professionnalisation accrue et l’intégration de standards internationaux. La collaboration avec l’American Board constitue un atout majeur : elle permet aux participants d’obtenir des certifications reconnues dans plus de 136 pays. Un avantage déterminant qui ouvre la porte aux marchés du Golfe, d’Europe et d’Amérique du Nord, des régions où les normes de qualité et de sécurité sont particulièrement élevées.
Un secteur créateur d’emplois et d’opportunités
L’essor de la médecine esthétique non invasive ne profite pas seulement aux praticiens, il génère aussi de nombreuses opportunités économiques. Le marché s’étend aujourd’hui aux fabricants et distributeurs d’appareils, aux laboratoires de cosmétiques, aux spécialistes en gestion de centres esthétiques, ainsi qu’aux formateurs et experts internationaux.
De plus en plus de jeunes, notamment des femmes, se tournent vers les métiers de l’esthétique : techniciens lasers, praticiens en soins non invasifs, conseillers en beauté médicale, gestionnaires de centres, etc. Ces professions, qui nécessitent des compétences techniques pointues et une formation continue, ouvrent la voie à une insertion professionnelle rapide. Elles sont également compatibles avec l’auto-entrepreneuriat, un modèle très apprécié par les jeunes générations. Le tourisme médical, déjà bien ancré en Tunisie, bénéficie lui aussi de cette expansion. Les patients venus d’Europe, d’Algérie ou de Libye combinent désormais chirurgie, soins esthétiques légers et séjours bien-être, renforçant ainsi l’attractivité du pays.
Des défis à relever pour consolider le secteur
Malgré ses progrès, le marché tunisien de la médecine esthétique doit encore affronter plusieurs défis majeurs. Le premier concerne la régulation. L’absence d’un cadre strict et uniformisé ouvre parfois la porte à des pratiques non conformes, à des formations improvisées ou à l’utilisation d’appareils non certifiés. Les professionnels réclament une réglementation claire permettant de protéger les patients, d’assurer la qualité des prestations et d’éviter la concurrence déloyale. Le deuxième défi touche à la formation continue. Les technologies évoluent rapidement, exigeant une mise à jour permanente des compétences. À ce titre, le Sommet de Hammamet marque une étape importante, mais de nombreux experts estiment que des programmes nationaux structurés doivent être mis en place pour accompagner durablement le secteur. Enfin, il demeure indispensable de sensibiliser le public. Beaucoup de patients confondent encore soins esthétiques, médecine esthétique et interventions médicales, ce qui peut les exposer à des risques lorsqu’ils se tournent vers des prestataires non qualifiés.
Grâce à son expertise reconnue, à son positionnement géographique et à la montée en gamme de ses infrastructures, la Tunisie est en bonne voie pour devenir une référence régionale dans l’esthétique non invasive. L’organisation d’événements internationaux, les partenariats académiques, l’engouement des jeunes professionnels et la demande croissante de la clientèle locale et étrangère donnent au secteur une dynamique sans précédent. Si les efforts de régulation et de formation se poursuivent, la Tunisie pourra consolider durablement sa place sur la carte mondiale de la médecine esthétique, un secteur où innovation, sécurité et qualité sont désormais les maîtres-mots.
Leila SELMI
