Par Slim BEN YOUSSEF
La Tunisie sort d’une Coupe arabe comme on sort d’un vestibule : sans illusion tapageuse, mais avec quelques vérités en poche. Rien d’éblouissant peut-être, rien d’effondré non plus. Juste une équipe qui ne promet plus à la légère, qui avance sans fanfare, qui cherche son souffle plus que son éclat. Quelques repères, des automatismes balbutiants, des failles aussi — salutaires, parce qu’elles empêchent l’orgueil de précéder le jeu. On y a vu ce qu’il reste à construire, ce qu’il faudra corriger, ce qu’il faudra durcir. Rien de définitif. Tout d’exigeant.
On sort aussi d’un football arabe chargé d’affects et de symboles, où le jeu déborde souvent le terrain et où la politique rôde parfois jusqu’au coup de sifflet final. Dans ce décor, la Palestine a surgi comme une fraternité debout, s’invitant au deuxième tour avec la force grave de ceux qui portent une cause dans les jambes et le regard : la résistance d’un peuple en quête de liberté. Il y a eu aussi l’amertume du « biscotto », ce nul de circonstance entre Palestiniens et Syriens, qui a fermé la porte à la Tunisie malgré une victoire pleine et souveraine contre le pays hôte, le Qatar.
Une sortie sans déshonneur, mais non sans leçon. Et déjà, à l’horizon, la Coupe d’Afrique se dresse, vaste, rugueuse, sans indulgence. La sélection tunisienne d’aujourd’hui échappe aux ivresses faciles comme aux désastres annoncés. Elle apprend, elle tâtonne, elle se construit dans l’effort. Une équipe de travail plus que de légende — et peut-être est-ce là sa première vérité.
Face à cette équipe en devenir, il y a le peuple. Ce public tunisien qu’on dit parfois dur, toujours passionné, jamais absent. Il râle, il s’emporte, il soupçonne, il s’enflamme — puis la joie le reprend, comme une vieille habitude du cœur. Il ne pardonne pas l’imposture, mais s’incline devant l’effort, la grinta. Il ne demande pas des stars, il exige du courage. Et peut-être est-ce là, au fond, la plus belle des exigences.
En Coupe d’Afrique, les réputations comptent peu. Seuls pèsent les nerfs, la fatigue domptée, la peur tenue, le collectif quand l’air vient à manquer. L’Afrique ne récompense pas les promesses : elle reconnaît les équipes adultes.
Alors non, pas d’emballement, pas de présage noir. Il faut entrer dans cette CAN d’un pas droit, avec une vérité simple : les triomphes viendront peut-être — peut-être pas. Les combats, eux, commencent maintenant. Et pour un peuple qui vit de lutte autant que d’espérance, c’est déjà beaucoup.
