L’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a adopté, avant-hier en début de soirée, le projet de loi n° 023-2023 relatif à des dispositions exceptionnelles pour le recrutement des diplômés de l’enseignement supérieur en situation de chômage de longue durée dans le secteur public et la fonction publique, par 92 voix pour, 4 abstentions et une voix contre.
Le texte présenté par le bloc «Pour que le peuple triomphe» prévoit le recrutement de façon exceptionnelle des diplômés du supérieur en situation de chômage prolongé dans le secteur public (entreprises publiques, offices et autres établissements publics) et dans la fonction publique.
Les critères de priorité retenus sont l’âge (plus de 40 ans), l’ancienneté du diplôme (plus de 10 ans), la situation familiale (un seul bénéficiaire par famille sans prendre en considération le critère de l’âge) et la situation sociale (priorité aux personnes appartenant aux couches sociales vulnérables et aux personnes handicapées).
Le texte prévoit la création d’une plateforme numérique pour enregistrer les candidatures et classer les dossiers selon les critères définis. Les données des personnes inscrites sur cette plateforme seront mises à jour une fois par an.
Les candidats doivent être inscrits dans les bureaux de l’emploi, ne pas avoir bénéficié de régularisation professionnelle antérieure, ne pas être affiliés à un régime de retraite prévoyance sociale sans interruption, ne pas avoir disposé d’un identifiant fiscal durant l’année précédant l’inscription sur la plateforme, et ne pas avoir contracté un prêt bancaire de plus de 40 000 dinars auprès des établissements financiers et bancaires accordant des crédits.
Les candidats retenus devraient être recrutés par tranches successives sur une période ne dépassant pas les trois ans, à compter de la promulgation de la loi pour combler les postes vacants dans le secteur public et la fonction publique, tout en veillant à assurer l’équilibre entre les différentes spécialités lors du recrutement.
Le chômage touche 24% des diplômés de l’enseignement supérieur
L’application de la loi fait suite à la promulgation de la loi par le Président de la République et la publication d’un arrêté ministériel ad hoc. L’ARP avait déjà adopté fin novembre dernier un article de la loi de Finances 2026 (l’article 57) consacré au programme de recrutement direct des diplômés de l’enseignement supérieur en situation de chômage de longue durée. Cet article adopté par 126 voix pour, aucune voix contre et deux abstentions, prévoit l’affectation de crédits budgétaires pour le recrutement d’une première tranche d’environ 3000 diplômés chômeurs.
Les diplômés en situation de chômage prolongé ont multiplié ces derniers mois les rassemblements de protestation devant le siège de l’ARP pour dénoncer l’injustice qu’ils subissent depuis de longues années, sous le regard complice des différents gouvernements qui se sont succédé depuis la révolution de janvier 2011. Le nombre exact de ces diplômés chômeurs reste inconnu, les statistiques officielles ne classant pas les chômeurs selon la durée de leur chômage. Le recensement général de la population et de l’habitat 2024, qui a été rendu public en septembre dernier, a révélé que les diplômés de l’enseignement supérieur constituent 16,8% du nombre total des chômeurs. Les données de l’Institut national de la statistique (INS) montrent également que le chômage des diplômés atteint 24% au deuxième trimestre 2025, contre 23,5% au premier trimestre de la même année.
En juillet 2020, le Parlement avait déjà voté un article additionnel dans le projet de loi de Finances pour l’année 2021, prévoyant des dotations budgétaires pour le recrutement de 10 000 diplômés chômeurs dont la période de chômage dépasse dix ans. Cette mesure s’inscrivait dans le cadre de la loi n° 38 de 2020 portant sur des dispositions exceptionnelles pour le recrutement dans le secteur public au profit de cette catégorie de chômeurs. Le 16 août 2020, le Président de la République, Kaïs Saïed, a promulgué le texte, qui a été publié dans le Journal officiel. Sa mise en œuvre était cependant conditionnée par la publication de décrets d’application, chose qui n’a jamais eu lieu.
Walid KHEFIFI
