Bon nombre de Tunisiens se préparent pour les fêtes de fin d’année en combinant traditions locales et influences mondiales, avec un engouement croissant pour le Nouvel An et Noël, notamment dans les lieux touristiques où l’on observe des dîners spéciaux, des décorations festives (guirlandes, paillettes), des spectacles musicaux et des veillées jusqu’à l’aube.
Il est admis que les festivités organisées par les Tunisiens pour célébrer ces deux fêtes sont un mélange d’ambiance festive occidentale et de traditions locales, avec un accent particulier sur le partage familial et la convivialité, que ce soit au foyer ou dans un hôtel ou un restaurant. Cependant, si Noël est moins célébré en Tunisie, le Nouvel An reste un moment fort.
Même si Noël reste une fête principalement célébrée par les chrétiens et les touristes, le Nouvel An est un événement plus largement partagé, avec des dîners copieux, des soirées animées (musique, DJ) et des rassemblements familiaux. D’ores et déjà, les grandes surfaces ont exposé leurs fournitures au public (arbres de Noël avec toutes les décorations et tous les accessoires, costumes du père Noël, guirlandes, cadeaux…). Les boutiques et les magasins ont décoré leurs devantures en souhaitant à leurs clients «Bonne et heureuse année 2026». Les hôtels proposent déjà leurs offres, moyennant des affiches murales, des panneaux publicitaires ou sur les réseaux sociaux.
Pratiques contrastées et regards croisés
Pour la majorité des Tunisiens, les 24 et 25 décembre sont des journées normales, souvent elles passent inaperçues, sauf pour les chrétiens ou les touristes qui viennent passer leur séjour de fin d’année en Tunisie. Mais le Réveillon est célébré presque chez toutes les familles, chacune selon ses moyens : celles qui n’ont pas la possibilité de passer la soirée dans un hôtel ou un restaurant, elles la passent en famille, au foyer. Comme partout, on ne célèbre pas le passage à la nouvelle année de la même façon.
Dans certaines familles, ce sont surtout les croyances religieuses qui empêchent la célébration de ces fêtes de fin d’année, prétextant que ce sont des fêtes étrangères qui n’ont aucun rapport avec notre religion ni avec nos traditions. Pour certains, il n’y a que deux fêtes à célébrer, l’Aïd El Fitr et l’Aïd Al Adha. On croit donc que de telles pratiques sont interdites par la religion musulmane.
D’autre part, bien que Noël et le Réveillon ne soient pas fêtés chez les familles traditionnelles, pour d’autres familles, citadines surtout et plus ouvertes sur l’Occident, le passage à la nouvelle année (Réveillon du 31 décembre) est parfois célébré en pompe, tel un moment de rassemblement, de fête et de partage, sans pour autant qu’il y ait une déconnexion de ses origines ou une rupture avec ses traditions. C’est ainsi donc que les uns célèbrent ces fêtes par conviction, les autres par imitation. Les attitudes des gens chez nous sont donc divergentes vis-à-vis de ces fêtes.
Imitation ou ouverture sur l’autre ?
Ces deux fêtes, dites occidentales, auxquelles s’ajoute la Saint-Valentin, prennent pourtant de plus en plus d’ampleur chez nous. C’est l’occasion pour les jeunes de sortir, de s’éclater et les familles de se regrouper. C’est aussi l’occasion d’échanger les vœux de joie, de bonheur et de bonne santé. A ces occasions, il faut voir l’infinité des messages échangés entre les amis (es) et les familles et les voisins via le portable ou sur les réseaux sociaux.
Sous cet angle, certaines gens considèrent la célébration de ces fêtes, qualifiées d’intruses dans nos traditions, comme une ouverture sur l’Occident et une sorte de tolérance envers l’autre. Certains vous diront que du moment que ces fêtes étrangères sont synonymes de joie, de bonheur et de plaisir, pourquoi ne pas en profiter, surtout dans un contexte de crises socioéconomiques qui sévissent dans le monde, où l’individu a besoin de certains moments d’oubli, de défoulement ? Et surtout pourquoi ne pas donner un peu de joie et de gaité en arrivant au bout d’une année qui a été plutôt morose ?
Les gens cultivés et instruits ne voient aucun inconvénient dans la célébration de ces fêtes chez nous d’après ce témoignage d’un professeur d’université : « Célébrer les fêtes étrangères est une puissante ouverture sur l’autre, car cela permet de découvrir d’autres cultures, de développer l’empathie, d’élargir sa vision du monde et de tisser des liens interculturels en explorant de nouvelles traditions, saveurs et coutumes, transformant la curiosité en compréhension et respect mutuel. Cela montre que le monde est vaste et diversifié, rompant avec une vision ethnocentrique et promouvant l’acceptation de la pluralité. »
Hechmi KHALLADI