A l’occasion de la participation de l’Italie en tant qu’invité d’honneur de la 38ème édition de la Foire internationale du livre de Tunis qui se déroule du 19 au 28 avril 2024, le ministre italien de la Culture, Gennaro Sangiuliano, a effectué une importante visite dans notre pays durant laquelle il a été reçu par le président Kaïs Saïed au Palais de Carthage. Le ministre italien de la Culture a accordé dans ce cadre cette interview dans laquelle il adresse des messages d’amitié, de confiance et de collaboration à la Tunisie
La culture italienne est caractérisée depuis toujours par une multitude d’expressions : peinture, sculpture, architecture, théâtre, musique, danse, art et littérature, cinéma. Où se place aujourd’hui, sur la scène mondiale, l’édition italienne et le monde de la littérature italienne ?
L’Italie telle que nous la connaissons aujourd’hui est le produit d’une stratification culturelle qui a duré plus de deux millénaires et à laquelle ont contribué diverses civilisations, dont la civilisation arabe, qui a eu une grande influence, en particulier dans le Sud. La culture italienne reflète ce fait historique et se caractérise par sa polyvalence, sa pluralité et son ouverture sur le monde. Notre littérature, si l’on pense à des classiques comme Dante ou Machiavel et, au XXe siècle, à D’Annunzio, Marinetti, Moravia, Calvino et Eco, a toujours eu un élan et une vision internationaux. Aujourd’hui, nous vivons une période de grande créativité littéraire avec des auteurs tels que Elena Ferrante, Andrea Camilleri, Giuliano Da Empoli et Maurizio Serra, qui ont remporté d’importants prix à l’étranger.
À leurs côtés, on trouve des intellectuels, des journalistes et des essayistes capables de donner des interprétations éminentes et originales des événements mondiaux. C’est le cas de Marcello Veneziani, qui est intervenu à la Foire du livre de Tunis, dont l’Italie est l’invitée d’honneur. Cette vitalité se reflète dans l’internationalisation de notre industrie éditoriale : l’année dernière, nos maisons d’édition ont vendu deux fois plus de titres à l’étranger qu’en 2010.
Les liens étroits de traditions, d’histoire et de culture entre l’Italie et la Tunisie, ont toujours amené à une collaboration fructueuse dans plusieurs domaines : dans le domaine de la coopération culturelle, quels sont les projets et les contextes les plus importants entre l’Italie et la Tunisie ?
L’Italie et la Tunisie sont liées par plus de 2 800 ans d’histoire commune. Énée, géniteur de la gens Julia, selon l’écrivain latin Virgile, s’est arrêté à Carthage avant de fonder Rome et de donner naissance à ce qui allait devenir l’Empire romain. Depuis lors, nos civilisations se sont rencontrées, heurtées, comparées et enrichies. Il en est résulté une extraordinaire contamination qui est à la base de la collaboration culturelle d’aujourd’hui. Le gouvernement italien, dirigé par la Première Ministre Giorgia Meloni, entend la renforcer parce que les deux États entretiennent d’excellentes relations et nous pensons que la culture peut être un extraordinaire moteur de développement économique et social pour la Tunisie comme pour l’Italie.
Le pilier central de notre coopération est la promotion de l’extraordinaire patrimoine archéologique que possèdent les deux nations.
Lors de ma visite à Tunis, un accord a été conclu pour un jumelage entre le Colisée et l’Amphithéâtre d’El Jem, grâce auquel des activités conjointes de restauration et de valorisation de cet extraordinaire monument tunisien seront menées. Nous travaillerons avec le Ministère tunisien de la culture à des interventions sur d’autres sites archéologiques importants de votre merveilleux pays, qui peut devenir une destination pour le tourisme international. Mais nous voulons aussi nous consacrer aux jeunes, à la créativité contemporaine, au développement des industries culturelles.
Je pense par exemple au cinéma, dans lequel la Tunisie a de nombreux talents, que l’Italie peut soutenir en finançant la production de films et leur participation à nos festivals.
Mais aussi à l’art, à la musique, au théâtre. Je suis convaincu que cette collaboration donnera lieu à une nouvelle ère de dialogue culturel entre les deux nations et à des opportunités pour les jeunes tunisiens.
Quels sont les grands événements dédiés à la littérature italienne et le monde du livre et de la lecture ?
L’événement central de la scène littéraire italienne est sans aucun doute la Foire internationale du livre de Turin, qui se tient du 9 au 13 mai. C’est la foire qui réunit tous les éditeurs et les auteurs de notre littérature et qui accueille des écrivains et des éditeurs du monde entier.
Mais l’Italie compte de nombreuses manifestations littéraires dans tout le pays. Les principaux prix littéraires sont le Campiello et le Viareggio, mais il existe des centaines d’autres prix, principalement liés à la relation entre les auteurs du passé et le territoire dans lequel ils ont vécu.
La liste est très longue et donne une idée de l’importance de la littérature dans la définition de l’identité nationale italienne. Il ne faut jamais oublier, en effet, que si l’unification politique de l’Italie date de 1861, l’identité nationale était déjà définie depuis des siècles, à l’origine comme une dimension linguistique et littéraire. Dante, Pétrarque, Machiavel, Vico, Arioste, Tasso, Foscolo, Leopardi et Manzoni sont parmi les plus grandes expressions de cette littérature italienne qui exprimait le sentiment national avant même l’existence de l’État italien unifié.