La question de la migration clandestine notamment par les subsahariens, ne cesse de susciter les réactions les plus diverses de la part des membres de la société civile, d’aucuns faisant part de leurs inquiétudes, et de leur perplexité, d’autres en dramatisant allant jusqu’à parler d’invasion et de colonisation, dont sont responsables certaines parties accusées de vouloir déstabiliser le pays. S’il est vrai que le phénomène de la migration clandestine n’est pas propre à la Tunisie, il n’en reste pas moins que les troubles qu’il y a eu dernièrement notamment dans la région d’El Amra à Sfax incitent à réfléchir de plus près sur les tenants et les aboutissants de ce phénomène et surtout sur les dérapages et les troubles qui n’ont cessé de croître.
Selon la député Fatma Mseddi « la migration des subsahariens a en réalité commencé en 2011, lorsque l’ancien président provisoire de la République, Moncef Marzouki, a supprimé le visa concernant 44 pays africains ». Ce qui reste à vérifier car la décision de Marzouki n’a pas été promulguée en tant que décret-loi. La députée a ajouté que « Feu Béji Caïd Essebsi, sur les pas de Marzouki, a signé un accord avec le Haut-Commissariat pour les réfugiés. C’est celui-ci qui a pris le relais à la place de l’Etat, afin de délivrer des visas pour les subsahariens. Dès lors, certains membres du mouvement Ennahdha se sont infiltrés dans le Haut-Commissariat pour les réfugiés, en tant que fonctionnaires en son sein. » Ces déclarations de la députée Mseddi lors de son intervention sur les plateaux de la chaîne Attassia laissent croire que la migration des subsahariens n’était pas le fait du hasard et que certaines parties y ont balisé le terrain, parmi lesquelles il y a, outre des partis politiques, certaines associations telles que celle de Saâdia Mosbah, relative à la liberté de la femme africaine et contre le racisme, qu’a également évoquée la députée en déclarant : « feue ksiksi députée du mouvement Ennahdha à l’époque, a été à la base de l’approbation par l’ancien parlement d’une convention de la femme africaine incitée par l’association « Mnemty » de Saâdia Mosbah, pour accorder le droit d’asile à la femme africaine ». Elle ajouté qu’en 2019 certaines associations caritatives ont changé d’aspect pour devenir des associations humanitaires, en vue de faciliter l’implantation des Africaines en Tunisie en tant que terre d’asile ». Où sont les autorités de l’époque dans tout cela s’est demandé la députée, en précisant que le phénomène a augmenté depuis 2021, et que les responsables sont ceux qui veulent déstabiliser le régime ».
Campagnes de dénigrement et de racisme
Certains autres observateurs ont estimé que la députée est allée vite en besogne en confondant, liberté de circulation, droit d’asile et migration clandestine. En effet si Saâdia Mosbah est actuellement en garde à vue, pour vérifier les sources de financement de son association contre le racisme « Mnemty », il n’en reste pas moins qu’il n’est pas interdit ni suspicieux de sa part d’avoir agi en faveur de l’accord du droit d’asile à, la femme africaine. Le droit d’asile n’a rien à voir avec la colonisation que craignent certains et il est d’ailleurs réglementé par la loi que ce soit sur le plan interne qu’international. A ce propos Bassem Trifi le président de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) a dernièrement mentionné que : « Saâdia Mosbah lui a fait savoir qu’elle a été l’objet d’une campagne diffamatoire qui se propageait à son encontre sur les réseaux sociaux, et qu’elle envisageait de déposer une plainte à ce sujet ». Concernant l’affaire en cours, elle fait l’objet d’une enquête préliminaire et c’est à la justice de se prononcer sur les suspicions dont son association fait l’objet. D’ailleurs, pour certains observateurs, « la députée n’avait pas à évoquer le nom de Saâdia Mosbah, par respect du secret de l’enquête ».
Il ne faut donc pas faire d’amalgames, entre politique et racisme car il s’agit essentiellement d’un problème de sécurité nationale.
Manque de vigilance ou de coordination par les autorités ?
Pour le député Adel Dhiaf, il s’agit en effet d’une grave crise. Dans son intervention sur les ondes de Mosaïque FM, il a fait notamment observer que « le citoyen dans El Amra à Sfax et Jbéniana est devenu sur le qui- vive face aux derniers troubles perpétrés par les migrants subsahariens qui sont allés jusqu’aux actes de violences. Il craint désormais pour ses biens, sa sécurité matérielle, sanitaire et alimentaire ». Il y a des efforts de la part des sécuritaires, tant les militaires que les agents de police et de la Garde nationale. Manquent-ils de coordination entre eux, ou de vigilance afin de mieux sévir contre les troubles qu’il s’agisse de ceux perpétrés par les subsahariens ou autres criminels et hors la loi ? La question est posée au sein du parlement par Fama Mseddi qui a appelé à une séance d’audition du président de la République au parlement, et une séance de questionnement au chef du gouvernement, à propos des actions de son équipe, et des raisons qui ont conduit à cette situation ». Elle est allée jusqu’à proposer que « si le chef du gouvernement ignore la convocation du parlement, les députés devront déposer une motion de censure, pour retirer la confiance à son gouvernement ». En réalité, il est nécessaire de procéder à la promulgation de nouvelles lois afin de mieux sévir contre ce phénomène tout en tenant compte du fait que la Tunisie est une terre d’accueil et ses citoyens n’ont jamais été racistes. Ce qui étonne c’est certains parmi ceux qui sont scandalisés par les derniers troubles à Sfax, sont devenus racistes sans qu’ils s’en rendent compte, comme le Bourgeois Gentilhomme de Molière qui dit de la prose sans le savoir.
Problèmes de législation à mettre en œuvre et à réviser
Cela est dû à certaines parties qui veulent noyer le poisson, en détournant l’opinion publique des problèmes de corruption, de blanchiment d’argent et de malversation qui ont gangrené les institutions de l’Etat durant la dernière décennie. La Tunisie a signé des accords avec certains pays d’Europe et notamment l’Italie afin de mieux sévir contre la migration clandestine. Ce n’est donc pas une question de racisme mais de législation qui est à améliorer, tant sur le plan interne qu’international afin que toutes les parties prenantes fassent au mieux pour réglementer la migration et venir en aide également aux demandeurs du droit d’asile qui sont plutôt des victimes. Certes ils ne le sont pas tous. Certains peuvent être considérés comme des migrants économiques, cherchant à améliorer leurs conditions de vie dans un autre pays pour des raisons socio-économiques. Dans ces cas, leur statut de victime peut être plus ambigu. Il y a en effet ceux qui cherchent généralement refuge dans un autre pays dans l’espoir de trouver sécurité et protection pour eux-mêmes et leur famille et ceux qui sont incités par des organisations douteuses, pour pratiquer des opérations contraires à la loi telles que la contrebande et autres trafics nuisant à la société. Il est essentiel d’examiner chaque cas individuellement et de traiter les demandeurs du droit d’asile avec compassion, en respectant leurs droits fondamentaux et en leur offrant une procédure équitable pour déterminer leur éligibilité à l’asile. La protection des droits des demandeurs d’asile est un principe clé du droit international des droits de l’homme et du droit humanitaire.
Ahmed NEMLAGHI