Par Raouf KHALSI
« L’assassinat est la forme la plus extrême de la censure » disait George Bernard Show. Pourquoi a-t-on tué Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi ? Pour qu’il se taisent à jamais ! Se sont-ils tus pour autant ? Leurs paroles, leur courage et leur martyr nous persécutent encore…
Assassiné le 6 février 2013, Chokri Belaïd n’avait cessé de nous mettre en garde contre cette hydre à plusieurs têtes qu’est le mouvement Ennahdha.
Lui emboîtant le pas, Mohamed Brahmi, tué le 25 juillet 2013, était dans la même logique : préserver les fondamentaux de la révolution contre l’invasion islamiste.
Parce qu’en ces temps-là, l’islam politique s’insinuait subrepticement et parfois avec violence dans la société et au sein de l’appareil de l’Etat. Des forces étrangères y apportaient leur contribution et leur soutien logistique et idéologique.
Le mouvement Ennahdha prétendait même à l’alignement des planètes. Les cerveaux reptiliens ont fait le reste s’occupant de ses lâches besognes. Et, puisqu’une entité de cet acabit devait avoir le bras long et se draper de système occulte, voilà donc émerger, comme par une évidence géométrique, cet appareil secret sur lequel pèsent d’implacables présomptions d’assassinats.
Toile inextricable, mais que le comité de défense des deux martyrs a mis des années à décrypter, l’appareil secret du mouvement Ennahdha aura quand même réussi à glisser à travers les mailles détendues d’une Justice, elle aussi aux ordres. Ainsi des promotions systématiques d’un procureur d’autant plus zélé qu’il a réussi à occulter des pièces décisives pour l’instruction. Ainsi des « savantes » arguties juridiques toutes destinées à noyer le poisson. Ainsi, enfin, des instances judiciaires spécialement recomposées pour faire trainer indéfiniment les deux affaires.
« Pas d’intérêt pas d’action », dit-on en matière de droit : qui avait donc intérêt à faire taire Belaïd et Brahmi ? Sherlock Holmes dirait : « quand on aura éliminé toutes les présomptions, il ne restera que des évidences ». Et le vent de tourner !
Il se trouve que, depuis jeudi, les dossiers et les accusés ont été transférés à la chambre criminelle spécialisée dans les affaires de terrorisme. C’est un tournant sur le chemin des investigations et vers l’établissement de la vérité. Il s’agit désormais de crimes terroristes. Et, nolens, volens, on remontera jusqu’aux commanditaires.
Combien de temps faudra-t-il encore pour que la Tunisie fasse son deuil ? Cela prendra le temps qu’il faudra, mais ce qui est sûr c’est que la Justice tient enfin le filon.
Là où ils sont, Belaïd et Brahmi nous interpellent encore contre l’oubli, l’oubli interdit…