Par Raouf KHALSI
A l’approche d’une rentrée scolaire plutôt laborieuse cette année au vu des épineux dossiers à traiter, les syndicats de l’enseignement primaire et secondaire choisissent ce moment précis pour mettre la pression revendicative. Le ministère de l’Education appelle à la pondération et à la mesure, mais à l’évidence ses interlocuteurs ne l’entendent pas de la même oreille. Les revendications tiennent toutes à des considérations matérielles, entre majoration des salaires des enseignants et primes en tous genres.
Il est vrai qu’un procès-verbal avait été paraphé le 23 Mai dernier dans le sens de la satisfaction de ces revendications mais que, depuis, on n’est pas sûr que le ministère ait réussi à budgéter ces « fourchettes » supplémentaires, surtout que l’on sait que la masse salariale de la fonction publique représente 15% du Produit intérieur brut.
Sur un autre plan, les enseignants suppléants brandissent la menace du boycott de la rentrée scolaire dès qu’ils ont appris que le ministère intègrera un premier lot de cinq cents suppléants, et non mille comme initialement annoncé. Et c’est ainsi que la fête a tourné en sit-in.
Sans doute, comprend-on que ces revendications soient légitimes. Mais ce que l’on ne comprend pas c’est cette technique à vouloir engager un bras de fer par tous les moyens. Et si, de surcroît, on brandit la menace du boycott de la rentrée scolaire (les suppléants), ce sont les élèves, soit le quart de la population tunisienne, qui sont pris en otages. Et, à la fin des fins, les syndicats tous confondus ne jouent-ils pas les Cassandre puisqu’ils ne font que prédire et annoncer l’orage ?
Au demeurant, on voudrait bien connaitre la position des enseignants eux-mêmes, dans leur intime conviction : ne sont-ils pas chaque jour un peu plus loin de la dimension messianique dont ils sont naturellement investis ? Sont-ils encore dans leur sacralité mythique ? Et, chacun d’eux est-il encore cet enseignant qui a failli devenir prophète ? Cet examen de conscience s’impose pour mieux décrypter l’exemple qui vient d’en haut.
Depuis l’indépendance, la Tunisie a misé sur l’enseignement et ça continue par ce qu’il s’agit là d’une constante irréversible.
Mais dans ce secteur aussi, des poisons de l’outrance se sont dangereusement insinués. Réformes ayant capoté, instrumentalisation aussi de l’enseignement jusqu’au boutisme à des fins strictement partisanes et politicienne durant une décennie de hautes turbulences.
Et, alors, il faudra bien casser les chaînes et faire en sorte que le plus beau métier du monde, celui de l’enseignant, soit anobli et à nouveau sacralisé.
Car cette banalisation à laquelle nous assistons depuis des décennies n’est autre qu’une condamnation de l’histoire.