Par Slim BEN YOUSSEF
A l’heure où Israël et ses soutiens impérialistes sont en train d’étendre le génocide de Gaza jusqu’au Liban, les médias et les gouvernements occidentaux se bornent encore à parler de « risque », de « possibilité », de « menace », voire de « craintes » ou, dans un lexique plus soutenu, de « spectre » d’embrasement au Moyen-Orient. Comme si, pour l’heure, le Moyen-Orient ne s’était guère assez embrasé et qu’il devrait y avoir beaucoup plus de morts, beaucoup plus de destructions et beaucoup plus de flammes pour que les Occidentaux puissent se décider, un jour, à décréter qu’il y a eu embrasement. Comme si les 558 Libanais qui ont été massacrés dans la seule journée du lundi 23 septembre par les bombardements génocidaires israéliens comptaient pour des prunes, que les quelque 40 mille martyrs gazaouis, exterminés depuis le 7 octobre 2023, comptaient pour du beurre et que les centaines de Palestiniens assassinés en Cisjordanie occupée depuis la même date ne valaient pas un clou. Comme si le jardin de pierres qu’est déjà devenu Gaza et que l’autre jardin de pierres que deviendrait sous peu le Liban ne sont que broutilles et que tous les crimes contre l’humanité commis par Israël n’étaient que gnognotte.
Bien évidemment, la rhétorique occidentale obéit à une logique qui n’est pas une forme antérieure à l’expérience. Il n’y a pas embrasement lorsque les forces impérialistes occidentales ne sont pas impliquées directement dans les conflits, que pourtant elles télécommandent de loin. Dans ce cas de figure, les Occidentaux se contentent de se charger du soutien financier, des livraisons d’armes, de la machine médiatique, et, sur le plan politique, du « sale boulot » dans les instances internationales et à leur tête le Conseil de sécurité de l’Onu. C’est le cas actuellement avec Israël au Moyen-Orient, mais aussi avec l’Ukraine en Europe de l’Est. Ce sera très probablement le cas, tôt ou tard, avec Taïwan en Asie.
Alors qu’est-ce que l’embrasement ? Un terme géopolitique, très précis, qui ne désigne, dans la conjoncture actuelle au Moyen-Orient, qu’une seule chose : une guerre contre l’Iran.
Autrement dit : une guerre qu’Israël ne pourra pas mener seul sur le plan strictement militaire. De même, dans la conjoncture actuelle en Ukraine et bien qu’une guerre d’usure se poursuit depuis février 2022, les Occidentaux n’ont commencé à parler de « spectre d’embrasement » que très récemment, lorsque l’Ukraine a demandé de lancer des armes de l’OTAN sur le territoire de la Russie, au risque de déclencher une Troisième Guerre mondiale. Tout comme l’Ukraine, Israël aspire à tirer un maximum de profit de ce moment de flottement international qu’on appelle l’année électorale aux USA. Le temps des guerres peut sans nul doute s’analyser comme une construction de durées emboîtées, délicates à manier, faciles à s’effriter, promptes à déclencher à tout moment l’embrasement. Qu’est-ce que l’embrasement ? Ce qui pourrait succéder à cette prochaine élection.