- L’Etat aux secours des banques mixtes
Les députés ont proposé un projet de modification de plusieurs dispositions de la loi n°35 du 25 avril 2016 relative au statut de la Banque Centrale de Tunisie (BCT). Ce projet de loi prive la Banque des banques le pouvoir de fixer de façon exclusive et indépendante les taux d’intérêt et la politique monétaire, ou encore la gestion des réserves d’Or et de devises. La BCT sera tenue aussi d’acheter des bons du trésor et de financer directement la caisse de l’Etat. Cette question d’indépendance de la BCT reste controversée et divise l’opinion publique.
A ce propos, l’expert-comptable, Rami REGAIEG indique que ce projet de loi va agir sur l’indépendance de la Banque centrale de Tunisie. Et d’ajouter : « J’estime qu’il faut changer d’approche et voir les résultats de cette modification. L’institut d’émission a maintenu inchangée son taux directeur depuis une bonne période et l’impact de sa décision était très coûteux aux entreprises et à l’économie nationale d’une façon générale ».
Il a souligné que le projet d’amendement du statut de la Banque Centrale de Tunisie comporte des aspects positifs :
- Harmoniser la loi fondamentale de la Banque avec les exigences de la Constitution du 25 juillet, ainsi qu’aligner les orientations de la Banque centrale avec les politiques de l’Etat.
- Accorder des facilités de caisse à un faible taux d’intérêt, évitant ainsi les emprunts coûteux via les banques.
- Limiter le pouvoir de la Banque centrale, qui agit parfois comme un État dans l’Etat.
Dans le même sillage, il sied de rappeler que la question de l’indépendance de l’institut d’émission a suscité à moult reprises le débat soulevant des préoccupations majeures quant aux risques et conséquences qui pourraient en découler. Le Président de la République, Kaïs Saïed partage entièrement l’idée de faire la distinction entre l’autonomie et l’indépendance de la BCT.
« Le rôle principal de la BCT était de maîtriser l’inflation, soulignant, toutefois, qu’il est nécessaire d’améliorer et faire évoluer les textes juridiques afin que la banque puisse jouer pleinement son rôle, en tant qu’établissement public, autonome, mais non indépendant de l’Etat », a communiqué Saïed dans une récente déclaration.
« TSB bank » ne sera pas mise sous la commission de sauvetage des banques et des entreprises en difficultés
Sur un autre volet, la commission de Finances et du budget relevant de l’Assemblée des représentant du peuple (ARP) a adopté, lors d’une séance d’audition de la ministre de Finances, Sihem Boughdiri Nemsia, le projet de loi relatif à l’autorisation d’une souscription de l’Etat dans le capital de la banque « Tunisian Saudi Bank » (TSB bank).
Nemsia a indiqué dans sa réponse aux questions des membres de la commission, que les banques mixtes souffrent de nombreux problèmes, étant donné que leur statut est passé de banques de développement à des banques universelles, en vertu de la loi des banques au titre de l’année 2001.
Ces banques étaient incapables de rivaliser avec les banques commerciales, vu leur taille réduite, l’inefficacité de leur système de gouvernance, en plus de plusieurs dysfonctionnements au niveau organisationnel et de gestion.
Elle a rappelé le conseil ministériel tenu en 2018 et qui a été consacré à la réforme de quelques banques ayant des participations publiques, et dont la participation ne dépasse pas 50%, précisant que l’orientation était vers la renonce à ces banques.
Elle a ajouté que le dossier des banques mixtes a été présenté au gouvernement, rappelant que le dernier conseil des ministres tenu 2023, a concrétisé la préservation des participations de l’Etat dans ces banques, dans le cadre des orientations générales de la politique de l’Etat dans la préservation des entreprises publiques.
Elle a souligné que le ministère de Finances était chargé d’identifier une solution pour ces banques. Une commission de pilotage au niveau de la présidence du gouvernement a été créée, et un bureau d’expertise a été chargé de réaliser les missions d’audit global et proposer des solutions.
La ministre a souligné que le programme de sauvetage comprend l’audit en matière de gouvernance, de rentabilité, et de politique commerciale de la banque. Il comporte différents scénarios et des hypothèses et fixe le volume des fonds propres nécessaires pour permettre à la banque de poursuivre son activité.
Elle a précisé que la décision d’autorisation de l’Etat à augmenter le capital de la banque a été prise, dans le cadre de la commission d’assainissement et de restructuration des établissements à participation publique, en plus du programme correctionnel qui sera exposé prochainement à l’examen du gouvernement.
La ministre a fait remarquer que « TSB bank » ne sera pas mise sous la commission de sauvetage des banques et des entreprises en difficultés, auprès de la Banque centrale de Tunisie (BCT), car ceci aura des impacts défavorables sur la réputation de la place financière tunisienne et le classement de la Tunisie par les agences de notation internationales.
50 millions de dinars seront injectés par l’Etat ?
L’Etat va souscrire en numéraire à l’augmentation du capital de la Banque « Tunisian Saudi Bank », d’une valeur de 49 millions et 625 mille dinars. Dans ce sens, certains membres de la commission se sont également interrogés sur la priorité de l’engagement de l’Etat à injecter 50 millions de dinars du budget de l’Etat dans la banque dans cette conjoncture économique délicate. Ils ont renouvelé leur demande de données précises sur les raisons qui ont conduit à la détérioration de la situation de cette banque et sur les résultats de l’audit global. Certains membres ont estimé que le sauvetage de la banque n’est pas une priorité et qu’il serait plus efficace d’affecter cette somme à la relance du cycle économique.
Khouloud AMRAOUI