Le littoral de la banlieue sud de Tunis est sévèrement touché par la pollution depuis presque trois décennies. Les plages sont chaque année interdites à la baignade en raison de la pollution. Des manifestations ont eu lieu précédemment, rassemblant des milliers de personnes, notamment sur les plages les plus polluées, à Radès, Ezzahra, Hammam-Lif, ces trois localités pourtant connues par leurs belles mers et leurs plages propres, visitées chaque été par des estivants venus de la capitale et même d’autres villes pour passer de beaux moments dans ces lieux de villégiature splendides et très accueillants.
Aujourd’hui, la belle mer d’antan, propre et limpide, est devenue polluée, la plage de sable doré s’est transformée en une étendue jonchée de toutes sortes d’ordures et de déchets. Devant ce spectacle désolant, la société civile assiste, impuissante, au rejet continu de déchets et d’eaux usées dans la mer, provenant notamment des usines de Ben Arous et des stations de l’ONAS, installées tout près du littoral. Les autorités non plus ne semblent pas avoir jusqu’à présent la solution adéquate pour ce fléau environnemental qui menace toute la zone balnéaire de la banlieue-sud, quoiqu’elles soient bien conscientes d’une catastrophe environnementale imminente.
Un mécontentement général
Les habitants de la banlieue-sud (Radès, Ezzahra, Hammam-Lif) ne sont pas restés les bras croisés toutes ces dernières années. Ils ont exprimé leur dédain et mécontentement d’une manière civilisée et responsable, en organisant des manifestations pacifiques sur les lieux, en rédigeant des pétitions aux ministères concernées et aux municipalités impliquées. L’une de ces pétitions a été adressée au Président de la République. Tous les médias en ont parlé. Sur les réseaux sociaux, des milliers de gens se sont exprimés pour décrire la situation, photos et vidéos à l’appui, et appeler à une solution urgente pour sauver l’environnement dans ces lieux qui ne cesse de se dégrader d’une année à l’autre.
Tout le monde est donc au courant de cette situation lamentable dont souffre depuis des décennies le littoral de la banlieue-sud. On connait déjà les causes qui sont derrière la dégradation du littoral. En effet, ces raisons sont devenues claires et évidentes et elles se résument en ce qui suit : d’abord, le rejet irresponsable des eaux non traitées par l’Office National de l’Assainissement (ONAS) dans l’Oued Méliane, sachant que ces stations de traitement ne fonctionnent pas correctement selon les normes et ne répondent plus aux besoins actuels en matière d’assainissement. Ensuite, il y a la pollution chimique qui est provoquée par le déversement des déchets toxiques par les entreprises industrielles de la région directement et d’une manière anarchique et illégale dans les Oueds, principalement oued Méliane. Puis, il faut noter les vidanges et les dégazages des réservoirs des bateaux qui rentrent au port de Radés. Enfin, l’installation des digues (brise-lames) de façon anarchique et non étudiée empêchant les courants marins de circuler et causant une stagnation des eaux d’où le dégagement d’odeurs nauséabondes et suffocantes pour les riverains.
Des projets en vue, mais rien n’est officiel !
Le ministre de l’Environnement, Nabil Abid, a annoncé, en juin 2025, la mise en place d’un programme couvrant l’ensemble du littoral tunisien. Dans une déclaration accordée à Mosaïque FM, il a expliqué qu’ « un plan environnemental a été élaboré, comprenant une étude des sources de pollution ainsi que des mesures pour y remédier. L’oued Méliane étant identifié comme un point critique, avec 135 sources de pollution recensées. » Le ministre a également précisé que « ce programme concerne une portion de 200 kilomètres le long du littoral tunisien et qu’il débutera dans la région de Hammam-Lif. » S’agissant des stations d’épuration, il a annoncé qu’ « un programme est en cours et qu’une station est en cours d’adaptation pour assurer un traitement tertiaire des eaux usées. Pour les autres stations, les eaux traitées ne seront plus déversées dans l’oued Méliane, mais réutilisées à des fins agricoles. » Selon le Ministre, concernant les eaux industrielles, leur rejet se fera désormais à environ sept kilomètres des côtes, afin de limiter leur impact sur le littoral.
C’est ainsi que la sauvegarde du littoral pollué dans la banlieue sud de Tunis nécessite une approche multidimensionnelle. Cela implique plusieurs ministères, l’ONAS, les autorités municipales et toutes les associations luttant contre les sources de pollution, telles que les rejets industriels et domestiques, en améliorant la gestion des déchets et en mettant en place des systèmes de traitement des eaux usées efficaces. Il faut aussi envisager des travaux de protection côtière pour lutter contre l’érosion et la dégradation des plages. Enfin, la sensibilisation du public et l’implication des communautés locales sont cruciales pour garantir le succès de ces initiatives, notamment en appliquant les programmes de protection du littoral tunisien.
Hechmi KHALLADI