Par Raouf KHALSI
Ce n’est pas un pavé jeté dans la mare, mais ce n’est pas, non plus, un coup de tonnerre : la France reconnaîtra l’Etat de la Palestine au mois de septembre prochain. Macron l’annoncera du haut de la tribune du Conseil sécurité de l’ONU.
Au-delà de l’effet d’annonce, ce pavé n’a rien de sensationnel et cela, d’ici septembre, pourrait se révéler être un non-événement, puisque 149 pays ont déjà reconnu l’Etat de la Palestine et que, d’ici-là, d’autres les rejoindront.
L’ennui, c’est que cette reconnaissance française n’est guère accompagnée d’une condamnation ferme et, tout le moins, d’une action concrète pour que cesse le génocide de la population de Gaza. A quelques variantes près, nous assistons à la banalisation de l’apocalypse.
A la limite, pour Macron, ce ne serait qu’une mise en cohérence, puisqu’à plusieurs reprises il avait bien reçu Mahmoud Abbas à l’Elysée. Il l’a reçu en sa qualité de quoi, sinon de président palestinien. Un président palestinien lui-même embourbé dans un dilemme « confortable » : il évite de parler de « résistance palestinienne » pour éviter toute allusion au Hamas chiite, lui le sunnite. C’est là aussi une équation à élucider dans la perspective d’un Etat palestinien souverain et qui s’étend sur tout le territoire de la Palestine morcelée depuis 1948.
Non-événement, mise en cohérence ou effet d’annonce, la déclaration de Macron a néanmoins provoqué la colère de Netanyahu, cependant que Trump s’est limité à ironiser. Netanyahu parle de « trahison », mais ne prononce pas le mot France.
Il compte, bien sûr, sur ses relais au sein de l’extrême droite française qui condamne et fustige au nom des … « intérêt stratégiques de la France ».
Bien entendu, il n’y a pas que des maximalistes dans les mouvances idéologiques françaises. La France Insoumise, par la voix de son leader Mélenchon a applaudi.
Or, la déclaration de Macron occulte subrepticement l’actualité de tous les jours tenant au martyr gazaoui. Dans tout cela, Gaza reste seule. Et, dès lors que le Hamas est répertorié « organisation terroriste » et « extension du bras de l’Iran » par les Occidentaux (y compris la France), le leitmotiv sioniste est toujours dominant dans les esprits.
Pour autant, la déclaration de Macron exhume quand même une certaine âme gaulliste de la France en ce qui concerne le conflit arabo-israélien, même si Dominique De Villepin l’avait précédé des temps de Chirac où il était son alter égo et ministre des Affaires étrangères. De Villepin avait, en l’occurrence, exprimé la position de la France favorable à deux Etats, aux Nations unies. Après tout Chirac s’est toujours identifié à De Gaulle.
Au final, quel crédit accorder à la déclaration de Macron ? D’ici septembre, beaucoup d’eau coulera sous les ponts. Mais, d’ores et déjà, il y a à craindre une instrumentalisation de la cause palestinienne, puisqu’on ne voit rien venir de concret pour Gaza, en dehors bien entendu des déclarations juste compassées…
