Cela fait plus de deux ans qu’un conseil ministériel s’est tenu en vue d’examiner le projet de décret portant création du Conseil supérieur de l’éducation. Les ministres de l’Education, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, des Affaires religieuses, de l’Emploi et de la Formation professionnelle, de l’Economie et de la Planification ont participé à ce conseil et y ont exprimé leurs propositions autour du sujet. Depuis ce jour-là (16 décembre 2022), aucune mesure n’a été prise autour de ce projet pourtant très efficace pour l’avenir de notre système éducatif, d’autant plus qu’il servira à baliser la voie devant les réformes à venir.
Il est à rappeler que ce Conseil supérieur de l’Education a été énoncé dans la nouvelle Constitution du pays dans son article 35, chapitre IX. Cet article stipule que ce Conseil «émet son avis sur les grands plans nationaux dans le domaine de l’éducation, de l’enseignement et de la recherche scientifique, de la formation professionnelle et des perspectives de l’emploi. La loi fixe la composition de ce Conseil, ses attributions et les modalités de son fonctionnement». C’est donc une nécessité que d’avoir un tel conseil pour le grand rôle qu’il peut jouer dans les réformes éducatives et dans l’amélioration de l’éducation en Tunisie. D’ailleurs, ce conseil existe dans pas mal de pays (France, Canada, Maroc…) et vu la situation actuelle de notre système éducatif, ce projet ne doit plus supporter ni retard ni report.
Il est à rappeler que ce décret relatif à la création d’un Conseil supérieur d’Education a été publié au Journal officiel de la République tunisienne (Jort) en date du 17 septembre 2024. Il définit la composition, les compétences et les modalités de fonctionnement dudit Conseil.
Ce projet a toujours été considéré comme étant une priorité, mais à chaque fois, ça grince dans la concrétisation. C’est que la création d’un tel projet se heurte contre certaines positions rigides de la part des parties intéressées qui voient d’une manière différente l’avenir de l’éducation en Tunisie. Or, ces parties doivent se libérer de toute arrière-pensée idéologique et se pencher seulement sur la dimension pédagogique. Voilà ce qui explique le retard de la mise en œuvre, quand bien même notre système éducatif aurait toujours besoin de sa présence, à côté du ministère de l’Education.
Comme autre obstacle ayant empêché ou retardé la création de ce projet, c’est le manque de conviction du syndicat de l’enseignement quant aux procédures et aux prérogatives à attribuer à ce conseil. Dans la foulée des différents points, chaque intervenant cherche à se faire valoir comme le principal ayant droit à la vérité. Or la création d’un tel conseil relève d’un travail collectif et doit avoir des objectifs communs tenant compte de l’intérêt général afin d’aider à sortir notre système éducatif de son marasme chronique. La consultation électronique relative au système éducatif, organisée il y a deux ans au moins, contient pourtant des questions sur la composition de ce Conseil, sur ses attributions et sur ses objectifs. Ainsi, un bon nombre de citoyens pourrait être impliqués dans le processus afin de garantir toutes les chances de réussite à ce Conseil.
Le rôle du Conseil supérieur de l’Education
Le Conseil supérieur de l’Education, tout en gardant une marge de liberté dans son fonctionnement, demeure indépendant du ministère et du gouvernement dans son travail et dans sa pensée, ayant une autorité morale représentative du secteur susceptible de conseiller, d’éclairer et de surveiller.
Le Conseil serait plus en mesure d’apporter des points de vue neufs sur la politique scolaire, des suggestions hardies, une vue d’ensemble et au besoin, les critiques qui s’imposent. Devant les exigences de l’enseignement moderne, qui réclame de l’imagination, de la recherche et des innovations, ce Conseil est aujourd’hui indispensable, plus que jamais. C’est au Conseil supérieur de l’Education que reviendra surtout la responsabilité de maintenir le système d’enseignement en contact avec l’évolution de la société et celle d’indiquer les changements à opérer et d’inspirer des plans à long terme. A l’heure où notre système éducatif est devenu vétuste, représentant plusieurs lacunes et dysfonctionnements qu’il faut corriger, la création d’un Conseil supérieur n’est pas seulement nécessaire, mais elle serait d’un apport considérable pour notre éducation et notre école du futur.
Nous croyons savoir que le ministre de l’Éducation, Noureddine Nouri, a annoncé récemment que «son département entamera, dès la fin des examens nationaux, les procédures concrètes pour la mise en place du Conseil supérieur de l’Education». Cependant, la création de cette structure stratégique, longtemps attendue, devrait réunir autour d’une même table l’ensemble des acteurs concernés par l’éducation (gouvernement, Syndicat de l’enseignement, Association des parents d’élèves, éducateurs, pédagogues et experts en éducation) pour que les réformes à apporter à notre éducation soient partagées par tous et de manière collective. Espérons voir ce projet opérationnel dans les plus brefs délais.
Hechmi KHALLADI
