La mutation des enseignants du secondaire et du primaire a lieu chaque année avant la rentrée scolaire. Ce mouvement national concerne le rapprochement de conjoints et se rapporte aux cas humains. D’après les informations disponibles, le mouvement des enseignants en Tunisie pour l’année 2025 est en cours ou en préparation. Ce mouvement concerne les enseignants du primaire et du secondaire. Des communiqués et des informations sont publiés en mai et juin 2025 concernant le rapprochement des conjoints. Une première tranche impliquant près de 9 000 enseignants est prévue à partir de janvier 2025, sur un total de 14 000.
Ce mouvement est très important pour le personnel enseignant, exerçant loin de leur ville d’origine ou d’habitation et ce, dans la mesure du possible, car les demandes des enseignants revendiquant une mutation ou une permutation ne sont pas toujours toutes satisfaites. Rappelons que tout enseignant, ayant passé un nombre d’années de roulement, a le droit à une mutation, soit pour rejoindre son conjoint, soit pour des raisons humanitaires.
Il est à constater qu’en 2025, le mouvement des enseignants en Tunisie s’est concentré sur la régularisation du statut des enseignants suppléants, avec la publication du décret n° 21 de 2025 qui officialise leur intégration dans l’éducation nationale. Ce processus, rappelons-le, a été précédé par des protestations, des sit-in et même un boycott des cours, revendiquant la résolution de leur situation administrative et financière, ainsi que leur affectation dans des établissements plus ou moins proches de leur domicile, surtout pour ceux qui ont déjà passé plusieurs années dans des régions lointaines.
Concilier vie familiale et vie professionnelle
Il est indéniable qu’un équilibre entre la vie familiale et la vie professionnelle est primordial pour tout enseignant pour qu’il puisse se consacrer totalement sur son métier et jouir d’une vie stable auprès des siens. C’est pourquoi on ne doit pas contraindre un fonctionnaire à vivre durablement séparé de sa famille. Et dire que cette durée d’éloignement ou de séparation peut s’étendre sur plusieurs années, quoique la durée du roulement soit fixée à deux ans au moins. En effet, là-dessus, les doléances sont nombreuses. Chaque année scolaire laisse un goût amer chez les enseignants dont la demande de mutation n’a pas été satisfaite pour des raisons que seul le ministère de tutelle connaît. Et dire que malgré leur ancienneté dans le métier, et malgré les nombreuses demandes déposées auprès du ministère, concernant le rapprochement de conjoint ou des cas humains, certains enseignants n’ont pu obtenir satisfaction qu’après plusieurs années d’attente. Il y a certes des critères qui déterminent une telle mutation (ancienneté professionnelle, distance kilométrique séparant les deux conjoints, présence d’un handicap sérieux, enfants en bas âge, vieux parents à charge, note pédagogique, note administrative…). De même, on se conforme à un régime de bonifications qui favorise le rapprochement de conjoints séparés en attribuant un certain nombre de points à l’intéressé. Et c’est le total des points accordés selon le cas qui favorise la mutation des uns ou des autres.
Vie instable et difficile à supporter
Nombreux sont les enseignants qui travaillent loin de leurs familles et ce, pendant plusieurs années. Ils sont obligés de regagner leurs postes où ils ont été affectés la première fois, laissant derrière eux, épouse, enfants et amis, pour vivre loin de leur foyer, à des centaines de kilomètres. En effet, il arrive qu’un enseignant soit affecté au Sud du pays alors que son épouse habite ou travaille à Tunis et inversement. L’instabilité qui découle de cette séparation forcée est très mal supportée par ces enseignants, ce qui pourrait influer sur leur rendement, sachant que plusieurs d’entre eux demeurent des années sans que leurs demandes réitérées soient satisfaites. D’après certains témoignages, les critères adoptés ne sont pas toujours respectés et on a souvent besoin d’interventions pour obtenir gain de cause. D’autres ayant vécu l’amère expérience vont jusqu’à crier au scandale puisque même des demandes passant pour des cas sociaux ne sont pas toujours prises en considération, à moins d’avoir du piston auprès de l’Administration. D’autres encore parlent de pots-de-vin pour être mutés. Ceux qui n’ont pas recours à ces moyens détournés doivent attendre !
De son côté, le syndicat de l’enseignement secondaire ne cesse de soulever cette question épineuse avec le ministère de tutelle. Depuis quelques années, croit-on savoir, un accord a été conclu sur deux points : augmenter le nombre de points par année d’ancienneté afin que les enseignants puissent bénéficier d’un meilleur score et publier la liste d’attente des enseignants et leur score ainsi que celle des postes ouverts dans les gouvernorats. Enfin, dans un souci de transparence, le ministère de l’Education nationale a pris également la décision d’annuler toute mutation au cas où des dépassements seraient signalés dans le traitement des dossiers pour le rapprochement des conjoints.
Et ces enseignantes qui travaillent loin de chez elles ?
Des centaines d’enseignantes, les nouvelles recrues dans l’Education, sont affectées par le ministère dans des régions lointaines, loin de leurs villes natales, loin de leurs parents, loin de leurs familles. Et dire qu’elles sont contraintes d’y rester des années sans être mutées à leurs villes d’origine. L’éloignement géographique, la solitude et la difficulté d’intégration dans un milieu différent, tout cela pourrait incommoder certaines enseignantes non ou peu habituées au changement. Parmi ces enseignantes, il y a de jeunes filles qui ont laissé des parents malades ou invalides ou d’autres jeunes femmes, déjà mariées, que la distance a séparées de leur conjoint ou de leur enfant qui vient de naître.
Selon le règlement, l’affectation des enseignants dans ces régions lointaines concernent aussi bien les hommes que les femmes. C’est finalement une question d’équité et de justice entre les deux sexes. Mais, il faut tout de même reconnaître que les hommes peuvent mieux se débrouiller que les femmes pour qui cette tâche semble moins aisée et se trouvent en face d’un certain nombre de défis à relever. Sans oublier que cette mobilité peut être un facteur intéressant d’équilibre entre les régions et qu’elle relève d’un devoir national que tout enseignant doit avoir l’honneur d’accomplir. Ces enseignantes aussi sont souvent désappointées, en se voyant chaque fois se refuser une mutation vers leur ville d’origine, soit en raison d’une saturation d’effectifs, soit à cause du non-respect des critères préfixés.
Hechmi KHALLADI
