Par Slim BEN YOUSSEF
Certaines amitiés vont d’époque en époque à la cadence des caravanes : lentes, fidèles, tenaces. De Tunis à Alger, même souffle. Germée dans un passé immémorial, mûrie dans la braise des indépendances, aguerrie par les années de veille, affinée par l’art patient des chancelleries. Au-delà des traités et des bornes, elle demeure une matière vive — chair, mémoire, horizon.
Aujourd’hui, Kasserine et Tebessa dialoguent par méthode : le rare a pris racine. Les dirigeants se parlent, les terroirs se répondent, les peuples se visitent. On partage fêtes et marchés, deuils et étés. De Djerba à Oran, de Bizerte à Timimoune, l’alliance est dans l’air : lumière claire dans le regard des peuples. Flamme discrète ? Braise obstinée.
Ibn Khaldoun aurait souri : c’est bien cela l’asabiyya, cette force invisible, véhémente, qui fait tenir debout une histoire commune.
Mais l’Histoire ne se satisfait pas d’amitié. Elle demande plus qu’une fraternité vécue, plus qu’une coopération bienveillante. Un dinar tuniso-algérien — audace monétaire, sceau de souveraineté. Un marché commun — circulation des biens, des énergies et des rêves. Une union vivante, charnelle — là où l’appareil maghrébin se pétrifie dans l’attente.
Définir l’avenir, c’est d’abord affirmer trois serments : à la mémoire commune, au désir des peuples, au vent méditerranéen. C’est ensuite s’armer de quatre nervures : complémentarité énergétique, synergie agricole, marche de la jeunesse, puissance culturelle. Ressources, convergences, outils : tout gît déjà dans nos mains. Ne reste qu’à oser refermer les doigts.
Union de fait : addition d’élans. Destin commun : pari d’avenir. La Libye suivra, tôt ou tard, portée par le même vent.
Le moment est venu. Nos deux peuples guettent une aurore et des caps, un essor et des ardeurs. Un pôle tuniso-algérien pour inspirer l’avenir ? Oser ensemble, c’est offrir à la Méditerranée, à l’Afrique, au Sud global, une étoile neuve. C’est inscrire nos deux nations dans le cercle rare des fraternités devenues Histoire.
