Par Raouf KHALSI
La douce France, notre « douce » France exhibe son côté xénophobe ; et cela fait déjà longtemps qu’elle a tué en elle cette « âme arabe », cette âme maghrébine, une seconde nature transcendée par les lumières incandescentes de toutes les « « renaissances ». Ces lumières sont , aujourd’hui, évanescentes. La « douce » France prend le pli de la contraction. Elle renonce à son aura. Elle se banalise dans les labyrinthes eugéniques : comme partout en Occident, à peu de frais, un certain racisme
S’engouffre dans ces brèches où s’insinuent les poisons de l’outrance.
Le meurtre d’Abdelkader Dhibi résume tout cela à la fois. Difficile aujourd’hui d’être Tunisien en France. Difficile d’être de surcroît arabe et musulman. Les Tunisiens de France galèrent, fussent-ils en règle avec les normes de séjour.
Déjà, le 27 août dernier, l’Observatoire français de l’immigration et de la démographie donnait le ton dans une étude sur l’histoire de l’immigration tunisienne pour les vingt dernières années. Cette étude parle de croissance supérieure à celles du Maroc et de l’Algérie. Les immigrés tunisiens auraient des « difficultés notables » d’intégration sur le marché de l’emploi. Le rapport (et c’est là où le bât blesse) parle aussi de « mauvaise coopération diplomatique de la Tunisie ». Bien entendu, on occulte l’apport des médecins, du personnel paramédical et des ingénieurs tunisiens, ceux-là mêmes qui sont en train de revitaliser biens des secteurs sinistrés français ! Bienvenue pour les cerveaux qui sont de sève intégralement tunisienne. Haro sur le reste. Même sur ceux qui avaient servi de main-d’œuvre qualifiée dans le boom de l’industrie automobile des années 1960.
Le rapport se focalise sur les vingt dernières années : rien que ça. Tout le reste est savamment occulté. Et, d’ailleurs, Le Figaro l’aura vite médiatisé sous le sceau de l’exclusivité. Suivez le regard…
Comme c’est d’usage, le ministre français de l’Intérieur s’est rendu sur les lieux du drame. Une double enquête a été diligentée. Bavure policière ? Les enquêtes n’aboutiront pas à cette conclusion. C’est clair. On conclura plutôt que les principes de nécessité (recours à la force ultime si aucun autre moyen de dissuasion n’existe plus) et proportionnalité (le recours à cette force ultime doit être proportionnel à la gravité des faits) ont été respectés. Cela a été étayé sur les colonnes d’un confrère en ligne. La bavure, du moins telle qu’elle défile sur la vidéo retraçant le drame, existe donc bel et bien. On attendra la version finale des autorités françaises.
Entre temps, la Tunisie s’est fait sentir. Des ONG ont se sont solidarisées avec le pays. Et, lui, Abdelkader Dhiba au paroxysme de sa crise l’hystérie, aurait peut-être saisi dans un dernier soupir la dimension de l’envers et l’endroit telle que répercutée par Camus.
L’envers, synonyme d’angoisse face à l’étrangeté et au silence du monde et de l’absence apparente de prise sur ce monde ; l’endroit, synonyme de beauté et l’acceptation de ce monde incompréhensible. Les deux faces de cette même pièce qu’est l’exil.
