Du 8 au 10 septembre 2025, l’Éthiopie accueille à Addis-Abeba la deuxième édition du Sommet africain sur le climat (ACS2). Cet événement réunit chefs d’État, ministres, experts, ONG et institutions internationales pour débattre des stratégies à adopter face au réchauffement climatique, qui frappe de plein fouet le continent africain. La Tunisie, en première ligne des bouleversements environnementaux, participe activement à cette rencontre, avec l’objectif d’y faire entendre sa voix et de défendre des priorités nationales et régionales.
L’Afrique contribue faiblement aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, mais elle en subit de manière disproportionnée les conséquences. Sécheresses prolongées, inondations destructrices, baisse des ressources en eau, recul de la biodiversité et menaces sur la sécurité alimentaire : la liste des impacts est longue et inquiétante.
La Tunisie n’échappe pas à ce constat. Classée parmi les pays les plus exposés au stress hydrique, elle connaît déjà des épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents, des récoltes agricoles en déclin et une pression croissante sur ses ressources naturelles. Les crises récentes liées à la distribution de l’eau potable en sont un exemple frappant. Dans ce contexte, le Sommet africain sur le climat représente une tribune pour rappeler l’urgence d’une action collective et d’un financement international à la hauteur des défis.
La délégation tunisienne mobilisée
La Tunisie envoie à Addis-Abeba une délégation composée de représentants gouvernementaux, de diplomates et d’experts techniques. L’objectif est double : réaffirmer l’engagement du pays dans la lutte contre le réchauffement climatique et nouer de nouveaux partenariats pour renforcer ses capacités d’adaptation.
Les responsables tunisiens insistent sur la nécessité de faire entendre la voix de l’Afrique du Nord, souvent reléguée au second plan par rapport à l’Afrique subsaharienne dans les discussions internationales. Pourtant, la région maghrébine connaît des défis majeurs : désertification, pénurie d’eau et pressions sur les littoraux méditerranéens.
Les priorités tunisiennes
La participation tunisienne au Sommet s’articule autour de plusieurs priorités.
D’abord, la gestion durable de l’eau. Face à des réserves limitées et des sécheresses plus sévères, la Tunisie cherche à promouvoir des politiques de préservation et de réutilisation des ressources hydriques. Le pays souhaite mettre en avant ses expériences pilotes, comme la réutilisation des eaux usées traitées pour l’agriculture. Ensuite, la transition énergétique. La Tunisie s’est fixé l’objectif de produire 35% de son électricité à partir des énergies renouvelables d’ici 2030. Les projets solaires et éoliens se multiplient, mais nécessitent un soutien financier et technologique. Le Sommet est l’occasion de rappeler que les pays africains ont besoin d’investissements massifs pour réussir leur transition.
Autre priorité : l’adaptation agricole. Les changements climatiques menacent directement la sécurité alimentaire. Les récoltes céréalières, l’olivier et les dattes, piliers de l’agriculture tunisienne, subissent déjà les effets du réchauffement. La Tunisie plaide pour des programmes régionaux de recherche et d’innovation afin de développer des cultures plus résistantes et d’améliorer la productivité.
Une dimension diplomatique
Au-delà des aspects techniques, la présence tunisienne à Addis-Abeba revêt une dimension diplomatique. Le pays cherche à renforcer ses alliances africaines, dans un contexte où les enjeux climatiques deviennent aussi des enjeux géopolitiques. En se plaçant «au cœur» des discussions, la Tunisie veut rappeler qu’elle est un pont entre l’Afrique et l’Europe, capable de jouer un rôle de médiateur et de partenaire stratégique. La transition écologique pourrait devenir un axe majeur de coopération, notamment dans le cadre des partenariats euro-africains.
L’épineuse question du financement
L’un des points centraux du Sommet africain sur le climat concerne le financement. Les pays africains demandent depuis plusieurs années aux pays industrialisés de tenir leur promesse de mobiliser 100 milliards de dollars par an pour aider les nations du Sud à faire face aux conséquences du réchauffement.
La Tunisie, comme beaucoup d’autres pays, rappelle que sans ressources financières suffisantes, les ambitions climatiques resteront lettre morte. Le pays espère bénéficier de fonds pour moderniser ses réseaux hydriques, soutenir ses agriculteurs et accélérer le développement des énergies propres.
Une jeunesse engagée
La société civile tunisienne est également représentée dans les débats, notamment à travers des ONG et des associations environnementales. Depuis plusieurs années, des mouvements citoyens alertent sur la dégradation des ressources naturelles et sur la nécessité d’un changement de modèle.
La participation de ces acteurs non étatiques est essentielle : elle montre que la lutte contre le changement climatique n’est pas seulement une affaire de gouvernements, mais aussi un engagement collectif qui implique les communautés locales, les chercheurs et les jeunes générations.
La participation de la Tunisie au 2ᵉ Sommet africain sur le climat est une opportunité stratégique. Elle permet de mettre en avant les défis nationaux – eau, agriculture, énergie – tout en inscrivant le pays dans une dynamique continentale. Mais au-delà des déclarations, c’est la mise en œuvre qui comptera. Car si l’Afrique est en première ligne face au réchauffement, elle est aussi riche de solutions : énergies renouvelables, innovations agricoles, mobilisation citoyenne. La Tunisie, en se positionnant au cœur de ce combat, a l’occasion non seulement de défendre ses intérêts, mais aussi de contribuer activement à une stratégie africaine commune.
L’enjeu est vital : il s’agit de garantir l’avenir d’un continent entier et de montrer que la lutte contre le changement climatique peut devenir un moteur de développement durable. Pour la Tunisie, le message est clair : il n’y aura pas de prospérité possible sans résilience écologique.
Leila SELMI
