Abdelkader Ben Zineb, député de la circonscription de Soliman et vice-président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) chargé de la communication, a, lors de son intervention sur les ondes d’une radio de la place, déploré le manque de synergie entre les différentes institutions législatives et exécutives. Ce qui a généré parfois l’empiètement par certains responsables sur les prérogatives d’autres institutions, pour des motifs qui ne servent pas toujours l’intérêt général, selon le député. Une situation, a-t-il souligné, qui nuit à la bonne marche des institutions censées œuvrer chacune dans le strict respect des compétences qui lui sont légalement dévolues, et ce, dans le but de servir les citoyens, répondre à leurs préoccupations et satisfaire leurs doléances.
Certes, cette absence de coordination se traduit par des chevauchements de compétences et des ingérences réciproques, certains responsables outrepassant leurs prérogatives légales pour intervenir dans des domaines relevant d’autres structures. Ces pratiques, motivées parfois par des considérations partisanes ou personnelles, détournent l’action publique de sa finalité première, à savoir l’intérêt général. Le député a cité l’exemple des conseillers locaux qui se présentent comme des députés, alors qu’ils ont un rôle de suggestions qu’ils présentent aux conseils régionaux. Toutefois, le statut de collectivités locales est attribué à ces conseils, conformément à l’article 133 de la Constitution. Mais leurs prérogatives diffèrent de celles des municipalités et en principe, ils ne sont pas habilités à intervenir dans leur travail. Leur rôle se limite à soumettre des suggestions aux conseils régionaux qui les transmettent à leur tour au Conseil des régions et des districts. Il faut dire que sur ce point, tant que le nouveau code des collectivités locales n’a pas vu le jour, il existe encore des confusions dans les rôles, qui engendrent des conflits de compétence ne servant aucunement les citoyens.
La convergence des actions, expression de la volonté du peuple
Par ailleurs, le député déplore également «une absence totale de coordination entre les fonctions législative et exécutive». Alors que selon la Constitution, c’est le concept de l’unité qui est consacré, toutes les institutions aux niveaux central et régional devant agir de concert et dans une parfaite symbiose afin de gérer au mieux les affaires de l’Etat. C’est de cette façon qu’est réalisée l’unité du pouvoir, la convergence des actions entre les fonctions exécutive et législative, telle que prônée par le Président de la République Kaïs Saïed, étant issue de la volonté du peuple. Or, selon le député, cette convergence fait défaut et à titre d’exemple, il affirme que «le projet de loi de Finances pour 2026 n’a toujours pas été déposé». Car selon l’article 40 de la loi organique n°2019-15 du 13 février 2019, le gouvernement est tenu de présenter les grandes lignes de ce projet avant la fin du mois de juillet». Le député pense que c’est «l’entrée en vigueur des conseils locaux, régionaux et des districts qui a pu perturber le travail du ministère». Ainsi, les conseillers locaux n’ont pas compétence pour débattre du projet de la loi de Finances et l’étudier.
Les conseillers locaux ne sont que des relais de proximité
En principe, cette tâche ne relève pas de leurs attributions directes. Selon la loi précitée, l’analyse des dispositions du projet de loi de Finances en lien avec les finances locales incombe à la Haute instance des finances locales (HIFL). Cette dernière est chargée d’examiner le texte, de formuler des avis et des recommandations concernant les mesures susceptibles d’avoir un impact sur l’autonomie financière des collectivités territoriales, et d’émettre des suggestions pour mieux articuler les ressources locales avec les politiques nationales. Pour autant, les conseillers locaux ne sont pas totalement écartés du processus. Bien que ne pouvant ni amender ni approuver le projet, ils peuvent contribuer de manière indirecte, en faisant remonter leurs propositions et préoccupations à la Haute instance, notamment en matière de fiscalité locale, de péréquation financière ou d’investissement territorial. Cette contribution permet à la HIFL d’avoir une vision plus claire des réalités locales et d’intégrer ces données dans ses recommandations. En revanche, les conseillers locaux n’ont pas à parlementer directement avec les membres des conseils municipaux ou les secrétaires généraux sur les aspects financiers nationaux. Leur mission consiste plutôt à défendre les intérêts de leur circonscription dans le cadre des mécanismes prévus par la loi, et non à intervenir dans les prérogatives des exécutifs municipaux ou régionaux. Donc, si les conseillers locaux ne sont pas des acteurs décisionnels du processus budgétaire national, ils peuvent en influencer indirectement la mise en œuvre sur le terrain, en agissant comme des relais de proximité entre les besoins locaux et les instances nationales. Bien que limité sur le plan juridique, leur rôle consultatif est essentiel afin de garantir que les spécificités territoriales soient prises en compte dans les grandes orientations financières de l’État.
Nécessité d’un nouveau Code des collectivités locales
Mais en l’état actuel des choses, il y a un désordre institutionnel qui fragilise le fonctionnement de l’Etat et ralentit la mise en œuvre des politiques publiques. C’est ce qu’a voulu évoquer le député Ben Zineb, craignant que cela risque d’entraîner un gaspillage de temps et de ressources et par là même, une perte de confiance des citoyens envers les institutions. Il déplore entre autres le non-dépôt du projet de budget de l’État au parlement, raison pour laquelle «aucun élu n’a une idée sur le plan de développement». En effet, la stabilité et l’efficacité de l’action publique passent par une gouvernance institutionnelle claire, concertée et respectueuse de l’État de droit. C’est pour cette raison qu’il est nécessaire d’établir des mécanismes de coordination plus efficaces. En l’occurrence, un nouveau Code des collectivités locales s’avère d’une urgence extrême et grâce auquel les prérogatives de chaque institution seront clarifiées. Ce qui permet d’instaurer une meilleure communication entre elles et de renforcer les mécanismes de contrôle démocratique. C’est à ce prix que l’État pourra répondre efficacement aux attentes des citoyens et restaurer la confiance dans les institutions publiques.
Ahmed NEMLAGHI
