Par Raouf KHALSI
Ce n’est pas parce qu’il a avancé un plan de cessez-le-feu à Gaza et que la Hamas y a partiellement souscrit que Trump peut se dédouaner de l’intense carnage dans la conclave. Trump prétend avoir mis fin à huit guerres en huit mois : voilà qui est burlesque. Du coup, il se voit légitime récipiendaire du Nobel de la paix. Mandela ne s’y reconnaîtrait pas !
On connaît l’ego surdimensionné de Trump. Mais à cela s’ajoute l’effronterie : voilà que nous sommes catapultés dans des stratosphères surréalistes. Il reste qu’en ces temps où les dieux marchent sur la tête, rien ne saurait être exclu. Et, tant qu’à faire, adjoignons Netanyahu au président américain pour le Nobel de la paix.
Trump a demandé à Netanyahu d’arrêter les opérations offensives à Gaza. Mais pour le Tsahal, les opérations offensives deviennent opérations défensives. Du pareil au même, en fait. Le carnage continue. Parce que ce que les sionistes redoutent le plus, c’est la paix.
Sauf que Trump rêve. Bombe le torse. C’est l’ivresse de la puissance. Parce qu’il a la conviction qu’il représente le seul gendarme au monde. Parce qu’il croit (à tort) qu’avec lui, la planète est redevenue unijambiste.
Lui prêter du machiavélisme serait faux. Rien de kafkaïen, non plus, parce qu’on sait où il veut arriver. Il serait néanmoins plus proche de Néron : attiser le feu pour ensuite, prétendre l’éteindre. Ce qui est certain, c’est qu’avec la paire Trump-Netanyahu, ou plutôt, l’inverse, l’ordre mondial est rebâti sur l’équilibre de la terreur. Sur une toute naturelle division du travail, en somme. Et l’humanité en perd sa sève.
On attribue cette phrase au grand acteur hollywoodien (et juif) Dustin Hoffman : «L’humanité a cessé d’exister à la naissance d’Israël». Une citation qui a fait sensation et qui a exposé l’acteur au courroux des lobbys sionistes. Il ne l’a jamais déniée, ni confirmée. Mais elle est réelle. Gaza le confirme.
Parce que l’humanité est en coma artificiel. Il s’en trouve, néanmoins, des êtres humains qui se soulèvent contre la barbarie. Il est même des positions d’Etat. Ainsi du grand réquisitoire du premier ministre espagnol, recensant les crimes de Trump qui prétend au Nobel. Ainsi de bon nombre d’Etats d’Amérique du Sud. Ainsi encore de bon nombre de la communauté mondiale qui quittent l’enceinte de l’ONU quand Netanyahu prend la parole.
Mais alors, d’où vient la méprise ? La grande traîtrise ? Comme toujours, de bon nombre (sinon la majorité) d’Etats et de royaumes arabes. Eux en premier.
L’abdication face au casus belli israélo-américain vient aussi du monde occidental, supposé être le «vivier» de la démocratie. La sujétion change de vis-à-vis, mais elle se répète.
Lors des années 1970, le politologue et philosophe français Jean François Revel, publiait un ouvrage intitulé «Quand les démocraties finissent». Il y analysait la manière dont les démocraties occidentales se pliaient au fait accompli et à l’impératif géographique de l’Union soviétique, en plein contexte de guerre froide. Aujourd’hui, c’est un changement de pesanteurs : l’Occident bien-pensant courbe l’échine face à Trump.
Finalement, dans ce remodelage du monde, Trump trouve de quoi satisfaire son propre ego. Peut-être, une étincelle viendra-t-elle de la Chine et du Sud global, dès lors que Poutine s’est empêtré pour longtemps encore dans le bourbier atlantiste.
Et Gaza ? Et la Palestine ?
Trump en fait un prétexte. Dans sa tête, tout, mais alors, tout est géostratégie. Il rappelle Charlie Chaplin dans son film chef-d’œuvre «Le dictateur». On y voit un homme qui ressemble à Hitler, jouant avec le Globe…
