S’exprimant sur les propos du Président de la République, Kais Saied, lors de sa réunion avec le président du Conseil supérieur de la magistrature ainsi qu’avec des constitutionnels, l’Association des magistrats tunisiens (AMT) a exprimé, hier, 12 décembre, dans un communiqué rendu public, son opposition totale, au fait de considérer la magistrature comme étant » une fonction au sein de l’Etat », affirmant que c’est plutôt une autorité garante de la justice, de la suprématie de la constitution, de l’Etat de droit et de la protection des droits et libertés, conformément à l’article 102 de la constitution.
L’AMT estime que l’indépendance de la justice et sa position en tant qu’autorité à part entière, constituent « un acquis irréversible », étant donné que c’est une revendication essentielle de la révolution tunisienne et le fruit de la lutte et des sacrifices de plusieurs générations de magistrats tunisiens.
Le bureau exécutif de l’association en question a qualifié de « dangereux » les propos tenu par Kais Saied, en exprimant son attachement au régime démocratique basé sur le principe de séparation des pouvoirs et sur l’existence d’une justice indépendante qui garantit les droits et les libertés et veille au respect de la loi.
L’AMT s’est dit, par ailleurs, attachée aux dispositions du chapitre II de la constitution de 2014 relatif aux droits et libertés et du Chapitre relatif au pouvoir judiciaire, soulignant son rejet de « toute approche unilatérale visant à toucher à ces dispositions constitutionnelles issues de processus participatifs et de longues luttes des tunisiens et des composantes de la Société civile ».
Elle a réitéré son attachement au principe de l’indépendance de la justice telle que décrite dans le chapitre de la Constitution relatif au pouvoir judiciaire, qui a consacré la rupture totale avec la soumission du pouvoir judiciaire au pouvoir exécutif et instauré le Conseil supérieur de la magistrature pour garantir l’indépendance de la justice et son bon fonctionnement.
L’association considère que la réforme de justice ne peut pas passer par la destruction de ses institutions et la suppression de la garantie de séparation entre les pouvoirs, s’opposant à toute tentative de dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature ou de porter atteinte à l’indépendance de la justice moyennant des décisions unilatérales du pouvoir exécutif.
Le bureau exécutif de l’association a, en outre, exprimé sa profonde inquiétude quant aux déclarations du président de la République concernant des affaires en cours, estimant que ces déclarations sont de nature à mettre la pression sur les juges en charge de ces affaires et qu’il est inacceptable d’émettre des commentaires directs sur le contenu des jugements, que ce soit par le pouvoir exécutif ou par les parties concernées par les affaires en question, pour ne pas perturber le déroulement des affaires et préserver l’indépendance de la justice.
Rappelons dans la foulée que le Président de la République a tenu à affirmer, lors de sa réunion, le 6 décembre 2021, avec le président du Conseil supérieur de la magistrature que « la magistrature est une fonction au sein de l’Etat ». Il a ,aussi, ajouté lors de sa réunion, le 9 décembre 2021, avec des constitutionnels que « la Constitution de 2014 n’est plus valable et ne pourrait être maintenue ».
LIM