- Annulation de l’interdiction de voyager et de classification bancaire imposées aux émetteurs de chèques qui prouvent une réelle difficulté économique
- Rééchelonnement des dettes envers les entreprises publiques
- Les entreprises en difficulté qui entrent dans le système de règlement judiciaire bénéficient de 8 % des bénéfices annuels des banques, qui leur sont alloués sous la forme d’un fonds national de soutien aux petites et moyennes entreprises, géré sous la supervision du ministère des Finances et de la Banque centrale.
La loi n°41 de 2024 encadrant l’utilisation des chèques sans provision a un impact croisé sur les PME tunisiennes. Les entreprises, en particulier les PME, ont des difficultés à accéder au financement nécessaire pour soutenir leurs activités. Le nombre de faillites a considérablement augmenté, atteignant environ 200 000 en 2023. Certaines entreprises souffrent de pertes substantielles, de baisses de chiffre d’affaires, de marges brutes réduites et de produits non compétitifs. Le nouveau système a restreint le rôle du chèque, qui était auparavant un outil de financement essentiel pour de nombreuses entreprises, en particulier les PME.
De nombreux fournisseurs refusent désormais les anciens chèques et les entreprises sont contraintes de ne faire des transactions qu’en espèces. Selon certains experts et en l’absence d’alternatives, la réforme a eu un impact négatif sur l’économie et ou la chute de l’utilisation des chèques a entraîné une augmentation massive de la circulation d’espèces, alimentant ainsi l’économie parallèle.
Une proposition de loi a été élaboré par Sahbi Ben Ali Hedfi, Coordinateur général de l’association professionnelle : « Forum National Tunisien », portant révision et complément la loi n° 41 de l’année 2024, en date du 2 août 2024, relative au code de commerce concernant la réglementation des chèques et le soutien aux entreprises en difficulté. . « Compte tenu des difficultés structurelles que connaît la scène économique, qui ont entraîné une augmentation du nombre d’entreprises en difficulté et une aggravation du nombre de condamnations prononcées dans les affaires de chèques sans provision, et compte tenu de l’importance de l’équilibre entre la protection des opérateurs économiques et la garantie des droits de l’État et du Trésor public, la présente loi est proposée pour réglementer les chèques dans le cadre d’une réforme fondée sur la transparence et le sauvetage économique des petites et moyennes entreprises. Ci-après le texte de loi proposé par Sahbi Ben Ali Hedfi :
« Chapitre unique – Le texte du chapitre 6 de la loi n° 41 de 2024 est remplacé par le texte suivant :
Chapitre 6 (nouveau) :
- Toute personne faisant l’objet d’un jugement pour chèque sans provision bénéficie, à titre exceptionnel, d’une suspension de l’exécution de la poursuite pénale pendant quatre-vingt-dix (90) jours, jusqu’à ce que le bénéficiaire présente un dossier complet comprenant : la preuve d’une transaction commerciale effective (facture, contrat de vente ou document commercial similaire),la preuve du paiement des prestations et des taxes dues, la preuve du paiement des cotisations sociales au titre de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS).
- L’exécution du jugement ou la poursuite ne peut être reprise qu’après que ces documents ont été complétés et que l’Agence de la République a certifié que le dossier est complet.
- Une fois les conditions remplies, le procureur de la République convoque les parties à une audience de conciliation devant le tribunal compétent, et le tireur du chèque est autorisé à s’engager à rembourser la dette par versements échelonnés sur une période de sept (7) à dix (10) ans, en fonction de sa situation financière et sous contrôle judiciaire direct.
Paragraphe – Gratuité de la conciliation (juste cause) et exclusion des avocats :
Les procédures de conciliation (juste cause) prévues au présent chapitre sont entièrement gratuites et ne nécessitent pas l’intervention d’un notaire, d’un huissier de justice ou d’un avocat, le procureur de la République ou la personne désignée par le tribunal étant chargée de rédiger le procès-verbal d’engagement et le calendrier entre les parties. Ce procès-verbal est considéré comme un titre exécutoire officiel qui remplace toutes les autres procédures d’exécution. Le règlement est effectué sous la supervision du pouvoir judiciaire et directement entre les parties, sans intervention professionnelle.
Paragraphe – Grâce équitable :
Si le dossier complet n’est pas présenté par le bénéficiaire dans les quatre-vingt-dix (90) jours suivant la date de publication de la loi au Journal officiel, la poursuite pénale est considérée comme éteinte de plein droit, l’émetteur du chèque bénéficie d’une grâce équitable et la dette faisant l’objet du chèque est convertie en une dette civile pure et simple qui est réglée par les voies civiles ordinaires sans aucune conséquence pénale.
Paragraphe – Responsabilité du bénéficiaire en cas de non-présentation du dossier :
Tout bénéficiaire (c’est-à-dire toute personne ayant reçu le chèque) a le droit, dans un délai de quatre-vingt-dix (90) jours, de présenter son dossier complet et le relevé des prestations, des impôts et de la couverture sociale.
Il est alors susceptible de faire l’objet d’une enquête et d’une investigation par les autorités compétentes et peut être classé parmi les personnes soupçonnées d’évasion fiscale, de dissimulation de transactions suspectes ou de pratique de l’usure et faire l’objet des mesures préventives et de contrôle appropriées.
Paragraphe – Conséquences du non-respect du règlement :
- Tout titulaire d’un chèque qui ne se conforme pas aux procédures de règlement et à la convocation devant l’agence de la République dans un délai de 90 jours voit toutes les décisions rendues à son encontre devenir pleinement exécutoires conformément à la loi.
- Toute personne qui s’est engagée à respecter un échéancier de sept (7) à dix (10) ans et qui ne s’est pas acquittée de ses paiements conformément à cet échéancier, tous les jugements rendus à son encontre sont rétablis et deviennent exécutoires comme ils l’étaient avant l’adoption du règlement.
– Soutien aux institutions en difficulté :
- Toutes les mesures d’interdiction de voyager et de classification bancaire imposées aux émetteurs de chèques qui prouvent une réelle difficulté économique sont annulées.
- Les entreprises en difficulté qui entrent dans le système de règlement judiciaire bénéficient de 8 % des bénéfices annuels des banques, qui leur sont alloués sous la forme d’un fonds national de soutien aux petites et moyennes entreprises, géré sous la supervision du ministère des Finances et de la Banque centrale.
- Les dettes des petites et moyennes entreprises envers les services publics (électricité, eau, Trésor public et sécurité sociale) sont incluses dans le règlement, à condition que ces dettes soient échelonnées selon les mêmes conditions que le règlement judiciaire pour une durée minimale de sept (7) ans.
Chapitre final :
L’autorité exécutive édicte les dispositions d’application du présent chapitre dans un délai n’excédant pas quatre-vingt-dix (90) jours à compter de la date de sa publication au Journal officiel de la République tunisienne.
Note explicative :
La présente loi vise à :
- Protéger les institutions et les particuliers en difficulté contre des sanctions pénales disproportionnées.
- Encourager le règlement à l’amiable entre les parties et réduire la pression sur les tribunaux.
- Imposer la transparence financière aux bénéficiaires avant de leur permettre d’engager des poursuites pénales
- Soutenir les établissements en difficulté financière et établir un échéancier de remboursement de leurs dettes envers l’État et les services publics.
- Fournir un mécanisme juridique équitable et transparent pour les chèques sans provision qui équilibre les droits de l’État et ceux des parties. »
« Six députés ont déjà acquiescé cette proposition de loi et il reste quatre signatures pour atteindre le quorum minimum, soit 10 signatures pour officialiser cette initiative législative », nous a affirmé Sahbi Ben Ali Hedfi.
Yosr GUERFEL AKKARI
