Haouaria est le royaume des arachides (cacahuetes) en Tunisie, contribuant à environ 80% de la production nationale totale. Mais, ce n’est pas une si bonne nouvelle pour les agriculteurs confrontés à la chute des prix et à la hausse des coûts.
Légumineuse originaire du Mexique, l’arachide est cultivée mondialement en Chine et en Inde, deux pays à la tête de la production et de l’exportation mondiales avec un volume de 23 millions de tonnes par an, tandis que le Soudan, le Tchad, le Nigeria, le Cameroun et le Sénégal arrivent aux premiers rangs en Afrique. Cette spéculation est cultivée à Hammam Ghezaz, Kélibia et Haouaria. La fertilité du sol qui caractérise ces régions agricoles a permis la réalisation des capacités de production élevée en matière de cette culture agricole, atteignant fréquemment 30 quintaux/ha, avec une capacité de production annuelle dépassant les 2000 tonnes. Le taux d’avancement de la récolte a atteint environ 60% jusqu’à présent. Aussi, dans les vastes champs de la région, des familles entières s’emploient à cueillir les fruits arrivés à maturité, après une période de croissance de six mois environ, soit entre les mois d’avril et septembre.
Bien que requérant une certaine dextérité, énormément de patience et surtout de la passion, la culture des arachides demeure une activité agricole que beaucoup de familles de cette région continuent de pratiquer avec le même élan. Cette culture exige une préparation minutieuse de la terre, puis un pénible travail manuel pour la plantation, la récolte et le nettoyage. Elle est pratiquée sur de petites parcelles variant entre trois et quatre hectares. Ainsi, toutes les opérations nécessaires à la culture des arachides, depuis la plantation jusqu’à la cueillette se font à la main, par une main-d’œuvre locale maîtrisant les techniques manuelles nécessaires. Ainsi, durant tout ce processus, l’agriculteur doit s’armer de patience pour achever la série d’opérations nécessaires, le plus tôt possible, pour éviter les mauvaises surprises dues aux premières pluies automnales qui sont généralement à l’origine du pourrissement d’une partie de la récolte.
Ces cacahuètes de Haouaria demeurent très recherchées dans la pâtisserie traditionnelle, où elle est en concurrence avec les amandes malgré les exigences des consommateurs ; elles font face toutefois à plusieurs défis, notamment l’attaque des sangliers qui endommagent les cultures, surtout que les terres agricoles sont adjacentes aux forêts, ce qui a suscité l’inquiétude des agriculteurs et les a accablés. Aux abords des champs, qui dit gros gibier, dit gros dégâts.
La labellisation ? Pourquoi pas
Les dégâts causés par les sangliers ne cessent d’augmenter. Opportunistes et omnivores, tout leur semble bon : fruits, racines, feuilles. Ces sangliers débarquent dès la tombée de la nuit et se ruent en groupes dans les champs d’arachides. Sans grillages, les cultures seraient en péril. «La protection contre les sangliers est en train de devenir un élément permanent de notre coût de production», déplore un jeune agriculteur de Haouaria. Faut-il penser à mettre en place des battues administratives pour endiguer ce fléau ? Pour sortir de l’impasse, un seul moyen : réduire le nombre de sangliers pour diminuer les dégâts. Concernant les coûts de production et leur comparaison avec le prix du marché, beaucoup d’agriculteurs affichent leur déception face à la situation de commercialisation au cours des dernières saisons, due au fait que les prix ont chuté alors que le prix juste, selon les estimations des agriculteurs, ne devrait pas être inférieur à 6 dinars. Actuellement, le kilogramme est vendu à un prix variant entre 4 et 5 dinars, ce qui ne reflète pas le coût de production réel et ne garantit pas une rentabilité satisfaisante pour les producteurs.
Consommatrice d’eau par excellence, la culture d’arachides peut être développée, pour devenir une culture industrielle nécessaire à la fabrication d’huile de table et participer à la réduction des importations en la matière pour peu qu’une attention particulière lui soit accordée.
Elle gagnerait à être valorisée par une modernisation des moyens d’irrigation et le recours à la mécanisation, ce qui contribuera certainement à l’amélioration des rendements, tout en sachant qu’un hectare en irrigué peut produire jusqu’à 13 quintaux contre 3 quintaux pour une culture en sec. Pour l’heure, les efforts sont focalisés sur la cueillette et, pourquoi pas, la labellisation de ce produit du terroir, pour lui permettre de connaître sa véritable vitesse de croisière.
Kamel BOUAOUINA
