Par Wahid SMAOUI
De l’un à l’autre, sous nos cieux sportivement acrimonieux, il n’y a qu’un petit pas qu’allègrement on franchit. C’est toute une mentalité, en fait, ointe d’outrance et d’intempérance, quand font cruellement défaut la pondération et la circonspection. C’est viscéralement incontrôlable, intérieurement irréfrénable. Il est vrai que le Tunisien que je suis, que tu es, qu’il est, se réclame immanquablement du tempérament méditerranéen : vif et expressif, extraverti et convivial, passionné et prompt à réagir. Il se prévaut pour ainsi dire d’un tempérament de feu et du fait de son extrémisme, il a des prédispositions pour verser dans le bellicisme : un vrai boutefeu en somme.
Le béant hiatus à l’actif des plus méritants toutefois, consiste à savoir se transcender au moment opportun pour user de discernement et d’à-propos. Pour les rétifs à l’intellection, en cas de victoire de leurs favoris, s’il s’agit de surcroît d’un fait d’armes ou même d’un commun tour de force, ils se laissent incoerciblement aller au triomphalisme, deviennent une proie facile à la jactance et se surprennent eux-mêmes les premiers dans les bras fallacieusement affectionnés de dame fatuité. Tout à fait aux antipodes maintenant, et au cas où les leurs se seraient, sportivement parlant, cassé la pipe, ils se laisseront glisser vers l’alarmisme, voire sombreront dans le catastrophisme.
Concise palpabilité en accord avec l’actualité : dans la plupart de nos augustes plateaux TV et radio, il y a eu un avant et un après Tunisie-Brésil. En guise de préambule, il n’y eut que de malveillants conciliabules, chacun de nos ténébreux gouailleurs de chroniqueurs, de fieffés pseudo avisés anecdotiers, renchérissant sur la déconfiture à venir, sur le flop à survenir. Des rabat-joie aux allures de bonnets de nuit, allusion particulière à ces pisse-vinaigres qui pérorent et jacassent chaque balourd lundi pour le compte d’une émission qui, à la nommer, gagnerait indûment en renommée.
Le plus affligeant, c’est que leurs propos sont détrempés dans une sournoise raillerie, dans une cauteleuse gausserie, allant jusqu’à prédire un camouflet historique avec une issue fatidique, le bannissement de Sami Trabelsi, traité odieusement de «tête de Turc» à qui d’aucuns reprochaient l’impudente couillonnade d’avoir accepté de braver l’inapprivoisable Brésil, l’astronomique Seleçao mais auxquels il aura fait un magistral pied de nez. Retournement de veste au lendemain du match, l’art de tourner casaque dans toute sa tartuffarde expression.
Et de se confondre en basses louanges, et d’encenser par d’écœurantes flagorneries, chacun allant de sa petite divagation pour enharnacher les Aigles de Carthage du diadème de l’imminent dompteur du trophée arabe et, dans la foulée, du futur triomphateur de la couronne africaine. Jusqu’à quand les padischahs de nos médias, les premiers, à vrai dire, à clouer au pilori, tolèreront-ils la diffusion de foutaises aussi vaudevillesques, obligeant le pauvre et désarmé allocutaire à avaler, à regret, d’aussi indigestes couleuvres ? Et pourquoi se laisser torturer et s’infliger pareille autopunition ? Un bouton sur lequel appuyer pour autodébrayer et ainsi, laisser aboyer…
