Les dysfonctionnements dans les mécanismes des prestations de soins par la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) ne font que persister. Après le Syndicat des pharmaciens qui a, quelque temps auparavant, menacé de suspendre la délivrance des médicaments sous le régime du tiers payant, c’est au tour du Syndicat des médecins du secteur privé de faire état d’une crise dans le mécanisme de remboursement des prestataires de soins par ladite caisse.
Cette réticence par la CNAM d’honorer les prestations, qui ne date d’ailleurs pas d’aujourd’hui, est due aux difficultés financières qu’elle a commencé à rencontrer depuis un certain de temps. Cela se répercute bien évidemment, sur le citoyen qui, de cette façon, ne peut profiter comme il se doit de la couverture sociale.
A ce propos, le président du Syndicat tunisien des médecins du secteur privé, Khemaïs Zaïed, est revenu récemment à ce sujet, sur les ondes d’une radio de la place, pour faire état des retards significatifs et récurrents dans le règlement des créances dues aux médecins. Une situation exactement comparable à celle que connaissent également les pharmaciens. Réaffirmant l’attachement des professionnels de santé au système actuel de couverture sociale, malgré ses nombreuses insuffisances structurelles, Khemaïs Zaïed a estimé qu’il est urgent de trouver des solutions viables et concertées. Il a souligné que les médecins ont consenti d’importants sacrifices afin d’assurer la continuité des soins, ce qui impose désormais à l’ensemble des parties prenantes de se mobiliser pour l’élaboration d’un mécanisme pérenne et équitable. Le responsable syndical a souligné que ces difficultés s’inscrivent dans un contexte plus large de déséquilibres structurels au sein de la CNAM, liés notamment à l’accumulation des dettes, à l’insuffisance des ressources financières et à la complexité des procédures administratives. Il a rappelé que les médecins continuent pourtant d’assurer leurs missions, souvent au prix de lourds sacrifices, afin de préserver le droit des citoyens à la santé.
Nécessaire mobilisation et concertation des parties prenantes
Pour le syndicat, seule une approche concertée, associant l’ensemble des acteurs concernés, permettra de restaurer la confiance, d’assurer la pérennité du système de sécurité sociale et de garantir aux médecins comme aux patients des conditions dignes et équitables. À défaut, avertit-il, les tensions risquent de s’aggraver, avec des répercussions directes sur le secteur de la santé et sur les droits des assurés. Néanmoins, une révision du modèle de collaboration avec la CNAM s’impose, la santé du citoyen étant une priorité non moins importante que les dépenses de retraite. D’où la nécessité d’éviter la crise par tous les moyens afin de préserver la santé des citoyens. À défaut de solutions rapides et structurelles, avertissent les représentants du corps médical, les tensions risquent de s’aggraver davantage, avec des conséquences directes sur l’offre de soins, la continuité des services et, in fine, sur les droits fondamentaux des assurés sociaux. Le syndicat souligne que la santé du citoyen ne saurait être reléguée au second plan, au même titre que les équilibres financiers des régimes de retraite ou les contraintes budgétaires de l’État. Dans ce contexte, une révision du modèle de collaboration entre la CNAM et les prestataires de soins apparaît inévitable. Celle-ci devrait reposer sur une meilleure gouvernance, une clarification des engagements financiers, des délais de remboursement raisonnables et un dialogue permanent.
L’accès équitable des citoyens aux soins, une priorité nationale
L’objectif, selon les professionnels, est d’éviter l’installation d’une crise durable dans le secteur de la santé, en préservant à la fois la viabilité du système et l’accès équitable des citoyens aux soins, considéré comme une priorité nationale. La persistance des retards de remboursement de la CNAM met en lumière une fragilité structurelle qui menace l’équilibre même du système de couverture sociale. Si les médecins du secteur privé, à l’instar des pharmaciens, réaffirment leur attachement au principe de solidarité nationale et à l’assurance maladie obligatoire, cet engagement ne saurait se maintenir durablement sans une réforme profonde des mécanismes de financement, de gestion et de gouvernance de la Caisse. L’urgence est désormais à l’ouverture d’un dialogue sérieux et responsable entre les autorités publiques, la CNAM et l’ensemble des professionnels de santé, afin de restaurer la confiance, garantir la continuité des soins aux citoyens et préserver un pilier essentiel de l’État social.
Un système fragilisé à sauvegarder
Cette réforme attendue devrait s’articuler autour de plusieurs axes majeurs et ce, par la clarification des obligations financières de la CNAM, l’instauration de délais de remboursement raisonnables et respectés, ainsi que la mise en place de mécanismes de suivi et de contrôle efficaces. À cela s’ajoute la nécessité d’un dialogue permanent et institutionnalisé entre la Caisse, les syndicats professionnels et les autorités de tutelle, afin d’anticiper les crises plutôt que d’y répondre dans l’urgence. Pour les médecins comme pour l’ensemble des prestataires de soins, il ne s’agit pas de remettre en cause le principe de la couverture sociale solidaire, auquel ils demeurent profondément attachés, mais bien de sauvegarder un système fragilisé par des dysfonctionnements structurels. La multiplication des retards de paiement et l’accumulation des créances non réglées menacent non seulement l’équilibre financier des cabinets médicaux, mais aussi la qualité et la continuité des soins offerts aux assurés sociaux.
Système de soins conformes aux exigences de l’équité sociale
Au-delà des revendications sectorielles, l’enjeu est fondamentalement social et national. Pour cela, il n’y a pas de baguette magique ou de solution miracle. Cela nécessite une volonté commune afin de garantir un accès équitable aux soins et constitue l’un des piliers de l’État social, tel que prôné par le Président de la République Kaïs Saïed, pour qui la justice sociale ne saurait se limiter aux discours, mais doit se traduire par des politiques publiques efficaces et justes. Préserver la santé du citoyen, en particulier des catégories les plus vulnérables, impose d’éviter à tout prix une crise durable du système de sécurité sociale. Réformer la CNAM, c’est non seulement protéger les droits des prestataires, mais surtout défendre le droit constitutionnel des Tunisiens à des soins dignes, accessibles et équitables. Dans ce sens, la refonte du partenariat entre la CNAM et les professionnels de santé apparaît comme une étape incontournable vers un système plus solidaire, plus équilibré et plus conforme aux exigences de l’équité sociale.
Ahmed NEMLAGHI
