La valorisation énergétique consiste à récupérer et à valoriser l’énergie produite lors du traitement des déchets sous forme de chaleur, d’électricité, de carburant. On peut distinguer deux sortes de valorisation énergétique : la valorisation par traitement thermique (incinération, co-incinération, pyrolyse et gazéification) et la valorisation du biogaz issu notamment des installations de stockage de déchets non dangereux et de la méthanisation des déchets organiques.
La valorisation énergétique permet, dans le respect de la hiérarchie des modes de gestion des déchets, d’utiliser les déchets qui n’ont pu être ni recyclés ni valorisés sous forme de matière, comme source d’énergie renouvelable et de récupération. Cette démarche s’inscrit pleinement en Tunisie dans la politique de gestion des déchets visant à réduire la quantité de déchets ménagers envoyés dans des installations de type décharges et à optimiser leur valorisation. L’objectif principal est de réduire le volume des déchets tout en produisant une énergie renouvelable, permettant ainsi d’alimenter les réseaux électriques ou de chauffage urbain. Cette valorisation énergétique s’intègre donc dans un modèle de développement durable, limitant l’impact écologique des déchets tout en optimisant l’usage des ressources disponibles.
Le traitement des déchets et la valorisation énergétique sont une solution efficace pour réduire les tonnes de déchets enfouis et produire de l’énergie utile. Grâce à des procédés comme l’incinération, la méthanisation et la gazéification, de nombreux déchets trouvent une seconde vie sous forme de matières énergétiques. En complément du recyclage classique, cette approche permet d’optimiser la gestion des déchets, de limiter les émissions polluantes et de favoriser l’installation d’une économie circulaire plus respectueuse de l’environnement. De l’incinération à la méthanisation, comment la valorisation énergétique des déchets peut-elle participer à la transition énergétique et offrir de nouvelles opportunités à la Tunisie ?
Valorisation énergétique
Cette valorisation énergétique des déchets est l’une des orientations stratégiques que le ministère de l’Environnement s’efforce de promouvoir dans les différentes régions de la République tunisienne. Dans ce cadre, le ministre de l’Environnement, Habib Obeid, a présidé une séance de travail dédiée à l’évaluation et au suivi des programmes de valorisation actuels et à l’élaboration d’une feuille de route pour les différents projets, en présence de cadres de l’Agence nationale de gestion des déchets et du ministère de l’Environnement.
Les résultats actuels des programmes de valorisation sont nombreux, dont le traitement de 202 tonnes de déchets d’équipements électriques et électroniques jusqu’au 30 novembre 2025 à Borj Chakir, la collecte d’environ 40 000 tonnes d’huiles alimentaires usagées, dont 10 000 tonnes seront exportées chaque année après traitement, la valorisation de 9600 tonnes de pneus usagés par an, ainsi que la matière de boue pour l’utiliser comme engrais dans les terres agricoles en étalant environ 500 000 mètres cubes sur près de 10 000 hectares de terres agricoles durant la saison 2024/2025, outre la production de 100 tonnes de compost organique dans le cadre de l’accompagnement technique des stations de compostage municipales et la gestion des déchets plastiques, y compris le système «Éco-emballages», où entre 50 000 et 70 000 tonnes sont collectées, traitées et valorisées chaque année.
Une feuille de route pour transformer les déchets en ressource nationale
La valorisation énergétique des déchets joue un rôle important dans la mise en œuvre de la transition énergétique et écologique de notre pays. Une stratégie nationale et une feuille de route à l’horizon 2050 sont en cours d’élaboration pour structurer le développement de ce secteur prometteur. Ces efforts visent à accélérer la transition énergétique par l’introduction de nouvelles sources d’énergie durables, à améliorer la santé publique en réduisant les impacts environnementaux liés aux décharges et à encourager la mobilisation d’investissements à travers un cadre juridique clair et des opportunités de marché. Ils s’inscrivent également dans la promotion des principes de l’économie circulaire, en transformant les déchets en ressources énergétiques et économiques.
La Tunisie n’est pas épargnée par les défis mondiaux en matière d’énergie, d’eau et d’environnement. La valorisation des déchets constitue l’une des solutions majeures pour atteindre l’indépendance énergétique. Notre pays est capable de produire 10 000 gigawattheures d’électricité par an à partir des déchets, soit environ 40% de ses besoins nationaux. Le tarif actuel de rachat de l’électricité produite à partir du biogaz, fixé à 307 millimes par kilowattheure, a permis d’attirer les investisseurs et de stimuler les investissements dans les énergies alternatives.
Des projets pilotes aux ambitions nationales
La Tunisie a produit plus de 15 millions de mètres cubes de biogaz en 2024. Plusieurs projets sont en cours à Sousse, Djerba, Béja, Tunis, Kasserine, Monastir et Zarzis pour produire du biogaz et de l’électricité à partir de déchets organiques. Cinq projets de collecte et de valorisation du biogaz à partir de décharges contrôlées, seront réalisés à l’image de celui de Sousse, avec une priorité accordée à l’injection du biogaz produit dans le réseau public de gaz afin d’en optimiser le rendement sans oublier l’élaboration d’un guide de l’investisseur dans le domaine de la gestion des déchets, par les entreprises privées, en collaboration avec l’Autorité générale du partenariat public-privé et le ministère de l’Intérieur, la mise à jour de la législation pour encourager davantage l’économie circulaire, notamment via des incitations fiscales aux entreprises engagées dans le recyclage et l’utilisation de matériaux durables, ainsi que l’adoption d’une décision relative à la valorisation des déchets et leur transformation en énergie, l’accélération de l’équipement des hôpitaux et établissements de santé en matériel nécessaire à la stérilisation des déchets médicaux avant leur traitement et leur valorisation définitive.
Cette stratégie porte l’ambition d’assurer efficacité, rapidité et maîtrise des coûts, le renforcement du rôle du Centre international de Tunis pour la technologie environnementale dans le développement des connaissances scientifiques et techniques en matière de gestion et de valorisation des déchets, ainsi que le transfert des technologies les plus récentes dans ce domaine, le développement des métiers liés à la gestion et à la valorisation des déchets, en soutenant les connaissances et technologies environnementales, en particulier dans le cadre de l’économie solidaire et la généralisation du programme d’empreinte écologique dans toutes les écoles et la mobilisation des financements nécessaires pour renforcer l’éducation et la culture environnementales, tout en invitant l’ensemble des ministères à s’engager dans une démarche de réduction de la pollution et de valorisation des différents types de déchets.
Pour permettre un réel essor du secteur de la valorisation des déchets et atteindre un taux de valorisation global de plus de 50%, l’instauration du tri à la source et l’amélioration des conditions de collecte en amont sur tout le territoire doivent être une priorité. Cela implique de réviser le modèle économique de la collecte des déchets. De plus, il est crucial de sensibiliser la population à l’importance du tri des déchets pour la préservation de l’environnement. La mise en œuvre de politiques publiques et de campagnes de sensibilisation serait bénéfique pour encourager les citoyens à adopter des comportements responsables en matière de gestion des déchets.
Kamel BOUAOUINA
