Elles sont toutes belles. Elles sont toutes magnifiques ces femmes de nationalités différentes, par ailleurs, épouses de diplomates ayant répondues présentes à l’appel d’une équipe de travail ayant planché sur la mise en route d’une application d’aide aux personnes en danger. En dehors de la politique et de ses musts, quand on est une femme de diplomate on est une ambassadrice de son pays d’origine, on est une personne plus ou moins sensible aux questions de la violence faites aux femmes et aux enfants, on est tout autant concernée par les dangers qu’encourt une personne qui subit une agression physique dans la rue, dans son lieu de travail ou derrières les portes closes d’une maison qui ne protège plus ses habitants.
Et c’est le propos de cette rencontre tenue à la résidence de l’ambassadeur de Jordanie en Tunisie. La rencontre n’avait rien d’officiel même si elle a réuni des femmes décideurs sélectionnées au volet parmi celles qui ont travaillé sur la question du genre ou celles qui se battent pour la protection des femmes où qu’elles soient. Le combat des cheffes commence déjà par la sensibilisation à la question du danger qu’encourent les femmes avec la montée de la misogynie ces dernières années.
Il faut miser sur les mentalités
Bien loin du féminisme de premier degré, le combat des femmes doit aussi miser sur les mentalités en influant notamment les représentations sociales de la question de la violence à l’encontre des femmes. Sonia Ben Djemia entre autres directrice de l’Observatoire Genre et Egalité des chances au CREDIF a mis l’accent notamment sur cette question en expliquant qu’il faut faire fi du discours élitiste sur la question du genre, en allant sur le terrain « Nous devons institutionnaliser le genre mais le genre qui nous convient en travaillant sur l’humain qui est en nous. » dit-elle en ajoutant « On a promulgué la loi 57 en 2017 contre toutes les violences faites aux femmes et aux filles. « C’est déjà un pas en avant mais il faut se mettre à l’esprit qu’il y a des disparités régionales, de mentalités, etc. » Et c’est la raison pour laquelle que cette sociologue de formation a insisté sur le fait qu’on devrait prendre en considération le triptyque ‘’socialisation, imaginaire et culture’’ dans le processus de sensibilisation sur la question de la violence faites aux femmes. On comprendra ainsi comment une femme, qui s’adresse à un poste de police pour porter plainte contre son mari agresseur est refoulée, dans un poste de police. On comprendra mieux aussi le but de ces productions télévisuelles qui banalisent le fait qu’une femme soit frappée par un homme, ou encore celles qui veulent à tout prix montrer une image faussée de la femme…
Le danger tout le danger est résumé dans ce chiffre alarmant : 50 % des femmes, l’objet d’une étude présenté lors de cette rencontre, légitiment les violences faites aux femmes ! Elles acceptent d’être tabassées par un époux indigne parce que dit-on « C’est comme ça ! » « C’est le père de ses enfants » « Parce qu’elle l’a provoqué ». Et au final parce que des islamistes malintentionnés ont pris le pouvoir en Tunisie pendant dix ans que des femmes ont été que des vies sont à jamais perdues, d’autres sont détruites. Arguant sur des faits de plus en plus palpables dans notre société qui dégénère, Leila Belkhiria, présidente de la Chambre nationale des femmes chefs d’entreprises au sein de l’UTICA a parlé de son combat d’une femme pour protéger des travailleuses, sur leurs lieux de travail ou même dans la rue. « On essaye de travailler sur le lobbying du cadre juridique pour ratifier la convention 190 pour asseoir un environnement professionnel adéquat aux femmes » dit-elle en ajoutant « On ne peut pas être une femme sans être sensible à la question de la violence que subissent les femmes quotidiennement. » Car explique-t-elle, loin des chiffres et des statistiques sur le nombre des femmes victimes de violence, il suffit qu’une seule femme soit agressée pour qu’on s’y attarde.
L’application TOOQ à la rescousse…
Il va sans dire que la situation est alarmante et qu’il faudrait agir pour venir en aide à des femmes en danger. Et c’est le propos de cette application mise en œuvre depuis novembre 2021 et qui a commencé déjà à avoir des adeptes dans le monde arabe à commencer par l’Algérie, la Lybie et la Tunisie. De quoi s’agit-il au juste. Salwa Sahloul ambassadrice de l’application TOOQ en Tunisie a expliqué que cette plateforme numérique est gratuite et accessible à toutes les personnes en danger qu’ils soient femmes, enfants ou hommes dans le monde arabe. Il suffit d’appuyer sur une touche pour que la personne en danger géo-localisée alerte ses proches dument choisies et les autorités concernées. Hormis des liens utiles cette application comporte également une librairie juridique adaptée à chaque pays et un mapping relié aux centres d’appui comme les postes de police et les organisations concernées. « TOOQ veut dire en arabe bouclier. Et cette application saura protéger et venir en aide aux personnes qui en ont besoin. On fera en sorte qu’elle soit accessible sans internet et profitables aux personnes qui n’ont pas de smartphones, et donc applicable par simple message. » Notons qu’il s’agit d’une application développée par de jeunes compétences tunisiennes et que sa vulgarisation et sa diffusion dans les pays arabes est parmi les objectifs de la belle équipe qui y travaille en collaboration avec la Confédération arabe des syndicats et prochainement avec d’autres acteurs de la société civile.
Cent ans, ça se fête
La culture n’est pas en reste, puisque cette rencontre a été organisée sous le thème de la culture jordanienne celle d’un pays qui fête ses cent ans. Et pour finir, un banquet bien fourni en gastronomie jordanienne a été généreusement offert aux convives par la maîtresse de maison, Hind Benammar, qui a réussi à rassembler des personnes et des organisations autour de ce projet prometteur.
Sans oublier les gâteaux algériens joliment disposés dans un présentoir bien garni sentant bon l’odeur l’authenticité et au goût d’amandes travaillées à l’eau de rose… Des mets délicieux et des pâtisseries qu’on a partagés dans la bonne humeur et le respect.
Mona BEN GAMRA