Une touche de jeunesse et de fraicheur, du mapping vidéo, un défilé de mode d’habits traditionnels, beaucoup de journalistes et un escadron de ministres, de conseillers présidentiels et de directeurs généraux de différents départements du ministère de la Culture. Tout y était, en effet, (ou presque !) pour donner un coup de collier médiatique (ô combien nécessaire) à cette cérémonie de lancement du « Mois du Patrimoine » qui a eu lieu dans la soirée de ce lundi à la Cité de la Culture. N’eût été, peut-être, la langue de bois, tristement « traditionnelle », utilisée encore une fois cette année pour présenter cet événement majeur du calendrier culturel de la Tunisie, cette soirée de lancement aurait pu faire un véritable carton. Positivons, quand même : ce fut le cas, malgré tout !
Deux défilés, en somme, ont marqué de concert cette cérémonie : le premier, au sens premier du terme, est un défilé de mode sur fond de musique traditionnelle, signé par le styliste-modéliste, Sofien Ben Gamra, décidément spécialiste de l’habit traditionnel ; le deuxième est un « défilé d’images », qui a passé en revue, en parallèle au premier, les principaux sites historiques et archéologiques de la Tunisie. L’objectif étant de mettre en relief le slogan (« Tenue traditionnelle : Identité nationale et Particularités régionales ») de cette 31ème édition du Mois du Patrimoine qui se tient du 18 avril au 18 mai, après deux éditions consécutives organisées en ligne.
Organisée (et donc budgétisée ?) par le Centre international de l’Economie culturelle numérique (TICDCE) en partenariat avec le Théâtre de l’Opéra de Tunis, la cérémonie s’est tenue en présence du ministre du Tourisme, Mohamed Moez Belhassine, (le contraire aurait étonné) et de celle –plutôt anecdotique- du ministre des Domaines de l’Etat et des affaires foncières, Mohamed Rekik, dont l’intervention de son département en termes de préservation du patrimoine, non seulement archéologique mais aussi foncier et domanial, reste pour le moins insuffisante, pour ne pas dire inexistante, notamment en termes de budget.
Fait assez rare, quand même, pour être souligné : les conseillers du Président Saïed, Walid Hajjem et Maroua Jabbou étaient également de la fête.
Dans son allocution d’inauguration de ce Mois du patrimoine, la ministre des Affaires culturelles, Hayet Ketat Guermazi, a puisé tout son registre, malheureusement, dans la même langue de bois, qui avait caractérisé pendant de longues décennies les événements culturels relatifs au patrimoine et à l’habit traditionnels. Langue de bois ? Celle-là même qui avait contribué, fâcheusement, à travers les années, au déclin populaire de plusieurs aspects de notre patrimoine tant matériel qu’immatériel, restés perçus durant des décennies dans l’inconscient collectif des Tunisiennes et des Tunisiens, comme une célébration protocolaire par le pouvoir en place. Rien de plus.
Dommage, parce que, en fin de compte, le contenu du discours de la ministre était tout sauf futile. C’est plutôt la manière de le présenter dans une langue de bois extrêmement irritante dans un arabe administratif à peine perceptible, qui fait plutôt des remous. Est-ce devenu si difficile pour nos dirigeants de parler notre langue maternelle dialectale, qui fait justement partie inhérente de notre patrimoine pour présenter un Mois, aussi important, qui célèbre la Culture tuniso-tunisienne ?
En tout cas, la ministre a mis l’accent, dans son discours, sur l’importance du costume traditionnel et de la sauvegarde de la mémoire collective, en tant qu’élément du patrimoine immatériel tunisien. Elle a expliqué, par ailleurs, que l’habit traditionnel tunisien reflète la richesse de notre identité, la diversité de ses composantes et son héritage historique, ainsi que son évolution à travers les âges, mettant en valeur les nouvelles influences ajoutées par les différentes civilisations qui se sont succédées dans notre pays, et qui se sont mêlés aux particularités locales et à la multiplicité de ses savoir-faire.
La ministre a annoncé, en outre, la désignation de la jeune mannequin Mariem Boukadida, « ambassadrice du costume traditionnel tunisien à l’étranger », expliquant ce choix par la notoriété de cette dernière, notamment à l’étranger, qui sera à même d’aider à promouvoir l’image du pays et à faire connaitre son patrimoine vestimentaire.
Il convient de noter, enfin, que le démarrage, effectif, du Mois du Patrimoine s’est fait lundi dans la matinée au site archéologique d’Oudhina, à Ben Arous qui a abrité une cérémonie officielle en présence de la ministre des Affaires Culturelles et du ministre du Tourisme. Au programme : une foire d’habits traditionnels ainsi que l’inauguration d’un nouvel espace dédié aux différentes manifestations organisées sur le site d’Oudhna.
Après Oudhna à l’ouverture, le musée de Douz à Kébili abritera la cérémonie de clôture, prévue le 18 mai prochain. Les activités du Mois du Patrimoine, qui sont organisées sous le slogan « Tenue Traditionnelle : Identité Nationale et Particularités Régionales », se poursuivront jusqu’au 18 mai 2022, dans toutes les régions de la Tunisie.
Slim BEN YOUSSEF