La tentative de suicide se définit comme tout acte délibéré, sans issue fatale, visant à accomplir un geste de violence sur sa propre personne ou à ingérer une substance toxique ou des médicaments à une dose supérieure à la dose thérapeutique, selon l’OMS. Malheureusement, la banalisation du suicide chez les enfants est une réalité préoccupante en Tunisie. De nombreux parents ne sont pas conscients de la gravité de ce phénomène. Pour eux, aborder cette problématique avec leurs enfants semble inutile, car ils ne croient pas que ces derniers puissent être en proie à la dépression. Ils se rassurent en pensant qu’ils ont tout ce dont un enfant pourrait rêver, et considèrent cela comme une excuse pour écarter toute possibilité de souffrance psychologique. À tort, ils pensent que le jeune âge de leurs enfants les protège d’avoir des pensées suicidaires. Par ailleurs, de nombreux enfants perçoivent la prise de leur propre vie comme un refuge face à des souffrances qu’ils ne parviennent pas à exprimer.
16 cas de suicide depuis le début de l’année
En effet, la ministre de la famille de la femme de l’enfance et des personnes âgées, Amel Bel Haj Moussa a indiqué, le 11 juillet 2023, que les cas de suicide enregistrés, parmi les enfants depuis le début de l’année 2023 jusqu’à la date du 10 juillet courant, est de l’ordre de 16 cas en plus de 176 tentatives de suicide relevées, la plupart parmi les filles.
Le programme d’autonomisation sociale des familles lancé en 2019 et qui concerne 18 gouvernorats, a permis d’examiner les phénomènes constatés au sein des familles et de procéder à une analyse sociologique, a précisé Amel Bel Haj Moussa. Des experts en sociologie ont présenté lors de cette journée un ensemble de propositions et de recommandations sur les plans régional et national dans le but d’aider à développer les mécanismes de travail lors de l’exécution des programmes selon les régions. L’importance d’assurer une meilleure coordination entre les intervenants et développer le volet juridique en Tunisie afin de lutter contre ces phénomènes ont été parmi les points évoqués lors de cette journée, a rapporté l’agence TAP.
À travers le prisme de la psychologie
Ce n’est qu’à un stade ultime que l’enfant acquiert la notion de pouvoir se donner la mort. Les enfants développent une compréhension du suicide par 3 sources : les discussions avec les enfants plus âgés, par les adultes ou la télévision, et enfin par l’acte suicidaire d’un membre de l’entourage. En effet, certains auteurs soulignent l’influence majeure des comportements suicidaires d’un membre de l’entourage de l’enfant, d’autant plus que cette personne est investie affectivement par l’enfant. L’influence de la télévision, des médias, semble aussi jouer un rôle significatif chez les plus jeunes pour qui la distinction entre réalité et imaginaire n’est pas encore parfaitement établie, et qui entre en résonance avec la toute-puissance infantile. Les phénomènes de mimétisme, d’identification de la part de l’enfant, sont importants à prendre en compte, d’après l’étude « les tentatives de suicide chez les enfants de moins de 13 ans »
Le repérage des enfants et des adolescents suicidaires repose sur une écoute active et un questionnement direct. Il est donc important de prendre au sérieux la parole de tous les enfants et adolescents qui expriment ces idées et de leur apporter une réponse réactive et adaptée. Par ailleurs, il est primordial de noter que le fait de poser de façon explicite la question à un enfant ou un adolescent sur la présence d’idées suicidaires n’induira pas de telles idées ou même un passage à l’acte. Les enfants et les adolescents qui tentent de se suicider ressentent parfois de la colère envers les membres de leur famille ou leurs amis. Ils ne sont pas en mesure de tolérer cette colère et la retournent contre eux-mêmes. Ils peuvent souhaiter manipuler ou punir d’autres personnes (« Ils regretteront quand je serai mort(e) ») Le fait d’avoir une communication difficile avec les parents peut contribuer au risque de suicide, a expliqué la Haute autorité de santé dans son communiqué intitulé « idées suicidaires chez l’enfant et l’adolescent : repérer, évaluer et orienter la prise en charge ».
Le comportement suicidaire peut aussi résulter d’une volonté d’imiter les autres. Par exemple, un suicide très médiatisé, comme celui d’une célébrité, est souvent suivi par des suicides ou des tentatives. Parfois, des suicides par imitation peuvent aussi survenir dans les écoles. Le suicide est plus probable dans les familles au sein desquelles les troubles de l’humeur sont courants, surtout en cas d’antécédent familial de suicide ou d’un autre comportement violent, d’après la même source.
Ghada DHAOUADI