Le ministre des transports a présidé, ce mardi, au siège du ministère une réunion qui a regroupé les PDG des sociétés nationales des transports en commun, ainsi qu’une participation à distance des PDG des sociétés régionales de transport. La réunion s’est intéressée au transport en commun durant la prochaine année scolaire et universitaire. Le ministre a appelé à concrétiser les recommandations qui ont fait suite à ses visites sur terrain aux différentes sociétés de transport en commun, et à éviter les défauts qui ont été, lors, relevés. Il a appelé les responsables de ces sociétés à adresser des rapports périodiques au ministère concernant leurs efforts dans ce sens.
Le ministre a rappelé la nécessité de parachever les grands projets en cours, comme le réseau du RFR. Ce qui aurait pour conséquence de désengorger les moyens actuels de transport urbain.
Un vrai calvaire
En effet, indiscutablement, la mobilité des personnes en Tunisie est devenue un vrai calvaire. Le transport public est quasiment absent et le privé est hors budget pour certains et en même temps, peine à répondre à la demande. Que ce soit sur le Grand Tunis, qui compte plus de trois millions d’habitants, soit plus de 15% de la population du pays, ou les régions de l’intérieur, la situation est plus au moins la même. Les moyens de transport publics réguliers sont dans un état lamentable: vétusté des parcs véhiculaires, des sociétés de transport en faillite, dégradation des infrastructures et non-respect des normes légales et règlementaires, service lamentable. Le citoyen lambda peut désormais passer des heures d’attentes pour se rendre au travail, aux établissements scolaires, ou tout simplement se déplacer… D’ailleurs, un constat qui pousse plusieurs citoyens, notamment les ouvrières agricoles à monter à l’arrière des pick-up pour joindre leur lieux de travail prenant ainsi tous les risques imaginables d’accidents de la route. Mais pourquoi le secteur de transport agonise en Tunisie ?
Le transport public n’arrive plus à répondre à la demande, pour les raisons citées dessus mais aussi à cause des problèmes financiers assez conséquent et qui pèsent lourd sur l’économie nationale. La société des Transports de Tunis (Transtu), couvrant 80 % du transport en commun régulier, n’arrive plus à honorer ses engagements financiers. Les dettes de la société le sont auprès des banques et des fournisseurs de pièces détachées. Le ministère en question a souligné que les charges de l’entreprise sont passées de 236 millions de dinars en 2010 à 437 millions de dinars en 2022, soit un taux annuel de 5,3%, en raison de l’augmentation de la masse salariale à un taux annuel de 8,2% entre 2010 et 2022. Il a, de plus, affirmé que l’exacerbation du phénomène de la resquille a contribué à la baisse des revenus directs de 70 millions de dinars en 2010 à 40 millions de dinars en 2022, soulignant que ce phénomène a entraîné des pertes annuelles de 20 millions de dinars et que les usagers illégaux des transports publics représentent 40% du total des passagers.
Transtu : flotte obsolète
Désormais, près de la moitié de la flotte de la Transtu est en panne et inutilisable, puisque les trains et bus deviennent obsolètes après 30 ans d’utilisation, ajoutant que la société publique œuvre actuellement à mettre en place des projets de renouvellement et de réparation des rames de métros, afin de tirer profit de ses expériences dans le domaine du Transport ferroviaire. La TRANSTU s’apprête à réaliser des grands projets pendant la période allant de 2022 à 2030, à l’instar de l’acquisition de nouveaux wagons au profit de la ligne Tunis marine et autres wagons de métro, ainsi que la réparation de l’ancien parc.
Cependant, aux innombrables problèmes liés aux moyens de transport, il ne faut pas oublier de rajouter le mauvais état des infrastructures routières. En Tunisie, les accidents de la route continuent de causer la mort et de briser des familles. Selon les statistiques de l’Observatoire national de la sécurité routière, le nombre de décès sur les routes a, quant à lui, augmenté de 29% entre le 1er janvier 2023 et le 13 avril 2023, par rapport à la même période de 2022. En 2022, quelque 5451 accidents ont été enregistrés, faisant 1044 morts et 7867 blessés, selon la même source. Ces accidents sont dû essentiellement au mauvais état des routes, au manque d’attention de la part du conducteur ou du piéton et du non-respect du code de la route. Malheureusement certains chauffeurs de moyens de transport en commun, notamment les taxis collectifs, font fi du code de la route et des règles les plus élémentaires de sécurité.
Une reconception des transports publics semble urgente. Mais rappelons aussi que les citoyens ont une part de responsabilité puisque les actes de vandalisme contre les moyens de transports publics se font de plus en plus fréquents. Ce qui aggrave à son tour la situation et cause d’importantes pertes financières pour la Transtu concernant les frais de réparations. Comment est-ce possible d’espérer un changement positif si les citoyens eux même ne réalisent pas que l’Etat et la société publique de transport, sont en train de fournir des efforts très importants pour garantir la sécurité et le confort des citoyens ? A quoi bon peut servir, de dépenser des fortunes pour réparer, alors que les actes de vandalisme ne cessent d’augmenter ?
Dans le contexte actuel de crise financière de l’Etat, investir pour renouveler la flotte des moyens de transport et essayer de l’agrandir, nécessite beaucoup de moyens. Les citoyens ont une part de responsabilité dans la maintenance de ces biens publics. S’attaquer aux biens publics ne changera rien en la situation en Tunisie, bien au contraire, cela causera davantage de pertes. Aujourd’hui, il est important d’agrandir la flotte du transport et améliorer ses services. Sachant que, vu la cherté du prix du carburant, les citoyens seront, de plus en plus, contraints à utiliser les transports en commun pour se déplacer. Cela leur permettra d’épargner du temps, vu le problème de stationnement et de parkings, et de l’argent, puisque ça coûte nettement moins cher que de prendre la voiture.
Pour le moment, la Tunisie demeure à la traine avec un système de transport obsolète et une infrastructure désastreuse. Il est impératif de parvenir à des solutions efficaces afin de résoudre le problème de mobilité des citoyens dans des conditions satisfaisantes de dignité, de sécurité et de confort.
Leila SELMI