Il n’y a pas si longtemps, les villes de Radès, Ezzahra (Saint-Germain), et surtout Hammam-Lif constituaient la principale bouffée d’oxygène pour les habitants de la capitale durant l’été. Ces derniers avaient le loisir d’opter soit pour les plages de la banlieue nord en empruntant le lézard blanc par trop vétuste soit de de rallier la Gare de Tunis avec une cadence de navettes Tunis-Hammam-Lif nettement plus soutenue et surtout pouvant assurer un transfert autrement plus important. Autre facteur avantageant cette dernière destination, les cités étant plus populaires, moins guindées avec un niveau de vie de loin plus abordable que celui arboré au nord.
Un ballet bien huilé
Dès les premières heures de la journée voire aux aurores, chaque train déverse dans les gares de Radès, Ezzahra et principalement Hammam-Lif une nuée de familles lourdement munies de l’attirail classique et immuable de nature à assurer à toute la smala une journée agréable de farniente les pieds dans l’eau. L’incontournable gargoulette permettant aux membres de se désaltérer avec de l’eau fraiche, les couffins débordants de nourritures, les draps permettant d’ériger autour d’un mât de fortune une tente-abri protectrice des rayons du soleil sans oublier l’immanquable pastèque que le chef de famille s’échine à transporter sur son épaule en maugréant dans son for intérieur.
Hôtels inabordables
Quatre hôtels à l’époque : un à Ezzahra et trois à Bordj Cedria. Mais les entrées étaient payantes et les familles ne pouvaient se permettre de les approcher : 500 millimes par tête de pipe, autorisant l’accès à la piscine et à la plage privée avec un parasol à louer de chez le préposé de la maintenance attaché à l’Hôtel.
Revirement à 180°
Qu’en est-il pour l’heure ? Toutes les unités hôtelières du pays affichent complet avec un surbooking vivement salué par leurs tenanciers ayant grandement mangé leur pain noir et traversé douloureusement les périodes de vaches maigres suite à la récente pandémie du Covid 19. Malheureusement, le littoral sud allant de Radès aux confins de Soliman est exclu de cette manne céleste et pour cause. Les communiqués officiels interdisant la baignade dans ces plages pour insalubrité en précisant exactement les points noirs à ne point fréquenter.
Un spectacle désolant
A Hammam-Lif, l’eau cristallite de naguère s’est muée en une masse verdâtre, stagnante (faute aux digues installées à quelques dizaines de mètres de la rive) dégageant des relents nauséabonds, fétides indisposant tous les banlieusards transformant leur quotidien en un véritable calvaire. Calfeutrer les fenêtres, inonder les pièces de désodorisants ne riment strictement à rien. Plus grave encore, des milliers de personnes de tout âge bradent les avertissements des responsables de l’environnement et foncent piquer une tête dans ces eaux malsaines en quête d’un brin de fraicheur. Ne pouvant disposer au fait de moyens leur permettant de rallier les plages salubres lointaines. A l’arrivée, gastroentérites ( diarrhée -vomissements), fièvres, atteintes diverses de la peau, yeux rouges et larmoyants pouvant déboucher sur de gravissimes pathologies oculaires, etc.
Lutter contre la pollution
Le moyen de remédier à cet état catastrophique des plages de la banlieue Sud sont multiples mais fort complexes. Trouver le moyen de mettre un terme au déversement des eaux usées dans la mer. Désherber les plages envahies par des végétations touffues abritant de monstrueux gros rats, et autres bestioles nuisibles. Eliminer les digues à Hammam-Lif pour permettre à l’eau de librement s’échanger confinant à la mer son identité d’antan au lieu de cet aspect hideux et désolant d’une mare stagnante.
La banlieue Sud mérite mieux
Les banlieusards du sud méritent qu’on se décarcasse pour leur assurer un minimum de confort (une baignade saine en pleine canicule). Ce faisant, les unités hôtelières de la région pourront de facto respirer et attirer les estivants autochtones et étrangers car pour l’heure, elles affichent un manque à gagner énorme et une perte sèche faramineuse avec menace de mettre la clé sous la porte et chômage technique de dizaines de familles vouées au besoin, à la faim, à la mendicité.
Mohamed Sahbi RAMMAH