La situation de l’Institut national de la statistique (INS) et la suspension de la publication des chiffres a intrigué plusieurs tunisiens qui se sont interrogés, entre autres sur les réseaux sociaux, à propos des raisons de la grève ouverte au sein de l’institution. L’INS avait annoncé, début février 2022, que certains de ses indicateurs pourraient être « publiés en retard » ou faire l’objet « d’interruption ponctuelle », en raison de la grève ouverte menée par « une large partie de son personnel », ce qui a « perturbé sensiblement l’activité de collecte sur le terrain pour de nombreuses opérations statistiques ».
Les indicateurs de l’INS, relatifs à la croissance et au chômage pour le 4e trimestre 2021, ainsi que ceux portant sur l’inflation et le commerce extérieur, pour le mois de janvier 2022, seront publiés la semaine prochaine, a voulu rassurer samedi le responsable de la communication de l’INS Hassen Ghozlani.
Grève ouverte et conjoncture délicate
Ghozlani a rappelé, dans une déclaration à la TAP, que les dernières statistiques de l’Institut datent du 10 janvier 2022, les agents ayant entamé une grève le 18 janvier, laquelle est devenue une grève ouverte depuis le 28 janvier, pour revendiquer, notamment, l’adoption du statut particulier de l’Institut et la régularisation de la situation d’une quarantaine de collaborateurs exerçant dans les différentes régions du pays.
Le responsable a fait savoir, dans le même contexte, que plusieurs réunions ont été organisées regroupant des représentants de l’Institut, de la présidence du gouvernement, des deux départements de Finances, et de l’Economie, et de l’Unité du suivi des systèmes de productivité dans les établissements et les entreprises publics. « Ces rencontres ont abouti à la préparation d’un projet de PV mais qui n’a pas été signé, jusqu’à maintenant, étant donné que la présidence du gouvernement tient à ce que le statut soit publié le 1er juin et mis en application en 2024 alors que les syndicats de l’INS (au nombre de 15) revendiquent l’application de statut, au début de l’année 2023 », a-t-il précisé.
L’expert comptable, Raouf Ghorbel a qualifié d’ « inadmissible », la suspension de la publication des indicateurs par l’INS, étant donné que cela pourrait aggraver la situation en Tunisie. « Les indicateurs économiques sont le tableau de bord pour les investisseurs tunisiens et étrangers, d’une part, et les bailleurs de fonds d’une autre part. Ils aident aussi, à concevoir les réformes structurelles qui doivent être mises en place le plus tôt possible », a-t-il dit.
« En l’absence de ces indicateurs, aucune décision ne peut être prise, aussi bien par les investisseurs que par les autorités ». Et de réitérer : « Nous souffrons en Tunisie de grandes difficultés, notamment la non clarté de la vision, et avec cette situation, les problèmes se compliqueront davantage, en cette conjoncture très délicate où nous nous apprêtons à lancer des discussions avec le FMI, pour recevoir un nouvel appui financier. »
Climat social tendu
Le 14 février 2022, l’INS avait indiqué, dans un communiqué, que certaines pages sur les réseaux sociaux ont publié des informations selon lesquelles l’Institut national de la statistique aurait subi des pressions pour modifier le nombre des participants à la consultation électronique nationale.
L’Institut avait précisé qu’il n’est pas autorisé à participer à des opérations de collecte de données en dehors des enquêtes inscrites à son programme statistique. Par ailleurs, les données individuelles collectées par l’Institut sont protégées par le secret statistique et ne peuvent être communiquées à des tiers, lit-on dans le communiqué.
Selon la même source, l’INS produit et publie des statistiques officielles de manière indépendante et conformément aux normes internationales et aux codes déontologiques de la profession. Il convient de noter ici qu’il n’y a aucune influence ou ingérence dans les travaux de l’Institut de la part du ministère de tutelle.
Dans le même contexte, l’institut a indiqué qu’ avec l’appui de la Présidence du Gouvernement et du ministère de tutelle, elle s’emploie à trouver des solutions urgentes pour calmer le climat social tendu que connaît l’institution depuis des semaines, afin de reprendre le cours normal des travaux dès que possible et éviter ainsi de nouveaux retards dans la production et la publication des statistiques officielles.
Ghada DHAOUADI